Créé le 12 juin dernier à la faveur d’un congrès constitutif, le parti ‘’Restaurer la confiance’’(Rlc) envisage déjà d’aller à la conquête du pouvoir en 2026. Avant cela, son premier combat est de se faire représenter à l’Assemblée nationale en 2023. Mais comment compte-t-il y parvenir, vu les mésententes prévalant au sein de l’Opposition dont il se réclame ? Iréné Agossa, président dudit parti et candidat malheureux à la présidentielle du 11 avril dernier, dit en avoir la clé. Dans cette interview, il dévoile les raisons de la création de Rlc, sa thérapie pour le Bénin et le regard qu’il porte sur l’échiquier politique national.
La nation : Candidat malheureux au poste de vice-président lors de l’élection présidentielle du 11 avril dernier sur la base d’un mouvement appelé ‘’Restaurer la confiance’’, vous venez de créer votre parti politique. Pourquoi ce choix?
Iréné Agossa : Le dernier quinquennat a considérablement affaibli notre démocratie, fracturé notre pays et conduit à une rupture démocratique et à une perte totale de la confiance entre les différentes composantes de notre nation. Et sur ce chemin de restauration de la confiance sur lequel nous nous sommes engagés, l’élection présidentielle d’avril 2021 était une étape. Pour nous, quel que soit le contexte politique, le combat pour l’alternance est dans les urnes. Le peuple de l’Opposition ne l’a pas compris. Mais une tendance, fondée sur la sacralisation du vote populaire s’est dégagée. Cette tendance d’environ 3 %, doit être portée à 25 %, car nos idéaux sont clairs et nos valeurs sont en jeu. Et pour cela, il faut un parti politique qui va faire une nouvelle offre politique et pouvoir convaincre les citoyens béninois pour une alternance le moment venu. C’est donc la raison pour laquelle nous nous sommes constitués très rapidement en parti politique une fois que la période électorale était passée.
Quels idéaux politiques défendez-vous alors ?
Au parti ‘’Restaurer la confiance’’, nous prônons un modèle économique libéral. Mais en accordant une importance à la dimension sociale pour faire émerger une classe moyenne. Nous sommes donc des sociaux-libéraux. Nous croyons en la force des idées. Et l’idée d’un Etat qui inspire confiance et qui met le dirigeant au service de la nation et ses citoyens a fait germer le parti ‘’Restaurer la confiance (Rlc) ‘’. Le parti Rlc s’inscrit dans la volonté de bâtir un projet politique avec pour objectif de redresser l’économie du Bénin et redonner du pouvoir d’achat aux Béninois, supprimer les freins à l’emploi et au développement de nos entreprises ; et nous travaillons à préserver l’unité de la Nation. Nous sommes nés pour confirmer tout ce que nous avons dit au moment de l’élection présidentielle. Cette élection à laquelle nous avons participé avec foi, audace et engagement. Nous avons été témoins et nous avons été acteurs du processus démocratique dans notre pays. Nous voulons en finir avec les fractures sociales, les fractures politiques, les fractures économiques, les fractures régionales, voire les fractures ethniques. Nous voulons conserver ce que le Bénin a de cher, ce qu’on nous a laissé. Cet héritage, c’est la paix, la capacité de pouvoir dialoguer, de pouvoir résoudre nos crises à travers les méthodes les plus indiquées qui sont bonnes à nous et à notre peuple, ce grand peuple béninois.
Un parti certes, mais de quel bord êtes-vous et quelles sont les structures qui composent le parti ?
Le parti ‘’Restaurer la confiance’’ est un parti d’opposition. Nous sommes une opposition républicaine, libre et responsable ; nous prônons la culture de l’alternance par les urnes et travaillons à conserver l’héritage de notre pays qu’est le consensus. Nous incarnons une opposition vigilante et exigeante, notamment contre le matraquage fiscal sur les ménages et la dégradation des finances publiques et contre tout ce qui menace l’unité de la Nation. Par nos propositions, nous voulons contribuer à élever le niveau du débat public. S’exprimer, échanger dans le cadre d’un débat d’idées structuré et argumenté, loin des arguments d’autorité et des invectives personnelles stériles. Car un débat d’idées digne de ce nom est l’une des réponses à notre malaise démocratique. Le parti Rlc est dirigé par un Bureau exécutif national. Nous avons des coordinations départementales, des coordinations communales, de quartiers et de villages. Nous allons prochainement renforcer nos structures en élisant un bureau politique ainsi qu’un Conseil national qui sera en quelque sorte le parlement du parti.
