Faouzi Maamouri, expert à l’Uicn : « Si l’on déboise tout, on ne gagne rien »
Environnement
Par
Fulbert Adjimehossou, le 29 mars 2022
à
11h52
Une sylviculture qui protège la nature. C’est bien possible, selon Faouzi Maamouri, coordinateur du Programme régional pour l'Afrique centrale et occidentale (Paco) de l’Union internationale pour la conservation de la nature (Uicn).
La Nation : Pourquoi concilier sylviculture et biodiversité ?
Faouzi Maamouri : D’abord, on ne peut pas arrêter le développement économique. La sylviculture est source de richesse. Mais il faut s’interroger sur sa durabilité. Si l’on exploite à fond les ressources forestières, on va perdre la biodiversité. Toute gestion forestière, qui ne s’intègre pas dans une démarche de développement durable, peut engendrer des dégradations. Si nous avons une monoculture d’espèce forestière, il y aura seulement quelques espèces de biodiversité, de la faune et de la flore, qui seront attachées à ce micro système. C’est parfois pauvre. Mais quand il y aura une sylviculture très diversifiée, avec beaucoup d’espèces, ça va ramener beaucoup de plantes, d’oiseaux, d’animaux et la diversité.
Comment parvenir alors à une sylviculture adéquate ?
Il faut la diversification des espèces pour être économiquement rentable, tout en protégeant la biodiversité. L’autre approche est de faire une sylviculture alternée. On peut avoir une zone de forêt plantée, une zone de forêt naturelle et une zone de forêt pour la sylviculture. La zone naturelle pourra être source de refuge pour les espèces. Si l’on déboise tout, on ne gagne rien. Mais si l’on garde une zone de forêt naturelle, la biodiversité pourra survivre. Avec une espèce monotone à but économique, après quelques années, on sera face à des dégradations, malgré les reboisements. Il faut un partenariat gagnant-gagnant, pour l’économie, la biodiversité et la population. L’idée aussi, c’est d’avoir une économie durable qui va permettre à tous les acteurs d’en profiter pour les générations futures.
Que faire pour changer les mentalités ?
Il faut promouvoir le dialogue entre les différents acteurs, pour avoir des plans de développement économique où l’on intègre tous ces aspects. Ce sera avec la participation de tout le monde qu’il faut développer les outils de conservation. On joue le rôle de facilitateur au niveau de l’Uicn. Imaginez une exploitation monoculture, sensible aux incendies. Si l’on le fait entourer par des forêts naturelles, ça baisse le risque d’incendie. C’est pourquoi, dans des régions, quand on fait la sylviculture, on fait attention à la restauration des périphéries, en vue de disposer de microclimat protecteur.