Déjà quatre années que le président Patrice Talon tient les rênes du Bénin. Quatre années de réformes, de rigueur et de travail acharné dans tous les secteurs. A l’heure du bilan, que retenir des actions menées dans les secteurs de la Communication et de la Poste. Alain Orounla, titulaire de ces départements, fait le point.
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Ça doit être fastidieux d’avoir à faire le bilan d’une équipe qu’on a rejointe il n’y a pas si longtemps que ça. Monsieur le ministre, s’il vous était donné de qualifier le bilan de quatre ans d’actions de Patrice Talon dans les secteurs dont vous avez la charge, comment le qualifierez-vous ?
Alain Orounla : Je le qualifie avec un fol enthousiasme en disant que c’est un bilan plus que satisfaisant dans les secteurs de la communication et de la poste. Je dois rappeler que le ministère de la Communication et de la Poste est effectivement un jeune ministère, mais il a l’avantage de résulter de la scission d’un plus grand ministère, le ministère de l’Economie numérique et de la Communication, donc partage avec son ministère frère, le ministère du Numérique et de la Digitalisation, le bilan que je qualifie de plus que satisfaisant.
En effet, pendant ces quatre années, l’ex-ministère de l’Economie numérique a porté les ambitions du Programme d’action du gouvernement qui retient cinq projets phares sur les quarante-cinq projets déployés pour le Bénin, et a conduit ces projets phares à leur maturation. Le ministère que j’ai le privilège de conduire aujourd’hui peut se vanter du travail qui a été fait dans les trois autres projets phares concernant le numérique, à savoir la fibre optique et le haut débit, la transition de l’analogie à la télévision numérique terrestre, la promotion et le développement des contenus numériques. Et sur ces projets phares, le ministère a considérablement avancé puisque la Tnt est devenue réalité dans notre pays et les renforcements de capacités sont mis en œuvre pour que nous parvenions aux ambitions fixées par le Programme d’action du gouvernement, le développement de contenus numériques divertissants et instructifs pour nos populations.
Monsieur le ministre, l’une de vos actions phares, c’est cette descente dans les médias, et vous avez dit : ‘’ Le Bénin ne peut se révéler sans les médias ‘’. Comment entendez-vous redorer le blason de ces médias aujourd’hui ?
Les médias ne peuvent se développer sans le numérique. Donc, le numérique était un préalable indispensable, incontournable et il fallait le développer. C’est également un préalable qu’il fallait régler comme le gouvernement s’est attelé à rendre notre pays autonome sur le plan de l’énergie électrique, à asphalter notre pays, à transformer nos cités. Il fallait faire tout ce préalable qui concourt, comme le numérique et l’internet, au développement des médias. Nous avons conscience que, sans les médias, nos progrès ne peuvent pas être connus ; sans les médias, la destination Bénin ne peut pas être connue et ne peut pas être vendue. Donc, les médias sont évidemment et éminemment au cœur de l’action du gouvernement.
Fort de cette conviction, qu’est-ce que le gouvernement, en quatre ans, a pu réaliser dans ce secteur, au-delà du numérique ?
Ce que je vous dis, c’est qu’il fallait réaliser ces préalables. Les acteurs des médias avaient une manière d’exercer, nous avons changé d’époque. Donc, il faut le renouvellement du matériel, il faut que les médias puissent s’équiper, s’outiller. Il faut renforcer leurs capacités et nous sommes dans la phase de transformation de la plupart des médias qui connaissent encore quelques difficultés d’organisation et de moyens. Mais cela n’empêche pas le gouvernement d’avoir toujours une pensée pour ces médias, puisque nous avons un cadre juridique rénové, renouvelé pour faciliter l’éclosion de nouveaux médias, renforcer la liberté de la presse.
Nous avons des cadres qui ont été mis en place pour renforcer la capacité des acteurs des médias, un secteur de plus en plus régulé avec des dispositions souples et des moyens qui sont mis en œuvre, notamment grâce au Fonds d’aide aux médias qui a été augmenté pour permettre aux différents acteurs des médias de jouer leur partition, de s’épanouir dans leur travail et d’offrir aux Béninois des contenus de très grande qualité.
Est-ce à dire, Monsieur le ministre, que sous Alain Orounla, les médias auront une meilleure attention ?
Ce n’est pas une question de ministre. C’est tout un gouvernement. C’est le chef du gouvernement et c’est surtout le Programme d’action du gouvernement qui a été adopté, qui résulte d’études et d’observations. Ce programme qui a été adopté, c’est lui qui est mis en œuvre. Le ministre n’est qu’un instrument de cette mise en œuvre. J’espère que je ne ferai pas moins bien que mes illustres prédécesseurs qui ont activement contribué à la mise en œuvre de ce Programme d’action du gouvernement dans les secteurs qui nous intéressent.
