La Nation Bénin...
Le Bénin a engagé depuis quelques années une analyse approfondie de son système national de passation des marchés publics. Conduite selon la méthodologie Maps-II, cette démarche a permis de diagnostiquer les faiblesses du dispositif, d’identifier des pistes d’amélioration et d’élaborer un plan stratégique 2024-2028. Une étape décisive pour renforcer la transparence, la professionnalisation et l’efficacité de la commande publique.
« Tout système dépourvu de mécanisme d’évaluation voit son efficacité diminuer ». Pour Harouna Djibrilla Djimba, spécialiste senior en passation des marchés au bureau de la Banque mondiale, cette réalité a longtemps pesé sur la performance de la commande publique au Bénin. Entre 2014 et août 2021, aucune analyse globale n’avait été menée, limitant la capacité de l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) à orienter ses réformes de manière optimale. Conscientes de l’importance stratégique de la commande publique, véritable levier de développement et d’investissement, le Bénin a décidé de combler cette lacune. C’est ainsi qu’en août 2021, le gouvernement, avec l’appui technique et financier de la Banque mondiale, a lancé une évaluation approfondie du système national de passation des marchés. Une démarche ambitieuse réalisée selon la méthodologie internationale Maps-II (Methodology for Assessing Procurement Systems), qui repose sur des examens de conformité, des entretiens, des enquêtes, et plusieurs ateliers de validation. L’objectif est de mesurer la performance du dispositif, identifier les forces et les faiblesses, puis recommander des actions priorisées pour renforcer la transparence, l’efficacité et la gouvernance du secteur. Le rapport final, désormais disponible, constitue un outil précieux pour l’Armp, qui s’en est servie pour élaborer son plan stratégique 2024-2028. Ce document fixe les orientations majeures pour moderniser en profondeur la commande publique au Bénin.
Pour améliorer la performance globale du système, le plan stratégique s’articule autour de trois axes structurants. Premièrement, le renforcement du cadre juridique et institutionnel, à travers la révision des textes, la mise à niveau des capacités des acteurs, ainsi que l’accès libre et gratuit à l’information sur les marchés publics. Cette transparence accrue doit permettre une meilleure compréhension des procédures et une participation élargie des entreprises, notamment nationales. Le deuxième axe est l’amélioration de l’efficacité du système, notamment via la professionnalisation des acteurs, l’alignement des plans d’achats publics avec les budgets disponibles, le soutien renforcé au secteur privé, et une meilleure gestion des données. L’objectif est de garantir que les marchés soient passés dans les délais, au meilleur coût, et avec un impact réel sur les performances des politiques publiques. Troisièmement, le renforcement de l’intégrité et de la transparence, notamment grâce à une implication accrue des organisations de la société civile (Osc), un meilleur dispositif de contrôle, et une gestion plus efficace des plaintes dans les marchés publics. Ces mesures visent à prévenir les risques de collusion, de corruption ou de favoritisme.
Dynamique de modernisation
L’engagement de la Banque mondiale dans l’évaluation du système de passation des marchés au Bénin ne date pas d’aujourd´hui. Le pays avait déjà bénéficié d’une première évaluation externe en 1999, conclue par le rapport Cpar (Country Procurement Assessment Report), qui proposait des recommandations assorties d’un plan d’actions. Une deuxième évaluation a été menée en 2014, basée sur les indicateurs de l’Ocde/Cad. L’exercice en cours constitue donc la troisième évaluation d’envergure. Supervisée par le ministre d’État chargé de l’Économie et des Finances, elle a mobilisé un comité technique regroupant l’Armp, la Direction nationale de contrôle des marchés publics, la Cour des comptes, l’Inspection générale des finances, les Osc et le Conseil national du patronat du Bénin. L’équipe d’évaluation comprend un coordonnateur et dix experts, dont un consultant international. Plusieurs priorités se dégagent du rapport Maps-II et des analyses de l’Armp. La première concerne l’accélération du déploiement de la plateforme e-procurement, qui a été récemment lancée pour dynamiser le système. La deuxième priorité est la digitalisation du processus de gestion des plaintes, un levier essentiel pour renforcer la confiance des acteurs. L’Armp souhaite également accroître la surveillance du système, notamment via la réalisation régulière d’audits indépendants, aujourd’hui jugés insuffisants. Autre enjeu majeur est d’assurer une meilleure production, la centralisation et transmission des données, pour permettre une évaluation continue et fiable de la performance du système. Enfin, l’un des points clés consiste à suivre l’ensemble des réformes recommandées par l’évaluation Maps-II, afin de garantir leur mise en œuvre effective et durable.
Pour Harouna Djibrilla Djimba, la performance du système de passation des marchés publics est un indicateur puissant pour stimuler l’investissement, renforcer la confiance des partenaires et favoriser une croissance inclusive, forte et résiliente. Les réformes engagées par le Bénin s’inscrivent pleinement dans cette dynamique. En modernisant et en professionnalisant son dispositif, le pays se dote d’un outil stratégique essentiel pour optimiser la dépense publique, attirer davantage d’investissements et consolider sa gouvernance économique.
La modernisation de la commande publique au Bénin est effective pour renforcer la transparence, la professionnalisation et l’efficacité du système