La Nation Bénin...
Les
milliers de bras valides qui périssent au fond de la Méditerranée n’ont pas
suffi à décourager les jeunes africains candidats à la migration. Echec des campagnes
de sensibilisation et des actions politiques, qui oblige l’art à venir à la
rescousse. Six spectacles et une soirée cinéma ! C’est ce que proposent un
collectif d’artistes pour sortir les vrais clichés de la vie de nombreux
migrants en Europe.
La
plupart des porteurs du projet « Eclats d’humanité, voyage au cœur de la
solitude » ont une histoire avec l’Europe. Ils y ont vécu des décennies
durant. S’ils ont réussi à se construire, à faire parler leurs talents et même
à s’intégrer socialement, tout ne fut pas rose. Le chemin fut bien plus
tortueux, et la plupart d’entre eux ont dû faire face à des misères. Des
misères qu’ils auraient pu éviter s’ils avaient fait d’autres choix, ou du
moins s’ils avaient été instruits et orientés sur les peines de la migration et
de l’aventure européenne. L’illusion de la belle vie européenne qui trottine
dans la tête de la majorité des jeunes Africains qui finissent souvent noyés ou
jetés en pleine mer interpelle ces hommes et femmes de l’art qui embouchent à
l’unanimité la trompette de la sensibilisation.
A Ouidah, ville ancienne de l’aventure incertaine en mer et côté esclavagiste, ils donnent rendez-vous à la jeunesse et à toute la population, dès le dimanche 27 octobre prochain. Ils seront au Centre culturel de rencontre international (Ccri) John Smith pour le vernissage de l’exposition « L’invisible révélé ». Sophie Gamba Lautier et Andy Ngoua de la compagnie Dju-dju auront ensuite l’occasion de présenter la pièce chorégraphique « Flou migratoire ». Dans une obscurité ponctuée de petites sources lumineuses, deux personnages évoquent le dialogue complexe entre une conscience collective ambigüe et le témoignage poignant d’un parcours migratoire. La pièce explore les enjeux contemporains de la migration et met en lumière les conditions d’accueil des migrants. Bien plus qu’une pièce, il s’agit d’une immersion au cœur de l’expérience migratoire. Les jeunes Africains en Europe sont en solitude, en délabrement et en désespoir, mais continuent de vendre l’illusion au pays, déplore Vincent Edoh, danseur et chorégraphe, un des porteurs du projet. « C’est cette absence d’humanité dans laquelle nous vivons en Europe que nous venons exposer à travers ces spectacles », soutient-il.
Robert Senou, danseur chorégraphe présentera pour sa part, « Anaswa, le souffle d'une mère ». En une cinquantaine de minutes, le danseur, en hommage à sa mère, emporte dans un voyage initiatique, imprégné de son héritage culturel. Il conjugue à la fois la danse et les mots, la poésie et l’humour, la tendresse et la fantaisie. L’énergie dont il fait montre sur scène est la résultante de l’amour qu’il témoigne pour sa mère qui a dû souffrir de l’absence d’un fils parti pour l’ailleurs. Ce spectacle interroge aussi les fragilités des envies des jeunes Africains très portés par l’aventure, peu importe les risques. Deuxième date à retenir au titre de ce programme « Eclats d’humanité, voyage au cœur de la solitude », lundi 29 octobre avec deux pièces chorégraphiques à savoir « Entre deux mondes : la danse de l’identité» et « symphonie de la solitude ». Enfin, le 30 octobre, toujours au Ccri, une soirée cinéma avec « sombras ». Le programme prévoit également des échanges avec les jeunes et une série de formations. En prélude aux activités, le Centre de développement artistique et culturel Elijah de Ouidah, né de différentes expériences artistiques construites autour d’une autre idée de la danse, reçoit du beau monde. Une trentaine d’artistes aux profils variés y sont en formation, en immersion ou en résidence. Certains sont activement impliqués dans le projet. Projet appelé à voyager dans d’autres pays comme le Rwanda, l’Allemagne et bien d’autres destinations■