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« L’absence » de Sarah Thiriet: Une création qui peint les tourments de la migration

Culture
Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 11 avr. 2023 à 00h04
L’incertitude et l’espoir, le danger et le courage…, la création de Sara Thiriet dénommée "L’absence" est un rouleau de dualités. En résidence à l'espace culturel "Le Centre" au Bénin, l’artiste plasticienne française s’inspire des éléments caractéristiques de la culture et de l’environnement béninois pour aborder la question de la migration.Dans le dédale de la nature et de ses courbes, il affiche un courage inspirant. Mais en dépit de toute l’énergie qu’il déploie, le résultat reste incertain. Puis dans le tourment des vagues de la mer, il est entre espoir et désespoir, hésitation et assurance, foi et incertitude ; tel un homme qui va en aventure sans en connaître l’issue ! Tel un candidat à l’émigration qui est conscient de l’incertitude de l’aventure ! Dans le déroulé des images de la création visuelle de Sarah Thiriet intitulée "L’absence", la dualité est présente à plusieurs niveaux. Après une visualisation assidue, l’on saisit bien pourquoi la dénomination de la pièce symbolise cette même dualité : "L’absence" mais traduit en fon par : "Nukun nido mè" qui signifie : "confiance". Lors d’un atelier d’échanges dans le cadre du programme Work in progress à l’espace Le Centre, la conceptrice partage son expérience. « J’ai voulu réaliser un travail de vidéaste parce que cela me permettait de sortir un maximum et d’aller à la rencontre du pays. L’imaginaire béninois me nourrit pour tout y compris pour ma pratique de volume, de dessins… Mais là l’enjeu, c’était vraiment de saisir l’essentiel. J’étais venue au départ au Bénin avec l’ambition de me nourrir au niveau d’une culture animiste depuis la nuit des temps. Mais suite à la visualisation d’un spectacle de théâtre qui s’appelle "Zone franche" et que j’ai beaucoup apprécié, j’ai compris que la question migratoire était très importante au Bénin. Pourquoi on part et pourquoi on reste ? Du coup, j’ai voulu réunir toutes ces idées dans un travail de vidéaste. Et comme la question migratoire est un phénomène qui prend assez vite une allure dramatique, je propose dans ma création une forme de rituel païen, selon ma conception et avec l’apport d’acteurs béninois qui sont plus ou moins moulés dans la pratique». Pour l’artiste, il s’agit d’une création picturale faite d’images évocatrices. « Ce n’est pas une histoire, c’est un tableau. Nous avons construit un tableau ».

Immersion dans l’environnement béninois

Résidant elle-même au Sud de la France, notamment à Sète au bord de la mer, Sarah Thiriet se retrouve sur les bords de l’Océan Atlantique à Cotonou, comme chez elle. C’est tout à fait normal que ce cadre familier l’inspire et occupe une fonction importante dans sa création. « La mer, dans mon travail, c’est le côté animiste que j’ai nourri. La mer est l’élément de la nature que je relie à l’homme et c’est peut-être par prédisposition naturelle. En général dans mon travail, il est question d’équilibre, de déséquilibre… La mer renvoie à une idée de dangerosité, de fragilité mais aussi de beauté et de transparence. C’est une fenêtre sur le reste du monde. Et c’est pour cela que je l’incarne souvent par des objets en verre; parce que le verre, c’est fragile, c’est dangereux et c’est beau », explique l’artiste. Elle se dit heureuse de l’accueil, en l’occurrence de la bonne collaboration avec les pêcheurs d’Adounko et Avlékété lors du tournage. Et c’est avec plaisir qu’elle réalise la présence d’un pêcheur à l’atelier d’exposition de la création. « J’ai été très flattée de voir un des pêcheurs, visualiser cette création en entièreté. C’était sur son site que nous avons travaillé. Il a très tôt compris qu’il était question d’aller à la rencontre de leur réalité et non de piétiner les habitudes. Il a compris qu’on était respectueux de la difficulté de la pêche, de l’effort physique remarquable. Il est arrivé alors que ce n’est pas forcément son habitude d’aller à des expositions », s’est réjouie l’artiste plasticienne Sarah Thiriet ■