Le développement du numérique dont a besoin la télévision est-il suspensif des autres préoccupations des médias, par exemple le secteur de la publicité, la gestion du marché publicitaire dans notre pays ? On observe que le gouvernement, depuis 4 ans, n’a encore rien réalisé dans ce sens…
Ce n’est pas exact de dire que le gouvernement n’a rien réalisé. Le gouvernement réalise beaucoup et la difficulté, c’est que certains acteurs ont tendance à banaliser ce qu’on appelle les préalables. Les préalables, ce sont les fondations d’un nouvel univers que l’on veut bâtir. Vous savez, le baobab ne pousse pas aussi vite que le maïs. C’est un programme très ambitieux, c’est une transformation structurelle fondamentale qui ne peut se faire à la va-vite. On ne va pas se précipiter parce qu’on veut construire durablement. En attendant, les médias ont continué à fonctionner et les conditions de vie et d’exercice des acteurs des médias continuent d’être améliorées.
Il faut un temps avant que tout le monde soit formé, soit au diapason parce que l’univers des médias est écleptique et varié. Comme j’ai eu à le dire, tout le monde n’a pas les mêmes moyens financiers, ni les mêmes ressources humaines ni accès à la même formation. Et donc, le gouvernement a la responsabilité et a entrepris d’offrir un cadre au plus grand nombre. Les fruits seront davantage perçus et je comprends néanmoins l’impatience de certains acteurs qui sont dans l’espérance et qui ont hâte de voir ces fruits éclore.
Comment peut-on considérer que les conditions de vie, d’exercice s’améliorent avec des lois telles que le code du numérique et le code de l’information et de la communication ?
Il n’y a que les délinquants qui ont à redouter du code du numérique. La liberté d’expression n’a jamais souffert d’atteinte. Nous avons consolidé le régime de dépénalisation de ce qu’on appelait naguère ‘’les délits de presse’’.
Le code du numérique, comme son nom l’indique, vise à prévenir les infractions qui peuvent se commettre par des voies électroniques accessibles au plus grand nombre, accessibles à des gens qui ne sont pas journalistes. Donc, c’est un terrain commun. Et si, sur ce terrain commun quasiment incontrôlable, l’on laisse se perpétrer des infractions, le gouvernement ne serait pas responsable et c’est une menace à laquelle toutes les organisations et les pays font face. Donc, élaborer un code du numérique pour décourager la cybercriminalité n’est pas synonyme de viser les journalistes qui n’ont pas que cet espace pour s’exprimer et qui n’ont d’ailleurs pas à s’exprimer contre la loi par ces différents canaux. Quand on parle du code du numérique, c’est pour prévenir et punir ceux qui, par exemple, vont se livrer à l’apologie du crime, à des options régionalistes, à des diffamations.
Lorsqu’un journaliste, un acteur des médias, fait son travail, dans le respect des lois très libérales de notre pays, il n’a rien à craindre. La preuve en est que la plupart des outils des médias qui diffusent par ces canaux exercent librement, tranquillement et ne pourraient être inquiétés que si l’on relève des infractions susceptibles d’être poursuivies devant nos cours et tribunaux ; ce qui reste encore très démocratique.
Visiblement, monsieur le ministre de la Communication et de la Poste, c’est un avenir radieux que le gouvernement promet aux journalistes. Vous parliez d’ailleurs de la liberté de la presse, quel commentaire faites-vous sur le dernier classement de Reporters Sans Frontières dans lequel le Bénin a perdu des points ?
Le gouvernement n’a fait et n’a pu que prendre acte de ce classement comme il a pris acte, quelques jours et quelques semaines auparavant, d’autres classements, d’autres indices qui ont été perçus de manière plus confortable. Cela étant, la liberté de la presse ainsi que toute liberté sont des quêtes permanentes. Le gouvernement qui ne se reconnait pas dans des actes qu’il aurait pu poser pour contrarier la liberté de la presse continue néanmoins de faire tous les efforts pour que les acteurs des médias soient à niveau et puissent jouir pleinement de toutes les libertés qui garantissent l’exercice de leur profession ; mais restera vigilant aux dérapages, aux dysfonctionnements et fera parler la loi à travers les cours et tribunaux chaque fois qu’il y aura des manquements, chaque fois qu’il y aura des infractions susceptibles de faire l’objet de recours ou de procédure.
