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Wenceslas Adjognon-Monnon au sujet des Vodun days: « C’est une occasion en or d’affirmer notre culture et notre patrimoine »

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Wenceslas Adjognon-Monnon Wenceslas Adjognon-Monnon

Depuis 1992, le Bénin donne rendez-vous au monde entier, le 10 janvier, pour magnifier les cultes Vodun dans plusieurs villes du pays. Cette année, à Ouidah, la fête du 10 janvier se réinvente avec les Vodun days initiés par le gouvernement pour donner une envergure de cette célébration et stimuler le tourisme religieux qui, en fin de compte, boostera la destination Bénin. Dans cette interview, Wenceslas Adjognon-Monnon, chef projet Vodun days et directeur du Programme Tourisme à l’Agence nationale des Patrimoines touristiques (Anpt), revient sur l’idée qui sous-tend l’initiative et dévoile les activités au programme durant les deux jours de manifestations.

Par   Ariel GBAGUIDI, le 02 janv. 2024 à 08h52 Durée 5 min.
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La Nation : Les Vodun days sont une innovation du gouvernement pour célébrer autrement le 10 janvier à Ouidah, afin de booster la destination Bénin. Concrètement, que peut-on comprendre à travers cette initiative ?

Wenceslas Adjognon-Monnon: Les Vodun days sont un rendez-vous que nous donnons à Ouidah dans le cadre de la célébration de la fête du 10 janvier, avec des temps forts, des espaces forts, avec une ville en fête pendant deux jours (les 9 et 10 janvier), une ville qui n’oublie pas de célébrer ses religions, sa culture traditionnelle. Donc, la fête du 10 janvier continue d’exister partout dans le Bénin mais à Ouidah, il y a une concentration d’événements, de festivités et c’est ce rendez-vous qui constitue les Vodun days.

A quoi les visiteurs devront-ils s’attendre sur le terrain la veille et le jour J ?

Avant même la veille, il y a ce que nous appelons communément le side-event, c’est-à-dire ce qui se passe pour chauffer l’ambiance, préparer l’événement. Ça se passe à partir du samedi 6 janvier. Il y aura du Jazz au Centre culturel de rencontre international (Ccri) John Smith à Ouidah, avec Laura Prince qui est une auteure musicienne. Elle sera suivie d’autres artistes. Les 6 et 7 janvier, nous avons une déambulation dans les artères et rues de Ouidah avec une troupe brésilienne qui permet de mettre l’ambiance dans la ville et d’augmenter un peu la ferveur.
A partir du 9 janvier, nous avons quatre places qui sont dédiées aux Vodun days. Il y a deux places pour les vodun masqués et deux places pour les vodun non masqués. Ensuite, on a une place au niveau de la plage. Les vodun masqués tels que les Egun-gun sortent à la place Maro à Ouidah, à l’esplanade du Fort français, nous aurons les Zangbéto, à la forêt sacrée de Kpassè, nous aurons les vodun Hounvè. Au niveau de l’esplanade du temple des Pythons, on aura les vodun non masqués. Au niveau de la plage, nous aurons Mami Wata. Tout ça se passera en matinée et en après-midi les 9 et 10 janvier. Le 9 au soir, à 19h, à l’espace de festivités au niveau de la Porte du non-retour, il y aura un grand concert Afro Pop avec en première partie Pépé Oléka, Jah Baba et Les Teriba. En deuxième partie on aura le groupe Tabou Combo, Teni, Yemi Alade, Koffi Olomidé.
Ceux qui sont fatigués et qui ont des hôtels vont rentrer, sinon on va pouvoir accueillir les gens au niveau du camping préparé à cet effet.
Le lendemain, on garde le même dispositif mais le soir, on aura la grande cérémonie vodun qui va consister en une cosmogonie vodun, des propos introductifs, la consultation du fâ, la sortie des fidèles des couvents vodun. Après cela, nous allons avoir la prière finale du pontife qui va faire ses prières sur la ville et le peuple. Par la suite, on aura un autre concert mais de musique traditionnelle avec des artistes qui font du gan-gan tels que Sagbohan Danialou, Kofo The Wonderman, les Frères Guedehoungue, les frères Totin, Wood Sound, Norberka, Ayôdélé, Noussoï. Ce concert va mettre fin aux Vodun days.
En termes de préparatifs, les places sont prêtes, nous allons commencer l’implantation de nos structures au début de cette semaine, le village des festivités sera ouvert à partir du 9 janvier mais les places dans Ouidah seront animées à partir du 6 janvier. Les comités ont fait ce qu’ils ont à faire, on est prêt, nous avons effectué les répétitions, les repérages, au plan sécuritaire (sécurité sanitaire et sécurité des biens et des personnes) tout est mis en place, nous allons tout faire pour fluidifier la circulation dans Ouidah, faciliter le transport de ceux qui n’ont pas de véhicule et souhaiteront venir de Cotonou, etc. Voilà autant de dispositions qui ont été prises pour rendre la fête inoubliable. A Ouidah, nous attendons autour de 15 000 visiteurs par jour.

