La Nation Bénin...
Le Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud), en partenariat avec les gouvernements du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, du Ghana et du Togo, organise à Cotonou, les 18 et 19 septembre, un Dialogue régional consacré aux architectures de paix. Cette rencontre de haut niveau qui intervient dans un contexte marqué par la montée des menaces transnationales dans le Golfe de Guinée vise à consolider les efforts de coopération régionale et à promouvoir des réponses collectives et intégrées pour prévenir les conflits et renforcer la stabilité, conditions essentielles de développement.
Selon l’Indice mondial du terrorisme 2025, la région du Sahel a enregistré 51 % des décès dus au terrorisme en 2024, soit le double des chiffres énoncés par le rapport 2019. Avec plus de 4,3 millions de personnes déplacées de force dans cette région, les tensions socio-économiques se sont intensifiées, exacerbées par la pauvreté, le chômage des jeunes et les inégalités. La région du Golfe de Guinée est donc confrontée à une instabilité croissante, exacerbée par l’expansion des groupes extrémistes depuis le Sahel, la prolifération des marchés illicites, les déplacements forcés et les effets du changement climatique, font observer les organisateurs du Dialogue régional consacré aux architectures de paix.
A Cotonou, les 18 et 19 septembre, environ 70 acteurs clés, incluant des responsables gouvernementaux, des experts régionaux, des organisations de la société civile notamment des représentants des milieux académiques et de think tanks, des groupes de femmes et de jeunes, des leaders communautaires et religieux et des partenaires techniques et financiers prennent part à cette rencontre. Initiative stratégique visant à renforcer les réponses régionales aux défis croissants liés à l’extrémisme violent, à la criminalité transnationale organisée, à la piraterie maritime et aux trafics illicites.
Gouvernance et sécurité, clés de l’atteinte des Odd
À l’ouverture des travaux, Aminatou Sar, coordonnatrice résidente des Nations Unies, a mis en garde contre l’extension de la crise sahélienne vers le Golfe de Guinée. Elle a rappelé que la multiplication des trafics, de la piraterie maritime et des conflits intercommunautaires menace la stabilité de la sous-région et, par ricochet, la sécurité humaine. Face à ces défis, elle a souligné la nécessité d’une gouvernance politique forte et d’une réponse collective et coordonnée entre États. Le Pnud et le Système des Nations Unies entendent accompagner la mise en œuvre des recommandations issues de cette rencontre, condition essentielle pour garantir un environnement de paix et atteindre les Objectifs de développement durable (Odd), a-t-elle aussi assuré.
Aminatou Sar a surtout rappelé que la communauté internationale, depuis 2015, a changé de paradigme en adoptant les Objectifs de développement durable (Odd), pierre angulaire des interventions du Système des Nations Unies. Mais « il sera difficile d’atteindre ces Odd dans un environnement où la gouvernance politique est défaillante, s’il n’y a pas la quiétude, s’il n’y a pas la sécurité », prévient-elle. Selon elle, la sous-région ouest-africaine fait face à un défi majeur qu’est l’exportation de la crise sahélienne vers les pays du Golfe de Guinée. Groupes extrémistes, marchés illicites, circulation des armes, piraterie maritime et conflits intercommunautaires se multiplient et transforment cette zone en un nouvel épicentre d’instabilité. « Si la stabilité de la sous-région est menacée, de facto, la sécurité humaine l’est aussi », a-t-elle insisté.
Décrypter les défis
Raison d’être de ce dialogue qui ambitionne de réfléchir au renforcement de la gouvernance et à la consolidation de la paix par des stratégies régionales coordonnées. « La lutte contre l’insécurité exige des efforts harmonisés entre les États. Parallèlement, il faut intégrer les dimensions économiques et sociales en luttant contre l’exclusion, la précarité et la pauvreté », a-t-elle précisé. Au regard du parterre d’acteurs réunis à Cotonou, gouvernements, Cedeao, organisations de la société civile, leaders communautaires et religieux, associations de femmes et de jeunes, chercheurs et experts, elle reste confiante et optimiste quant à l’issue de ce Dialogue.
