La Nation Bénin...
La guerre des « sages » aura-t-elle lieu, suite à la création du Sénat dont les membres, rien que du fait de leurs profils se font valoir comme ''sages'' tels les membres de la Cour Constitutionnelle ?
Avec l’institutionnalisation du Sénat, dont les membres sont appelés sénateurs mais sont aussi des « sages » de par leurs prérogatives morales, à bien des égards, s’est insinuée une confusion dans les esprits laissant croire que le Sénat allait désormais s’approprier certains des pouvoirs de la Cour constitutionnelle, dont les membres sont jusque-là qualifiés de « sages ». Il n’en est rien, cependant.
Le Sénat apparaît comme un gardien du temple pour obliger les acteurs politiques à toujours mettre en avant l’intérêt supérieur de la nation. Il a pour missions de réguler la vie politique pour la sauvegarde et le renforcement des acquis de l’unité nationale, du développement de la Nation, de la défense du territoire, de la sécurité publique, de la démocratie et de la paix ; veiller aux mœurs politiques, au renforcement et à la continuité de l’Etat ainsi qu’à la stabilité politique ; veiller au respect de la trêve politique. Il ne marche aucunement sur les plates-bandes de la Cour constitutionnelle, qui a certes vu ses attributions réaménagées.
Plus haute juridiction en matière constitutionnelle
Il apparait clairement que la Cour constitutionnelle occupe toujours une place centrale dans l’architecture juridique de l’Etat béninois. Aussi, le réajustement, suite à la révision de la Constitution, de ses compétences, porte sur l’article 114 nouveau, qui la définit comme la plus haute juridiction en matière constitutionnelle, assurant le contrôle de la constitutionnalité des lois et garantissant ainsi le respect des droits fondamentaux de la personne humaine et des libertés publiques. En ce sens, la Cour joue un rôle régulateur essentiel quant au fonctionnement des institutions républicaines en veillant à ce que toutes leurs actions soient conformes à la Constitution.
Dans un Etat de droit, la protection des droits fondamentaux ne saurait être dissociée de l’action du pouvoir judiciaire, car ce dernier est investi de la mission de faire respecter les lois et de sanctionner leurs violations, notamment à travers le contentieux relatif aux atteintes aux droits des citoyens. C’est pourquoi on affirme généralement que le juge judiciaire est le véritable gardien des libertés individuelles, précisément parce qu’il statue de manière concrète sur les faits et les manquements aux droits, en appliquant directement les règles protectrices.
Aussi, la Constitution, dans son souci d’inclure une double fonction à la Cour constitutionnelle, lui a attribué non seulement le contrôle abstrait et a priori des lois et règlements mais aussi la garantie des droits fondamentaux.
En assurant le contrôle de constitutionnalité, la Cour veille déjà indirectement à ce que les textes soient conformes aux droits humains, sans forcément intervenir comme instance de sanction judiciaire. Par conséquent, il est apparu nécessaire de rétablir une distinction claire entre le rôle de la Cour constitutionnelle, qui est celui d’un juge normatif chargé de l’interprétation et de la protection des normes constitutionnelles, et celui des juridictions judiciaires ordinaires qui doivent prendre en charge le contentieux de la violation effective des droits fondamentaux.
Pas de confusion
La récente révision constitutionnelle a précisément rétabli cet ordre des choses, en recentrant la compétence de la Cour constitutionnelle sur le contrôle de constitutionnalité stricto sensu, et en réservant aux tribunaux judiciaires la mission de sanction des atteintes à la personne humaine, ce qui correspond mieux à leurs fonctions propres et permet un fonctionnement plus harmonieux et efficace du système judiciaire global. Ce réaménagement pertinent des compétences évite ainsi la confusion des rôles entre juges constitutionnel et judiciaires, préserve la spécialisation des juridictions et garantit une protection effective des droits fondamentaux dans leur dimension pratique et concrète, tout en maintenant la fonction essentielle de contrôle constitutionnel sur les normes et institutions fondamentales de la République.
Cour constitutionnelle-Sénat La guerre des « sages » n’aura pas lieu