Sur la contre-performance du Bénin dans ce classement de Reporters Sans Frontières, le code du numérique a été invoqué. Qu’est-ce que ça coûterait au gouvernement, par exemple, de revoir un peu sa copie à ce niveau ?
Vous me donnez le droit de mettre le doigt sur les critères subjectifs et aléatoires qui fondent ces classements. Vous me donnez l’occasion de visiter la philosophie des organisations qui font ces classements.
Un classement qui se fait sur la base de notre code du numérique dont la validité a été admise par nos institutions, qui ressemble à tous les codes numériques, à toutes les lois qui encadrent l’exercice de l’activité par les canaux digitaux, ce classement ne peut pas imposer à un Etat de revoir sur ce seul point son code. Si le code du numérique doit être revisité, le gouvernement ou le parlement prendront leurs responsabilités. Mais le code du numérique ne peut pas être révisé alors qu’il n’a pas été suffisamment éprouvé, alors que les citoyens n’en ont rien à redouter, alors que ce code a été judicieusement établi pour prévenir et punir les infractions. C’est dire que l’espace est libre et on peut y faire toute activité à condition que ça soit licite. Cet espace n’est pas fait pour ceux qui sont malintentionnés et qui, malheureusement, existent.
Dites-nous un peu plus sur la Tnt qui est une activité majeure du secteur de la communication dont vous avez la charge…
La Tnt est un chantier abouti. C’est l’un des projets phares du Programme d’action du gouvernement qui a pour ambition d’offrir une couverture à nos foyers à 100 % à l’horizon 2021. La Tnt, c’est la Télévision numérique terrestre. Quand on parle de Tnt, c’est l’implantation de sites qui est déjà faite dans notre pays, et ces sites sont tous équipés. Pour aller vite, nous sommes dans une phase pilote et nous l’expérimentons.
C’est un projet pour lequel on a mobilisé 49,2 milliards de francs Cfa. Les antennes que nous connaissions ont été rénovées, et je crois qu’il y en a trente-cinq en tout. Et sur ces trente-cinq, il y en a vingt-cinq qui sont passées au numérique conformément aux objectifs assignés, c’est-à-dire passer de l’analogique au numérique.
Nous sommes en phase presque finale de négociation et de signature avec une société partenaire des différentes structures que nous devons mettre en place.
Cela a donc l’avantage de moderniser un tant soit peu les chaînes, notamment la chaîne de service public ?
C’est un monde de diffusion un peu plus accessible. Et c’est pour cela d’ailleurs que le gouvernement investit considérablement dans ce secteur pour faciliter la tâche à nos compatriotes et ça amène évidemment une modernisation des différentes chaînes de télévision.
Quelles seront les retombées pour les chaînes qui seront diffusées sur le bouquet de la Tnt ?
Ce qui est important, ce sont les retombées pour les Béninois qui vont accéder à une télévision de qualité à un coût moindre. Les entreprises savent défendre leurs intérêts et il y a un cadre offert pour cela puisque ça va être un partenariat qui sera négocié à l’avantage des différentes chaînes de télévision.
Dans l’aboutissement de ce projet, il est prévu que l’Ortb qui est du service public subisse également une transformation et devienne une société éditrice…
C’est l’un des défis de l’Ortb qui va passer en société éditrice. Ce qui ne réduit pas ses prérogatives ni son influence et son rayonnement. Au contraire, ça permettra de restructurer et de renforcer le personnel et les capacités professionnelles, et de se concentrer sur les contenus. Cette transformation de l’Ortb passera par la modernisation des outils de travail, la rénovation des processus de travail.
L’Ortb est plus accessible aux citoyens quelle que soit leur obédience ?
L’Ortb est une chaîne du service public, au service donc de la nation et est et demeure accessible à tous.
Monsieur le ministre, l’Office national d’imprimerie et de presse (Onip) fait aussi partie des structures relevant de votre tutelle. Que peut-on retenir au niveau de cet office en quatre ans de Rupture, concrètement ?
Au niveau de l’Onip, des progrès ont été réalisés. Le progrès que j’ai le plus observé, c’est qu’il y a une rationalisation de la gestion à l’Onip parce qu’il demeure dans ses attributs traditionnels. Il y a d’un côté, la presse qui subit de profondes transformations et qui a une ligne éditoriale épurée, appréciée du plus grand nombre des Béninois; et de l’autre, le métier de l’Onip qui est l’imprimerie qui s’est également adaptée à la transformation numérique.
