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Financement du développement en Afrique de l’Ouest: La politique fiscale en débat à Cotonou

Economie
Des représentants d’administrations fiscales, de la société civile et d’organisations internationales  échangent sur l’élargissement de l’assiette fiscale Des représentants d’administrations fiscales, de la société civile et d’organisations internationales échangent sur l’élargissement de l’assiette fiscale

L’assiette fiscale en Afrique de l’Ouest est au cœur d’un atelier régional qui s’est ouvert, ce lundi 23 juin à Cotonou. Organisé par le Forum sur l’administration fiscale africaine (Ataf), l’atelier vise à aider les pays d’Afrique de l’Ouest à repenser leurs politiques fiscales autour de la transparence, de l’équité et de l’efficacité.

 

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 24 juin 2025 à 08h13 Durée 3 min.
#Développement #Afrique de l’Ouest

Responsables d’administrations fiscales, décideurs politiques, chercheurs, experts internationaux, représentants d’organisations régionales et de la société civile se retrouvent du 23 au 25 juin pour aborder des questions liées à l’élargissement de l’assiette fiscale en Afrique de l’Ouest. Organisé par le Forum sur l’administration fiscale africaine (Ataf), cet atelier régional intervient dans un contexte où les pays africains font face à une double exigence qui est de répondre aux besoins croissants de financement du développement tout en réduisant leur dépendance aux financements extérieurs.

« L'élargissement de l'assiette fiscale n'est pas seulement une question technique. C’est une stratégie essentielle pour bâtir des économies solides et équitables », a affirmé Bénito Lagroire Gbossame, directeur général adjoint des Impôts. A l’en croire, lorsque plus d’acteurs économiques sont fiscalisés, le fardeau est mieux réparti et l’adhésion à l’impôt s’en trouve renforcée. Malgré les efforts engagés, la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest peinent à élargir leur base d’imposition. L’économie informelle, souvent majoritaire dans le tissu économique, échappe en grande partie à l’impôt. Parallèlement, les niches d’exonérations fiscales accordées aux entreprises pour stimuler l’investissement amputent les budgets publics, sans toujours produire les effets escomptés.

L’autre difficulté évoquée est la taxation des personnes fortunées, souvent peu ou mal encadrée. L’identification des « High-Net-Worth Individuals » (HNWIs), leur assujettissement à l’impôt, ainsi que la surveillance de leurs transactions nécessitent des outils modernes et une volonté politique affirmée. « Nos pays partagent des défis similaires : faibles capacités administratives, opacité dans certaines pratiques fiscales, faible culture citoyenne autour de l’impôt», a reconnu Mary Baine, secrétaire exécutive de l’Ataf. Elle estime que l’élargissement de l’assiette doit aller de pair avec la transparence, la simplification des procédures et l’équité fiscale. « Nous sommes là pour écouter, pour apprendre et pour accompagner. Ce que nous construirons ensemble cette semaine devra poser les bases d’une fiscalité africaine adaptée, efficace et souveraine », a-t-elle souligné.

Au cœur des échanges

Les travaux de l’atelier s’articulent autour de trois thématiques clés. Il s’agit, en premier lieu, des incitations et dépenses fiscales dans l’espace Uemoa avec leur efficacité, leur coût pour les finances publiques et les pistes pour mieux les encadrer. Les participants discuteront également de la fiscalité du secteur informel, avec des échanges sur des expériences réussies de formalisation progressive à travers des mécanismes simplifiés.

Et enfin, la taxation des personnes fortunées, avec la présentation d’une étude de l’Ataf sur les bonnes pratiques à adopter pour réduire l’évasion fiscale. Ces discussions doivent aboutir à des recommandations concrètes, capables d’alimenter les réformes nationales en cours dans plusieurs pays de la sous-région. Kwessi Obeng, représentant de Oxfam International, partenaire de l’événement, y voit une opportunité cruciale. « L’Afrique doit désormais compter sur ses ressources internes. Pour cela, il faut que chacun contribue selon ses moyens. Nous plaidons pour une fiscalité plus juste, notamment envers les grandes fortunes. Ce combat est essentiel pour réduire les inégalités », insiste-t-il. Selon Oxfam, l’Afrique a besoin d’environ 1,3 million d’euros par an sur les cinq prochaines années pour atteindre les Objectifs de développement durable. Une ambition qui ne pourra être financée qu’à travers une mobilisation accrue des recettes fiscales. Au-delà des échanges techniques, l’atelier veut créer un espace de dialogue entre les administrations fiscales, les décideurs politiques, les chercheurs, les partenaires au développement et les représentants du secteur privé et de la société civile. L’objectif est d’aboutir à des recommandations concrètes pour une fiscalité plus efficace, inclusive et soutenable dans la région.