Carmen Toudonou à propos de son ouvrage ‘’2500 jours et nuits’’: « J´ai toujours rêvé d´écrire pour le jeune public »

La Nation : Quelle est la thématique abordée dans votre nouvel ouvrage ‘’2500 jours et nuits’’ ?

 La pièce ‘’2 500 jours et nuits’’ porte sur la thématique de la menstruation. La fable implique une adolescente et sa mère. La première a fugué après avoir essuyé les moqueries de ses camarades suite à ses premières règles. La mère désespérée part donc à la recherche de sa fille qu'elle finit par retrouver. S'ensuit une discussion passionnée entre la fille qui accuse sa génitrice de ne l'avoir pas préparée à affronter cette épreuve et la mère qui essaie de se justifier tant bien que mal.

L'idée qui sous-tend l'écriture de cette pièce, c'est de déconstruire les préjugés autour de la menstruation. C'est un sujet tabou dans nos sociétés ; on en parle très peu. On considère cela comme sale. Ce regard négatif porté sur les règles (qu'on ne dénomme jamais d'ailleurs directement comme telles. On dit "les chinois, les anglais... ‘’) s'étend aux femmes, puisque ce sont elles qui sont « réglées». Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si l'un des plus célèbres euphémismes pour dire "j'ai mes règles", c'est "je suis indisposée".

Comme je l'écris dans la pièce, dès qu'on parle de règles, "il y a malaise". Fort heureusement, dans cette pièce, nous apprenons que les règles, c'est la vie, car sans elles, point de maternité possible. La pièce a été rédigée dans le cadre d'un projet conduit par le metteur en scène Achille Senifa et soutenu par l’Institut Français du Bénin.

 Quel est le message fort que vous véhiculez au travers des 92 pages de cette œuvre littéraire ?

 J'ai toujours rêvé d'écrire pour le jeune public. Je suis très passionnée par le théâtre jeune public et je rêve même d'écrire un jour pour les bébés. Ce sont là des cibles qui sont assez négligées par les dramaturges sous nos cieux, alors qu'il est important d'intéresser les enfants le plus tôt possible aux activités culturelles.

Le théâtre est un art idoine de ce point de vue. Le message passé à travers cette pièce, c'est de convier les filles à comprendre et accepter leur corps qui est en pleine mutation à l'adolescence, et de dire aux jeunes garçons qu'il est important de se respecter, de respecter les filles et aussi les autres garçons.

 Votre pièce de théâtre ‘’2 500 jours et nuits’’ a été mise en scène neuf fois avant la parution de l’ouvrage. Pourquoi avoir adopté une telle démarche ?

 Quand j'ai commencé à écrire du théâtre, je m'étais juré que je n'éditerais pas l'une quelconque de mes pièces, avant qu'elle n'ait été jouée une fois au minimum. Pour moi, en effet, le théâtre, c'est d'abord de la scène, avant d'être du texte, même si le processus de création se fait dans l'ordre inverse.

La pièce, depuis sa première, a été jouée sur les scènes les plus prestigieuses, aussi bien ici au Bénin qu'au Togo. Elle a été jouée neuf fois et elle sera sûrement encore jouée ici et ailleurs. Je précise que c'est une pièce pour clowns qui a été écrite et montée à l'intention d'un public jeune, même si tous les publics peuvent s'y retrouver. Elle a été créée pour la première fois le 16 septembre 2023 au Bénin par une équipe jeune et talentueuse, menée par Achille Senifa avec les comédiennes Ornela Fagnon et Sidoine Agoua au jeu.

Je reste reconnaissante à l'Institut Français du Bénin, Nova Villa, Sedjro Giovanni, Nathalie Houvoh Yekpe, Mireille Gandégbagni et Jérôme Tossavi de même que tous ceux qui me soutiennent.

 Quelle connotation particulière revêt le titre ‘’2500 jours et nuits’’ ?

 En fait, si on cumule la durée des règles dans la vie d'une femme prise au hasard, depuis l'adolescence jusqu'à la ménopause, on obtient en moyenne cette durée de 2500 jours (et nuits). D’où ce titre attribué au livre.

 Pour vous, si ‘’2500 jours et nuits’’ devrait se décrire en une phrase, laquelle de l’ouvrage serait-ce ?

 Je ne saurais répondre. Mais si je devais citer une phrase représentative de la pièce, ce serait celle-ci : "Ici, tout recommence". Parce que les règles fonctionnent en cycle, comme la vie au fond. Elles symbolisent donc la vie qui est mouvement. Cela va et vient, comme les règles, qui ponctuent la vie de la femme, mère de l'humanité.