La Nation Bénin...
Sa folle passion pour l’art inspire sans doute ses performances. Avec toute l’assurance et la pétulance possible sur scène, Carole Lokossou affirme ses talents de comédienne et passe pour une femme épanouie dans son univers.
De la désenchantée à la femme battante, Carole Lokossou porte si bien ses rôles. Epanouie qu’elle est sur les planches, elle réclame à travers ses personnages son droit d’assouvir sa passion pour le théâtre. Et les ovations à chaque représentation la galvanisent dans son ambition d’aller loin dans ce métier que nombre de ses pairs désertent du fait de ces pesanteurs sociales qui inhibent tout élan de liberté chez la femme. Excepté les jeunes filles ou célibataires qui y évoluent, l’univers du théâtre s’appauvrit en ressources humaines féminines de qualité. Dans une société qui éprouve encore sa capacité à accepter la femme dans le domaine de l’art, Carole Lokossou, elle, doit une fière chandelle au soutien de son mari, lui-même professionnel de la scène. Présente dans le théâtre depuis près d’une vingtaine d’années, la comédienne exerce pleinement sa passion, loin des pressions sociales. Un privilège dont elle se flatte. «Au Bénin, on pense que les métiers qui sont bons pour la femme sont ceux qui lui permettent d’aller et sortir du travail aux heures normales de service. Autrement elles sont taxées de prostituées», confie-t-elle, amère. Outre ces clichés, il lui a fallu, à l’instar de ses rares congénères encore en activité, se battre contre l’incertitude et l’instabilité caractérisant par ailleurs, le secteur des arts et qui n’encouragent guère la pratique.
Carole Lokossou fait aussi partie de cette race des résistantes qui, à travers leur passion et leur engagement, s’accrochent allégrement à la scène.
Ecumant les scènes, la comédienne s’est forgée une réputation qui ne laisse personne indifférente. Et ses pairs semblent avoir une haute image d’elle. «Elle est une grande professionnelle du théâtre et ses qualités sur scène l’attestent. Ayant fait l'Ensemble artistique et culturel des étudiants (EACE) où elle a fourbi ses armes, elle dispose de beaucoup d’atouts qui font d’elle une comédienne complète. Sa maîtrise également de l’anglais, constitue un atout supplémentaire qui l’impose dans d’autres univers outre que francophone», relève Brice Bonou, metteur en scène.
Une boulimie de la formation
Surfant sur nombre de créations aussi bien dans le théâtre qu’au cinéma, l’artiste reste un exemple dans son domaine de prédilection. Une stature qu’elle doit à sa conviction de s’imposer dans ce métier à la fois passionnant et contraignant, puis à son désir ardent d’apprendre.
D’ailleurs, sa dévotion pour le métier de comédienne n’a nullement porté un coup à ses études. Ses diplômes en Sociologie et Anglais obtenus, elle s’est trouvé un bon prétexte pour s’accomplir dans le théâtre. Un parcours qui n’est non plus étranger à ses succès sur scène.
Sourire toujours aux lèvres, parfaite diction, Carole Lokossou se dévoue corps et âme au théâtre, épousant ses principes les plus élémentaires. Ceux-là même qui professionnalisent l’artiste et la distinguent des autres.
«Le métier d’acteur demande une capacité d’adaptation. Quand vous n’avez pas fait une école, il faut apprendre. L’acteur ou l’actrice qui fait du théâtre ou du cinéma son métier, doit apprendre à s’adapter à toutes les situations», affirme-t-elle. L’artiste devant vivre avec son personnage, à son entendement. «Il faut arriver à incarner le personnage tout en étant soi-même. Et pour y arriver, il faut une bonne dose d’humilité et une perpétuelle remise en question», explique-t-elle.
Si elle est arrivée au théâtre par passion, elle s’est attelée à apprendre le métier pour espérer s’imposer, estimant que «l’art n’est pas le dépotoir de ceux qui n’ont pas réussi ailleurs». A ses yeux, l’alternative pour s’en sortir reste la formation. «Il n’y a pas de métier sans formation. C’est la formation et encore la formation», poursuit-elle. Aussi, se rend-elle souvent disponible dès que l’opportunité d’une formation se présente dans son domaine. Balayant du revers de main toute magie ou miracle dans l’univers théâtral.
Point d'honneur à la tâche
«Les métiers de l’art sont comparables aux mathématiques. Il n’y a rien que vous puissiez inventer. Le théâtre, le cinéma c’est la reproduction des choses de la vie mais avec cette magie qu’apporte le comédien. Il est comme un cavalier qui a la bride d’un cheval en main. Le travail d’acteur, le jeu d’acteur est aussi difficile que les autres corps de métier», note-t-elle.
A ceci s’ajoute le travail. Convaincue que pour réussir, le talent seul ne suffit pas, Carole Lokossou met un point d’honneur à la tâche : «Pour réussir dans le domaine de l’art il faut 99% de travail et 1% de talent. La réussite, ce n’est que par la force du travail». Ainsi au quotidien, se donne-t-elle assez pour s’adapter aux personnages qu’elle incarne sur les planches. Autant dans le corps que dans l’esprit, la comédienne s’adapte à tous les rôles.
«Je me sens à l’aise dans tous les rôles et c’est l’avantage qu’offre la formation». Avec une préférence certes pour des rôles proches de la femme mais bien aux antipodes de ceux assimilables à son profil.
Alerte dans sa dégaine et dans ses répliques, Carole Lokossou, pour Osséni Soubérou de la Ligue africaine des professionnels du Théâtre (Lapro-Théâtre), est l’une des meilleures comédiennes béninoises et les formations qu’elle a reçues, ajoutées à ses nombreuses expériences sur scène en font une grande professionnelle dans son domaine.
Irrésistiblement, elle arpente la voie de la progression en bonifiant son jeu d’acteur à travers les personnages qu’elle incarne sur scène.