Que répondez-vous à ceux qui disent que vous avez trahi votre ancien parti « Les Démocrates » ?
Par définition quand on parle de trahison, cela signifie un manquement à la foi donnée à quelqu’un, à la solidarité envers quelqu’un ou envers un groupe. Nous avons eu une divergence de vue sur la question de la participation ou non à l’élection présidentielle d’avril 2021 et sur la question du parrainage. Moi je suis pour l’alternance par les urnes et pour le principe de s’appuyer sur les lois existantes pour accéder au pouvoir et les changer. Pour moi, un candidat qui veut représenter le parti à l’élection présidentielle doit avoir un dossier complet, donc le parrainage. Lorsque j’ai réussi par la négociation à avoir le parrainage, ceux qui parlent de « trahison » ont fait de la contradiction principale qu’est le départ du président Talon, la contradiction secondaire à savoir qui sera candidat du parti. Je rappelle que le parrainage est obtenu au nom d’une personne et non au nom du parti. On aurait pu discuter à l’interne et trouver un accord pour faire participer le parti à l’élection présidentielle d’avril 2021, mais le parti m’a suspendu sans même m’écouter. Si trahison il y a eue, pensent-ils que les 3 % environ de Béninois qui ont voté pour nous les ont aussi trahis ? Nous n’avons trahi personne. Ils ont plutôt trahi le peuple. Et au lieu de continuer à parler de trahison, ils gagneraient à venir aux assises de l’opposition auxquelles nous nous appelons, et qui permettront de clarifier la forme et la stratégie de combat face à notre adversaire commun.
Quel regard portez-vous sur l’échiquier politique national?
L’élection présidentielle de 2021 a rebattu les cartes du paysage politique béninois. Au niveau de l’Opposition, une tendance s’est dégagée du fait que nous (dynamique Rlc) avons tout fait pour donner la possibilité au peuple de l’opposition de s’exprimer à travers les urnes, car pour nous, le peuple est le dernier rempart en démocratie. Ce qui nous donne aujourd’hui une identité, le parti Rlc. C’est pour cela que nous appelons aux assises de l’Opposition, qui permettront de clarifier la forme et la stratégie pour proposer une offre alternative au régime en place. Certes, il y a beaucoup moins de partis politiques que par le passé, mais on ne peut pas pour autant dire que la réforme du système partisan est un succès, puisque le chef de l’Etat lui-même qui doit être l’incarnation d’une vision politique n’a pas de parti politique. Il a fondé deux blocs mais il n’est membre d’aucun des deux et en même temps accueille trois autres partis dans son entourage politique. Je pense qu’on doit parvenir à un environnement politique où l’adhésion aux idéaux du leader se fait non pas par la contrainte et la force mais par la confiance et la satisfaction des besoins de la population.
Quelles sont vos ambitions pour les élections législatives et présidentielle prochaines ?
Pour 2023, il faut que l’Opposition soit représentée au parlement. Au Rlc, notre ambition est d’avoir un nombre important de députés au parlement pour aller à un équilibre des rapports de forces entre l’Opposition et le pouvoir. Ceci dans la droite ligne de la restauration de l’équilibre des institutions de contre-pouvoir, et de la réalisation de l’alternance en 2026. Nous affinerons nos stratégies au cours des semaines et mois à venir, c’est pourquoi nous en appelons de toute urgence aux assises de l’Opposition.
Pensez-vous obtenir la confiance du peuple ?
Avoir la confiance du peuple est une aspiration permanente et le résultat d’un travail de longue haleine. Nous nous y attelons chaque jour et nous espérons avoir gain de cause le moment venu.
Propos recueillis par Isidore Alexis GOZO