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Jistna 2025 à Ouidah: Un hommage aux victimes, entre mémoire, résilience et avenir

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Au-delà des discours officiels, la célébration a été marquée par plusieurs  activités symboliques et culturelles Au-delà des discours officiels, la célébration a été marquée par plusieurs activités symboliques et culturelles

Dans la cité historique de Ouidah, symbole des douleurs du passé mais aussi des promesses de réconciliation et de renaissance, s’est tenue la célébration de l’édition 2025 de la Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition (Jistna), samedi 23 août dernier. Sous l’égide du ministre Jean Michel Abimbola, la célébration a été un moment d’échanges et de réflexion.

Par   Arnaud DOUMANHOUN, le 25 août 2025 à 07h57 Durée 3 min.
#Jistna 2025 #ouidah

Placée sous le thème «Mémoire, résilience et avenir : Honorer les victimes, construire pour demain », l’édition 2025 de la Journée internationale du souvenir de la traite négrière et de son abolition (Jistna) a mobilisé à Oudiah autorités, chercheurs, porteurs de mémoire, représentants de la diaspora et autochtones. Entre discours solennels, instants de recueillement et actes symboliques, le Bénin a réaffirmé son engagement à faire vivre la mémoire de ses ancêtres et à bâtir un avenir tourné vers la réconciliation et l’unité. A l’entame des manifestations, Jean Michel Abimbola, ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts, a invité l’assistance à un instant de silence intérieur : «Pour écouter le murmure de nos ancêtres, ces millions d’hommes, de femmes et d’enfants arrachés à la tendresse des leurs, déracinés de leurs terres et engloutis dans les calmes obscurs des navires négriers. Leur souffle fut brisé, mais leur voix traverse encore le temps ». Il a rappelé que la mémoire ne se réduit pas à une commémoration annuelle mais constitue une exigence morale et une semence politique et culturelle: « Mémoire, résilience et avenir, honorer les victimes, construire pour demain. Ce thème est une boussole : il nous enseigne que ce souvenir ne suffit pas. Il faut transmettre, guérir et bâtir.» Jean Michel Abimbola a donc salué la présence des chercheurs et acteurs culturels venus du Bénin, de la diaspora africaine et d’ailleurs, soulignant l’importance de leurs contributions dans l’effort collectif de transmission de la mémoire.

La diaspora exprime sa reconnaissance

La voix de la diaspora a retenti à travers l’intervention de Akhsamiya Martial, présidente de l’Association La Médiation internationale pour les réparations (Mir-Bénin). Évoquant son parcours personnel, elle a témoigné de la puissance spirituelle et identitaire du retour au pays des ancêtres. « Oui, nous avons tout quitté en Martinique pour répondre à l’appel puissant de nos aïeux qui ont tant crié pour revenir chez eux. Le retour, c’est un acte profondément spirituel. C’est une réparation pour nos aïeux et une autoréparation pour leurs descendants que nous sommes », a-t-elle précisé. Elle a également rendu hommage aux grandes figures de la résistance et de la pensée noire dont Béhanzin, Toussaint Louverture, Aimé Césaire, Frantz Fanon, avant de saluer la décision historique du Bénin à travers l’adoption de la loi portant reconnaissance de la nationalité aux Afro-descendants. En vigueur depuis le 3 juillet 2025, cette mesure permet aux descendants d’esclaves de retrouver un lien juridique et identitaire avec leur terre d’origine. « C’est une belle réparation aux préjudices des déportations. Elle facilitera le retour des Afro-descendants, pas seulement au Bénin mais sur tout le continent», a-t-elle déclaré, exprimant la gratitude de sa communauté envers le président Patrice Talon et le gouvernement béninois.

Pour sa part, Mawugnon Christian Houétchénou, maire de Ouidah, a exprimé la reconnaissance de sa commune pour les investissements réalisés dans le cadre du tourisme mémoriel et patrimonial : « Je voudrais remercier le gouvernement pour les chefs-d’œuvre réalisés dans notre belle et magnifique cité, en mémoire de tous nos frères et sœurs qui furent déportés et qui, aujourd’hui, commencent à revenir ». Il a insisté sur le rôle de cette journée, comme moment d’échanges et de réflexion «pour reconstruire ensemble notre histoire et notre avenir ».

Au-delà des discours officiels, la célébration a été marquée par plusieurs activités symboliques et culturelles. Une conférence inaugurale animée par le Professeur Dieudonné Gnammankou a porté sur le thème : « 182 ans après le Clotilda : Mémoire et survivances culturelles du Bénin et de l’Afrique à Africatown en Alabama ». Ce rappel historique du dernier navire négrier à avoir traversé l’Atlantique a mis en lumière la persistance des héritages culturels africains dans la diaspora. La célébration s’est également traduite en animations culturelles, une marche silencieuse, un lâcher de colombes et une formation d’une chaîne d’union en mémoire des victimes. Ce 23 août 2025, au bord de l’océan Atlantique, là où tant de destins furent brisés, le Bénin a réaffirmé que le souvenir des ancêtres déportés n’est pas seulement un héritage, mais aussi une force pour construire demain.