Les travaux de Cotonou s’ouvrent par une conférence inaugurale sur l’état de l’architecture de la paix dans la région. Occasion pour présenter les principales conclusions d’une étude d’évaluation conduite aux niveaux national et régional, offrant ainsi une base analytique solide pour guider les échanges. Suivra un panel de haut niveau entre responsables politiques, experts et partenaires internationaux pour discuter des facteurs de conflits et d’instabilité dans la région et de la nécessité de bâtir des architectures de paix robustes. Autre temps fort, la voix des acteurs locaux. Dirigeants communautaires, femmes et jeunes partageront leurs expériences et leurs défis dans la consolidation de la paix, rappelant que la sécurité durable s’enracine dans l’inclusion et la participation citoyenne.
Les thématiques retenues à l’occasion renseignent à suffisance sur les ambitions de ce dialogue pour lequel, des délégations sont venues du Burkina Faso, du Ghana, de la Cote d’ivoire et du Togo. Renforcement des capacités institutionnelles en matière de prévention et de résolution des conflits, rôle des femmes et des jeunes dans la consolidation de la paix, solutions communautaires contre l’extrémisme violent, en misant sur la résilience locale, la coopération et les partenariats régionaux entre gouvernements, société civile et acteurs internationaux… Au-delà des débats, l’ambition de ce dialogue est de rendre disponible une feuille de route régionale définissant les priorités de consolidation de la paix dans le Golfe de Guinée. La question du financement et de la durabilité de cette architecture régionale sera également au cœur des discussions, avec un appel à mobiliser les partenaires de développement, le secteur privé et les institutions régionales.
Plaidoyer pour une coordination régionale
En réunissant décideurs politiques, acteurs communautaires et partenaires internationaux, il se présente comme une étape clé pour transformer les aspirations en actions concrètes. Pour le Bénin, pays hôte, c’est aussi l’occasion de réaffirmer son engagement en faveur de la paix et de la coopération régionale.
Le timing de cette rencontre est bien trouvé, appréciera le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique. En plus de dresser un état des lieux préoccupant de la situation sécuritaire en Afrique de l’Ouest, il crédite le dialogue de Cotonou de voir le jour à un moment où le continent est confronté à des défis sécuritaires d’une nouvelle dimension, notamment l’extrémisme violent et le terrorisme. Selon lui, les « entrepreneurs de violence » s’attaquent aux Forces de défense et de sécurité ainsi qu’aux symboles de l’État notamment les garnisons, commissariats, postes douaniers, centres de santé, écoles. « Ils sèment la terreur et la désolation parmi nos populations et exploitent les conflits communautaires et autres fragilités pour s’incruster dans nos localités, diffuser leur idéologie radicale et recruter les jeunes », a-t-il déploré. Face à cette menace, il a tenu à rappeler que des moyens conséquents sont investis dans la défense, la sécurité et le renseignement, avec l’appui de partenaires techniques et financiers.
Pour le Bénin en particulier, il a souligné que le gouvernement, résolument engagé contre ces groupes terroristes, dote les forces de moyens humains, matériels et stratégiques, tout en mettant en place une stratégie nationale de prévention de l’extrémisme et un cadre référentiel unique de sécurité et de développement. Mais malgré ces efforts, le ministre note « l’absence de synergie et de coordination de nos interventions ». Il va donc plaider pour « un cadre régional cohérent de consolidation de la paix ». D’où l’importance de ce Dialogue régional, perçu comme une « opportunité de discuter des moyens de renforcer les architectures locales, nationales et régionales » pour faire émerger une réponse collective aux menaces transnationales.
Les interventions du représentant résident du Pnud, Titus Osundina et des chefs des délégations étrangères épousent cette philosophie du représentant du gouvernement. Le rôle des Nations Unies dans l’accompagnement des États à renforcer les capacités nationales et régionales de prévention des conflits, la consolidation de la paix au-delà des limites des interventions militaires, les initiatives sociales et économiques visant à réduire la vulnérabilité des populations, la nécessité de renforcer les architectures de paix existantes et d’impliquer pleinement les acteurs locaux… constituent autant de solutions ébauchées par les représentants du Burkina-Faso, de la Côte d’Ivoire, du Ghana et du Togo.