La Nation Bénin...
Après 10 jours de tractations diplomatiques à Genève, les
185 pays réunis au Palais des Nations n’ont pas réussi à s’entendre sur un
texte contraignant pour enrayer la pollution plastique, l’un des fléaux
environnementaux les plus pressants. Ce nouvel échec fait écho à celui de la
précédente session, en décembre 2024 à Busan, en Corée du Sud. L’objectif
affiché était de parvenir à un consensus mondial pour limiter la production de
plastique et encadrer l’ensemble de son cycle de vie, de sa fabrication à son
recyclage, en passant par son utilisation et la gestion des déchets.
Genève s’est réveillée, vendredi 15 août, avec un goût
amer. Au petit matin, sous les plafonds sobres de la Salle des Assemblées
fraîchement rénovée des Nations unies, l’annonce est tombée comme un couperet:
« Nous n’aurons pas de traité sur la pollution plastique ici à Genève», a
déclaré le représentant norvégien, coprésident d’un groupe de pays dits de «
haute ambition ». En dix jours de débats, de compromis éphémères et de nuits
blanches, les délégations n’ont pas réussi à trouver un terrain d’entente.
Le président des négociations, l’ambassadeur équatorien
Luis Vayas Valdivieso, avait tenté l’impossible : présenter en 24 heures deux
nouvelles versions d’un compromis, la dernière ayant circulé entre minuit et
l’aube du 15 août. Mais à l’heure des ultimes discussions, malgré une
formulation adoucie et jugée « acceptable » par certains, le texte n’a pas fait
consensus. L’Arabie saoudite, l’Inde et l’Uruguay ont publiquement exprimé leur
opposition.
À la déception s’est ajoutée l’amertume : plusieurs pays
ont exigé que les projets non adoptés ne soient même pas conservés pour la
prochaine session. L’Union européenne, par la voix de sa commissaire à
l’Environnement Jessika Roswal, a estimé que le travail accompli constituait «
une bonne base » pour reprendre les négociations.
La fracture est connue : d’un côté, les « ambitieux » à
savoir: l’Union européenne, le Canada, l’Australie, de nombreux États
d’Amérique latine, d’Afrique et des îles, qui exigent une réduction mondiale de
la production de plastique et un contrôle strict des substances dangereuses.
De l’autre, un bloc de pays pétroliers refusant toute contrainte sur la production d’hydrocarbures et toute interdiction d’additifs jugés nocifs. Pour eux, le traité ne doit pas couvrir « l’ensemble du cycle de vie » du plastique, de l’extraction pétrolière jusqu’au déchet final. La Chine, premier producteur mondial, a joué profil bas.
Enjeu colossal
Depuis l’an 2000, l’humanité a produit plus de plastique
que durant les 50 années précédentes. Selon l’Ocde, si rien ne change, la
production annuelle (450 millions de tonnes) pourrait tripler d’ici 2060. Moins
de 10 % seulement est recyclé.
Les Ong ont rapidement rejeté le projet de texte, le
qualifiant de « mauvais traité » ou de simple « traité de gestion des déchets
». La ministre française de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher,
a dénoncé « une poignée de pays, guidés par des intérêts financiers de court
terme » qui auraient fait obstruction à un accord ambitieux.
La Suisse, qui espérait voir naître un «Accord de Genève»
et accueillir le secrétariat du futur traité, a elle aussi exprimé sa «
déception ». Son chef négociateur, Felix Wertli, a demandé une « pause » pour
réfléchir à la suite après trois ans de discussions infructueuses.
L’issue des pourparlers laisse planer une question :
faut-il continuer dans le cadre onusien ou lancer un accord parallèle ? L’Union
européenne n’écarte pas l’idée d’une nouvelle session, mais prévient qu’il
faudra « faire mieux ». Pour Greenpeace, c’est une « alarme pour le monde». Car
la pollution plastique, invisible mais omniprésente, ne connaît ni frontières,
ni délais.
Catherine
Fiankan-Bokonga
Les 185 pays réunis depuis dix jours à Genève ne sont pas parvenus à un accord sur la façon de lutter contre la pollution plastique