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Les écarts de taux observés sur les Obligations assimilables du Trésor (Oat) à trois ans au sein de l’Uemoa ont connu des évolutions contrastées entre 2022 et 2024. Cette tendance met en évidence des conditions de financement différenciées entre les États membres, dans un contexte marqué par la hausse des taux directeurs et les ajustements budgétaires engagés dans plusieurs pays.
L’analyse des écarts de taux ou spreads des Obligations assimilables du Trésor (Oat) à trois ans dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) révèle une évolution marquée par une progression notable entre 2022 et 2024. Cette maturité, retenue comme référence dans une étude de l’institution régionale, représente environ 27 % des émissions obligataires sur la période. Les écarts de taux ont été calculés à partir des Oat de la Côte d’Ivoire, considérée comme pays de référence du fait de sa notation favorable par les agences internationales et de son poids économique au sein de l’Union. Cette approche a permis de mesurer la prime de risque demandée par les investisseurs pour chaque État membre. Toutefois, ces comparaisons n’ont pu être effectuées que lorsque deux émissions, celle de la Côte d’Ivoire et celle du pays concerné ont eu lieu simultanément, afin de garantir la cohérence des données. L’année 2022 s’est distinguée par une relative stabilité, voire une légère baisse des spreads, soutenue par une politique monétaire encore accommodante et une bonne confiance du marché. À partir de 2023, un changement de tendance s’est amorcé. Sous l’effet du resserrement monétaire mondial, des pressions inflationnistes et de la hausse des besoins de financement public, les écarts se sont progressivement accrus. En décembre 2024, l’écart moyen a atteint 349 points de base (pdb). Les plus fortes hausses ont été observées pour la Guinée-Bissau (349 pdb), le Burkina Faso (259 pdb), le Niger (252 pdb) et, dans une moindre mesure, le Mali (89 pdb). Ces niveaux reflètent des réalités économiques et budgétaires variées selon les pays, ainsi que la perception de risque par les investisseurs. La Côte d’Ivoire et le Sénégal en revanche, ont maintenu leur stabilité, confirmant leur solidité sur le marché régional.
Comparaison
Pour situer ces évolutions, l’étude a également analysé les spreads observés dans la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), où les obligations de référence à trois ans sont celles du Cameroun. Jusqu’en 2022, les écarts y étaient nettement plus élevés qu’en Uemoa, atteignant parfois 800 pdb, traduisant une perception de risque plus forte. Cependant, entre 2023 et 2024, une amélioration de la situation budgétaire au Tchad et en République centrafricaine, conjuguée à une légère évolution du taux de référence camerounais, a contribué à une réduction significative des écarts. À fin 2024, les spreads en Cemac se situent entre –34 pdb et 203 pdb, contre une fourchette de –78 pdb à 349 pdb dans l’espace Uemoa. Cette convergence traduit un réajustement progressif des conditions de financement entre les deux unions monétaires africaines.
L’étude élargit enfin la comparaison à la zone euro, en prenant pour référence le taux à trois ans de la courbe de taux zéro coupon. L’Allemagne, notée triple A par les grandes agences, sert de pays de référence. En 2022, les écarts entre pays européens restaient globalement modérés, à l’exception de la Grèce, où le spread a culminé à 309 pdb, en lien avec une dégradation temporaire de sa notation souveraine. Comparativement, les niveaux moyens observés en Uemoa restent proches de ceux enregistrés dans la zone euro, bien qu’ils traduisent une dispersion plus marquée entre les pays. Cette évolution met en évidence des conditions financières propres à chaque économie, influencées par la politique budgétaire, la gestion de la dette et la perception du risque. Dans ce contexte, des pays comme la Côte d’Ivoire et le Sénégal se distinguent par la solidité de leurs fondamentaux économiques et la crédibilité de leur gouvernance financière, des atouts qui continuent d’attirer la confiance des investisseurs. Dans un contexte de resserrement monétaire mondial et de dépendance accrue aux marchés régionaux, la consolidation des fondamentaux économiques, la transparence budgétaire et la régularité des émissions apparaissent comme des leviers essentiels pour renforcer la confiance des investisseurs et stabiliser les coûts d’emprunt au sein de l’Union.
UEMOA