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Souvenir de l’agression du 16 janvier 1977: Que reste-t-il encore de la conscience patriotique ?

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Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 16 janv. 2018 à 05h59

16 janvier 1977 - 16 janvier 2018. Il y a exactement 41 ans, un groupe de mercenaires conduit par le Français  Gilbert Bourgeaud alias Bob Denard ou encore Colonel Maurin, a attaqué matinalement la République populaire du Bénin (Rpb) et sa révolution, avant d’être mis en déroute.

En ce jour anniversaire, l’Armée et les familles des victimes se souviennent de ce triste événement qui visait le renversement du régime militaro-marxiste du lieutenant-colonel d’alors, Mathieu Kérékou. C’est le moment de se souvenir des sept martyrs Paulin Thotho, Yessoufou Lassissi, Sylvain Comlan, Basile Abiodoun, Pascal N’po Dabapa, Mathieu Tossou et Alassan Kassim, tombés au front.
Au-delà du devoir de mémoire qui se traduit par le dépôt de gerbe et les messes d’action de grâce pour le repos des âmes des défunts, il y a lieu de s’interroger sur ce qui reste du patriotisme et de la mobilisation des masses pour les causes justes, toutes choses qui ont permis une riposte énergique aux ennemis.
«... Chaque militante et militant de la Révolution où qu’il se trouve doit se considérer et se comporter comme un soldat au front engagé dans un combat sacré pour sauver la patrie en danger », avait annoncé le ‘’grand camarade de lutte’’ Mathieu Kérékou. « Nous lançons un appel patriotique aux Comités de défense de la Révolution (Cdr) et à toutes les instances locales de notre Révolution démocratique et populaire pour qu’ils développent et renforcent la riposte massive aux ennemis du peuple béninois. La Révolution ou la mort ! Mort aux traîtres ! Prêt pour la Révolution ! La lutte continue», a-t-il ajouté. Ce message qui tourna en boucle sur les platines de la radio nationale et publié dans le numéro spécial d’Ehuzu, l’organe de militantisme révolutionnaire, paru le même jour de l’invasion, a sonné la mobilisation générale dans le pays. L’appel entendu, les citoyens ne se sont pas fait prier. Courageux, ils s’arment comme ils peuvent, qui avec coupe-coupe, certains avec gourdins, d'autres avec des pierres, sans crainte de se faire pilonner par les mercenaires qui étaient annoncés pourtant comme « lourdement armés ». Quelle bravoure ! Quel sens patriotique ! Au bout de trois heures après l’attaque matinale du dimanche 16 janvier, les envahisseurs, confrontés à la riposte des Forces armées béninoises et des citoyens, parvenaient à décoller précipitamment, laissant des équipements et même un membre du contingent en la personne du Guinéen Bah Alpha Oumarou qui sera capturé vivant.
Si c’est aujourd’hui que l’appel du président Kérékou tombait, combien sortiraient volontiers pour aller au front et sauver la patrie en danger ? Très peu en tout cas. Il n’est pas exagéré de dire que le patriotisme se meurt aujourd’hui, notamment chez les jeunes. D’ailleurs, la date du 16 janvier 1977, qui n’est pas célébrée outre mesure, ne leur dit pas grand-chose.
Par ailleurs, les familles des martyrs sont abandonnées à elles-mêmes. Une situation qui n’est pas sans conséquence sur l’engagement citoyen des jeunes aujourd’hui désemparés et sans repère et qui ne comprennent autre langage que celui de l’argent et du profit immédiat. Car, personne n’accepterait mourir pour la patrie pour que ses proches souffrent le martyre, sans autre reconnaissance.
Donner le goût du civisme et inculquer le patriotisme à chaque Béninoise et à chaque Béninois à travers une formation patriotique, idéologique et prémilitaire restent un chantier immense de nos jours. C’est en cela que le vote de la loi n° 2007-27 du 20 septembre 2007 portant institution du service militaire d’intérêt national et sa mise en œuvre entre 2007 et 2010 ont été salués par plus d’un. Mais très tôt, comme nombre de projets, les soubresauts politiques ont fait de faire ranger au placard cette noble idée qui devrait contribuer à l’accroissement du niveau de conscience patriotique, en attendant un autre éclair de génie des dirigeants?

Claude Urbain PLAGBETO