Au-delà de ça, nous voudrions impulser un programme particulier adressé à l’Onip que j’invite le plus grand nombre à aller visiter et à passer des commandes, parce que nous en avons besoin. L’Onip est une grande imprimerie, et je suis tenté de dire la plus grande imprimerie du Bénin, qui gagnerait à servir l’administration et les particuliers. Mais au-delà de ça, l’ambition que nous nourrissons pour l’Onip, c’est de voir comment nous pouvons l’orienter vers de nouveaux métiers.
Monsieur le ministre, allons à la Poste. Combien de personnes s’offrent aujourd’hui encore ses services?
Tout le monde parce que la Poste a déjà le mérite d’avoir survécu et d’avoir résisté puisqu’elle est encore là. Malheureusement, elle a conservé les habitudes d’autrefois à savoir le service universel qui est de moins en moins sollicité en raison du progrès rapide qu’on a connu avec le numérique et les nouvelles sociétés de courriers accélérés.
Nous avons pris la mesure de la chose et La Poste doit se moderniser. Pour suivre les instructions du président de la République, elle doit être prospère. Cela passe par la diversification. Nous allons avoir très clairement des services financiers détachés, donc la création d’une banque postale, qui jouera le rôle d’une vraie banque. Nous en avons les moyens et les ressources. Et le service du courrier sera séparé.
La Poste a dormi pendant de nombreuses années, ce qui a permis l’éclosion d’entreprises concurrentes puisque le secteur s’est libéralisé. C’est une très bonne chose pour l’économie puisque la concurrence joue et des privés se sont installés. Nous avons l’ambition de rattraper ce retard et de réinscrire la Poste à la place qui devrait être la sienne. A défaut d’être la société qui a le monopole de ce secteur, elle doit être la société leader dans ce secteur créateur d’emplois et de devises.
Monsieur le ministre, on va parler des innovations de cet autre volet dont vous avez la charge. Vous êtes porte-parole du gouvernement, Me Alain Orounla, et à cet effet, vous avez créé quelques éléments innovants, notamment le Gouvernement en contact avec les populations (Gcp) et Gouvernement face à la presse (Gfp). N’est-ce pas le volet le plus abouti de votre portefeuille ?
Il n’y a pas de volet négligeable dans les attributions du ministre de la Communication et de la Poste. Ce qui est plus contraignant dans cet exercice, c’est qu’il implique des contacts humains. Ce n’est pas un volet anodin. Je vois plutôt cet exercice comme relevant de la promotion de l’action gouvernementale. Ce n’est pas arrangé, c’est rendre compte aux Béninois, aux populations des efforts qui sont faits par les gouvernants en compensation des sacrifices qu’on leur demande de consentir, et ça permet aux uns et aux autres d’être édifiés sur le labeur des gouvernants.
Je dirai tout simplement que c’est un style de communication comme il y en a d’autres et comme il pourrait y en avoir d’autres à venir, et nous n’en sommes pas moins fiers puisque les Béninois que nous avions eu l’occasion de rencontrer ont témoigné et nous ont fait ressentir qu’ils en avaient besoin et qu’ils en redemandent encore.
Justement, monsieur le ministre, vous avez fait le tour de plusieurs départements. Certains y voient une nouvelle forme de propagande. Qu’avez-vous à leur répondre?
Tout dépend de là où chacun se situe. Nous savons que nous faisons de la promotion de l’action gouvernementale. Cela a été réclamé par les populations et par les élus qui sont contents de savoir que le gouvernement qui a été très discret à l’œuvre pendant quatre ans, a choisi, maintenant que les fruits sont perceptibles, d’aller sonder les populations afin de leur faire comprendre ce qui leur parait lointain.
Alain Orounla, votre rôle de porte-parole vous met dans une position transversale par rapport à l’ensemble du gouvernement. Avez-vous vraiment le sentiment que nous sommes dans le temps des moissons ?
Bien sûr que c’est le temps des moissons, et je suis heureux de ne pas avoir à en faire, puisque chacun de mes illustres collègues, surtout ceux qui étaient là, dès les premières heures, ont eu le temps de rendre compte des différentes avancées et nos compatriotes le verront, nous faisons référence à toutes ces avancées portées par chacun de mes collègues. Et nous sommes aussi dans le peuple et voyons les résultats extraordinaires qui ont été obtenus.
Monsieur le ministre, enfin quel message pour nos populations ?
J’ai foi et j’invite chacun de nos compatriotes à l’espérance, car comme le président de la République l’a dit, l’heure du développement a sonné et elle a véritablement sonné et nous devons y croire.