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Emergence de la cryptomonnaie: Un moyen de paiement novateur mais à risques

Economie
L’Ansalb ouvre le débat sur la place de la monnaie en général et de la cryptomonnaie dans l’économie des pays africains, au-delà de ses avantages réels L’Ansalb ouvre le débat sur la place de la monnaie en général et de la cryptomonnaie dans l’économie des pays africains, au-delà de ses avantages réels

Réseau de paiement novateur, les cryptomonnaies comportent de nombreux avantages, mais aussi des risques énormes. Une conférence organisée par l’Ansalb, ce jeudi 19 octobre à Cotonou, révèle les problèmes de protection juridique liés à leur utilisation et la nécessité d’une réglementation appropriée.

Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 20 oct. 2023 à 01h18 Durée 5 min.
#Emergence de la cryptomonnaie

Au moins 23 640 cryptomonnaies sont recensées dans le monde en avril 2023 dans 195 pays, selon CoinMarketCap.com, plateforme de suivi des données de marché et de capitalisation boursière des actifs cryptographiques. Dans ce climat dynamique où naissent et disparaissent les cryptoactifs, il importe de scruter la place des pays africains dans le développement de ce réseau qui échappe au contrôle des autorités et dans les relations économiques internationales.

Tel est l’objectif visé par l’Académie nationale des sciences, arts et lettres du Bénin (Ansalb) en organisant hier à Cotonou, une conférence sur le thème « Monnaie et cryptomonnaie en Afrique », ayant réuni des universitaires, des opérateurs et autres spécialistes des questions de monnaie. Elle entend nourrir le débat alimenté par l’imbroglio de devises, de non-devises, de monnaies, de cryptomonnaies ou de monnaies dématérialisées.

« Il est attendu de cette conférence que la connaissance de l’histoire de la monnaie en Afrique, son évolution dans le temps et son futur dans cette ère de la digitalisation, de la dématérialisation et de la cryptomonnaie sous un climat d’indépendance financière vis-à-vis des grandes puissances, soient portées au grand public dans un discours accessible », justifie le professeur Michel Boko, secrétaire perpétuel de l’Ansalb. Les raisons de la pénétration fulgurante de la cryptomonnaie en Afrique, indique-t-il, sont à rechercher non seulement dans le fait qu’elle constitue un moyen plus efficace et plus rentable de transférer de l’argent, mais aussi et surtout parce qu’il existe sur le continent une forte population non bancarisée qui lui offre de fait une marge de progression relativement grande ».

Le développement de ce phénomène économique et monétaire qui a cours dans le monde depuis l’avènement en 2009 du premier réseau décentralisé pour les transactions financières qu’est le Bitcoin, est porté par les technologies de la communication et l’intelligence artificielle.

Protection !

Première monnaie sans banque qui remplirait pourtant les mêmes fonctions qu’une monnaie traditionnelle, l’engouement que suscite la cryptomonnaie, réside aussi dans le fait qu’elle constitue un réseau de paiement novateur et une nouvelle forme d’argent, selon Radji Laïssi, vice-président du Ces. La cryptomonnaie n’a pas besoin d’une autorité centrale ni de support physique pour fonctionner, elle n’a de cours légal dans aucun pays du monde et sa valeur n’est indexée ni sur le coût de l’or ni sur celui des devises classiques, fait-il remarquer. N’obéissant qu’à la loi de l’offre et de la demande, elle se présente comme une alternative peu coûteuse pour l’accès aux services financiers et une opportunité d’autonomisation financière des pays à monnaies arrimées aux devises occidentales.

Toutefois, de ces atouts découlent les nombreux défis à relever tels que l’absence de régulation et de mécanismes de contrôle, le manque d’infrastructures et de ressources logistiques pour la gestion des monnaies virtuelles, relève Eugène C. Ezin, professeur en Informatique et Intelligence artificielle.

Non reconnues comme des instruments financiers dans de nombreux pays, les cryptomonnaies sont plutôt considérées comme des « biens appropriables », nuance Dr Julien Comlan Hounkpè, spécialiste du droit du numérique. « Leur nature est controversée et les autorités monétaires doivent déterminer comment traiter ces actifs numériques innovants et les défis juridiques de la monnaie dématérialisée », préconise-t-il.

Blockchain, la technologie sous-jacente aux cryptomonnaies, soulève également des questions juridiques complexes en matière de propriété intellectuelle, d’utilisation des smart-contracts (programmes informatiques), de litiges, de protection des données, signale Dr Hounkpè. Les risques infractionnels, la forte propension à la spéculation financière et autres enjeux socioéconomiques de ces moyens de paiement indépendants des réseaux bancaires rendent nécessaire leur réglementation qui doit reposer sur la prise en compte de l’encadrement au plan international et les solutions spécifiques au contexte africain, suggère-t-il.