La Nation Bénin...
28 février 1990-28 février 2018. Il y a exactement 28 ans, la conférence nationale prenait fin. Ainsi formulé, on croit entendre le Te deum d’on ne sait quelles matines ou quelque requiem. On n’est pas loin d’un tel esprit, celui d’enterrement, vu le peu de cas qui est fait de cette date dont la célébration de l’anniversaire passe, dirait-on, pour une broutille ! Au point, si l’on n’y prend garde, de tomber aux oubliettes. Il s’agit pourtant d’un rendez-vous historique des forces vives de la nation tel qu’il a été consacré, ce, fort justement. Et ayant permis au Bénin de prendre un autre détour salvateur, de sortir du mur dans lequel il était engagé.
Il ne faut pas oublier en effet d’où le pays était parti avant d’accoucher du Renouveau démocratique. Car, du fait de l’idéologie qui avait prévalu entre 1975 et 1990, du fait de la politique menée par le Parti de la révolution populaire du Bénin (PRPB), les énergies s’étaient dispersées, de nombreux Béninois se sont exilés ; et nombreux étaient aussi ceux de l’intérieur qui, par opposition à l’ordre des choses de l’époque, ne vivaient pas moins un exil intérieur, se désintéressant des affaires du pays en guise de résistance au régime PRPB. En somme, les forces vives n’étaient pas au chevet de la nation, peu ou prou. Le résultat, on le connait : la faillite de l’Etat, la déliquescence de la République.
La messe de la résurrection
La conférence nationale ne fut donc pas une banale affaire, un symposium ordinaire. Ce fut la grand’messe, messe républicaine. Celle qui fonda une nouvelle République. On parla justement de Renouveau démocratique. La semaine du 19 au 28 février au Bénin, de ce fait, doit être marquée d’une pierre blanche, car au terme de la conférence nationale, notre patrie prit un Nouveau départ. Ce fut le Nouveau départ avant l’heure, avant l’autre, celui motivé, à raison, par la dilapidation progressive, sous une forme ou une autre, de l’héritage issu des assises tenues au PLM-Aledjo.
De cet héritage, qu’en est-il en vérité aujourd’hui ? Il y a à boire et à manger, à ce propos ! Tant et si bien que plus grand monde ne se soucie de la célébration de cette date, ô combien importante dans l’histoire du Bénin, de l’Afrique…dans l’Histoire, la marche du monde… Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre, dit cependant l’adage. D’où sans doute l’antienne d’une Assise nationale réclamée à hue et à dia actuellement mais aux contours encore flous.
« Un pays qui oublie son passé n'a pas d'avenir », prévient cependant Winston Churchill. Aussi, des organisations de la Société civile et des personnalités, sous la férule de Social Watch, ont-elles œuvré pour sauver les meubles cette année par l’organisation d’un forum citoyen sur les acquis de la conférence nationale. Quid des tenants des attributs de la République, des dirigeants d’hier comme d’aujourd’hui ? La conférence nationale vaut bien une messe, une célébration officiellement consacrée. N’est-il pas ?
Tout se passe comme si on en est arrivé à avoir honte de ce pan important de notre histoire, confrontés que certains sont au miroir de leur conscience. Parce qu’on ne se conforme plus, ni à l’esprit ni à la lettre de la conférence nationale ! L’état de délabrement avancé dans lequel se trouve le PLM-Aledjo , l’antre dans lequel fut tenue cette assise historique, laissée à l’abandon, renseigne largement sur cet état d’esprit et l’estime en laquelle on tient les conclusions de ladite messe. Comme si, on craint que l’œil ne soit comme dans la tombe de Caïn, en l’occurrence que la célébration de cette anniversaire ne rappelle les bonnes résolutions de la conférence…
Chacun pourra en dire ce qu’il veut, mais il n’est pas superfétatoire, au-delà d’une simple célébration, de préférer la célébration du terme de la conférence nationale, soit le 28 février, à la date anniversaire de l’indépendance, soit le 1er août ! Encore qu’il est tout à fait admis de décréter les deux dates comme fête nationale ! Les exemples à cet effet ne manquent pas dans le monde. Il en est ainsi du calendrier français qui se distingue par sa cohorte de jours fériés qui parsèment l'année de jours de congés généreusement offerts par l'Etat. Ils correspondent aux fêtes chrétiennes, aux fêtes civiles et aux commémorations des deux dernières guerres mondiales. Outre le 14 juillet bien connu, il y a le 10 Mai, célébré en souvenir de 1945 consacrant la fin des combats, la victoire des alliés et le retrait de l'armée allemande, après une terrible guerre mondiale de quatre ans. Il y a aussi le jour férié patriotique, la fête de l'armistice célébrée le 11 novembre. Et chaque année, des fleurs sont déposées sur la tombe du soldat inconnu et s'y déroule une cérémonie commémorative où sont présents des vétérans. Depuis 1923, une flamme qui ne doit jamais s'éteindre a été installée près de ce tombeau, pour constituer un symbole patriotique et politique puissant. Pourquoi pas au Bénin chaque 28 février une cérémonie rappelant les résolutions de PLM-Aledjo voire ériger une flamme (qui ne doit jamais s'éteindre) similaire ?
Aux Etats-Unis, on célèbre outre le 4 juillet, le Presidents Day (Jour des présidents), jour férié fédéral en l'honneur des différents présidents des États-Unis, officiellement désigné sous le nom de Washington's Birthday. Il y a également le Memorial Day, pour rendre hommage aux membres des Forces armées des États-Unis morts au combat toutes guerres confondues, en plus du Veterans Day qui rend hommage aux anciens combattants, un véritable culte aux USA. Que dire du Jour de Christophe Colomb célébré le deuxième lundi d'octobre, en commémoration de la date d'arrivée de Christophe Colomb dans le Nouveau Monde en 1492 ? Juste rappeler aux Béninois qu’« Un pays qui oublie son passé n'a pas d'avenir »- Winston Churchill.