Au sujet des artistes étrangers invités, il y a une controverse autour de la présence de Koffi Olomidé. D'aucuns estiment qu'il y a bien d'autres artistes africains mieux placés que lui, qui défendent la culture, les traditions et les valeurs africaines. Que répondez-vous à cela ?

Koffi Olomidé est un artiste connu et il ne m’appartient pas de porter un jugement sur ses valeurs, qu’elles soient musicales ou morales. Je ne suis pas convaincu qu’il ait moins de vertus que d’autres en termes d’africanité. Mais n’oublions pas que nous faisons une fête autour du vodun qui est tolérant, qui accepte tout le monde. Le vodun ne clive pas et nous aussi nous ne sommes pas non plus dans le clivage. Nous, dans notre programmation, nous avons choisi des musiciens des pays qui ont le vodun en partage. Il y a des Haïtiens, des Brésiliens, des Nigérians, et le Congo a aussi le vodun en partage.

Les Voduns days sont organisés en intelligence avec les dignitaires des cultes vodun. Comment ont-ils accueilli l'initiative ?

Notre démarche a toujours été de ne rien faire sans les personnes concernées. Nous avons travaillé main dans la main avec les dignitaires et le gouvernement a même créé un comité des rites vodun. Nous avons des moments d’échanges permanents avec les dignitaires et c’est sous leur impulsion que nous avons fait les programmations, que nous avons travaillé et pas l’inverse, parce que ce sont eux qui sont les dépositaires des traditions. Donc, c’est d’abord leur fête et nous on les accompagne.

On s’attendait à faire la fête dans l’arène du vodun, mais tel n’est pas le cas. Est-ce en raison des travaux ?

Ce n’est pas en raison des travaux. Comme je l’ai mentionné tout à l’heure, nous attendons autour de 15 000 personnes par jour alors que l’arène prend 2 500 à 3 000 personnes. C’est trop restreint. L’arène a été construite pour d’autres activités culturelles tout au long de l’année dans Ouidah mais le rendez-vous international, les Vodun days, se passera à côté de l’arène, non loin de la porte du non-retour.

Le gouvernement exécute depuis quelques mois des projets directement en lien avec les Vodun days. Rappelez-nous ces projets et leur niveau d’exécution à la date d’aujourd’hui. 

A l’Agence nationale des Patrimoines touristiques, nous avons au moins une douzaine de projets sur le développement du tourisme dans notre pays. En lien direct avec les Vodun days, nous avons deux projets à savoir la Route des couvents Vodun qui permet de créer un circuit touristique de plusieurs couvents disséminés dans le Bénin. L’idée est de parcourir le pays en découvrant différents vodun de la grande famille vodun.
Nous sommes dans la phase pilote avec Ouidah, Adjarra, Kétou, Abomey, Grand-Popo, etc. et pour la phase de généralisation, on ira à Dassa, Savalou et tout le reste du pays, en tout cas partout où nous allons rencontrer le vodun. Le second projet, c’est le musée international du vodun qui est en train de sortir de terre à Porto-Novo. Il n’est pas logique qu’on ait le musée du vodun à Strasbourg. Ça doit être chez nous, nous sommes la terre du vodun et on doit s’affirmer comme telle. Donc, le musée du vodun sera finalisé avec tout le dispositif qu’il faut.

Votre mot de la fin pour conclure cet entretien !

Je voudrais dire aux populations béninoises de ne pas se faire conter l’événement. Le vodun est ce que nous avons à partager avec le monde entier, le vrai vodun. Ce vrai vodun, il nous appartient de le découvrir. Et pour le faire, il faut aller là où ça se trouve, là où on parle du vodun et non dans des endroits cachés ou chez des gens qui se prévalent de ce qu’ils ne sont pas.
Je pense que c’est une occasion en or qui nous est offerte, d’aller affirmer notre culture et notre patrimoine?