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Protection des requins et des raies: L’Afrique pour l’inscription de ces mammifères à la Cites 2025

Environnement
Le continent dit non au commerce international des requins et raies Le continent dit non au commerce international des requins et raies

Réunis à Cotonou, la semaine dernière, plusieurs pays africains ont décidé d’inscrire les requins et les raies à la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites) 2025, afin de protéger ces mammifères. Une position unique solide qu’ils entendent défendre lors de la prochaine réunion de la Conférence des parties (Cop) en Azerbaïdjan.

Par   Ariel GBAGUIDI, le 03 sept. 2025 à 11h10 Durée 3 min.
#Protection des requins

L’Afrique ne souhaite plus que les requins et les raies soient commercialisés. Elle opte pour l’interdiction de leur exportation.

Lors de la 20e Conférence des parties (Cop) à la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites) 2025, le Bénin va porter une proposition pour maintenir toutes les espèces de grandes raies-guitare à l'annexe 2, mais en instaurant un quota d'exportation zéro. En renfort, le Sénégal portera une autre proposition pour maintenir les raies rhinidées à l'annexe 2 avec un quota zéro également. Ces deux propositions sont soutenues par le Burundi, le Cameroun, la Côte d'Ivoire, le Gabon, la Gambie, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Libéria, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Nigeria, la République Centrafricaine, la République du Congo, le Sénégal et le Togo.

« Ça veut dire que lorsque ces propositions seront adoptées, les pays ne pourront plus commercialiser à l'international, ces espèces qui ont un statut extrêmement menacé d'extinction et qu'on trouve malheureusement de moins en moins sur les côtes ouest-africaines », explique Manon Dene, coordinatrice régionale Afrique de l'ouest et centrale de l’organisation Species Survival Network.

Les représentants de ces pays africains s’étaient retrouvés à Cotonou, la semaine dernière, pour un atelier pré-Cop20 Cites au terme duquel, ils ont décidé d’inscrire les deux animaux marins à l’annexe 2. Un choix éclairé et futuriste, basé sur une analyse objective des données. La déclaration finale de l’atelier pré-Cop20 met l’accent, entre autres, sur les difficultés rencontrées en matière de conservation des requins et des raies, la nécessité d'appliquer le principe de précaution dans le contexte de la gestion durable de ces espèces. Elle a aussi relevé le fait que les populations de ces espèces sont menacées par la pression de la pêche, principalement motivée par la demande du commerce international de l'aileron et de la chair et d'autres produits liés aux requins et aux raies.

La déclaration commune issue de l’atelier « témoigne et démontre que l'Afrique est capable de faire entendre une voix forte, claire et crédible sur la scène internationale en ce qui concerne les espèces fortement menacées», s’est satisfait Adjakou Adjinda, directeur général des Eaux, Forêts et Chasse, lors de la clôture des travaux. Il rappelle que le continent africain est un réservoir d'une biodiversité exceptionnelle qui contribue à la splendeur de la nature. C'est pourquoi, dit-il, il est un devoir sacré pour chacune et pour chacun de défendre ce patrimoine écologique par une concentration orientée vers la durabilité pour nos peuples.

Pour lui, la réunion de Cotonou ne doit pas être aussi une simple étape préparatoire. Elle doit être un tremplin, un signal fort, une rampe de lancement pour que la Cop20 marque un tournant décisif dans l'histoire de la conservation et de la gouvernance environnementale mondiale. Adjakou Adjinda souhaite que la déclaration porte des fruits durables et inspire des décisions visionnaires pour la planète.

Etat des lieux

Depuis les trente dernières années, la population de ces animaux a fortement diminué. 80 % de ces espèces de grandes raies-guitare et de raies rhinidées ont disparu des eaux ouest-africaines. À l'état mondial, c'est aussi la même situation. Ces animaux sont classés en danger ou en danger critique d'extinction.

« Cela veut dire qu'elles sont difficilement trouvables dans les eaux. Si jamais les propositions du Bénin et du Sénégal venaient à être adoptées à la Cop20 à la fin de l'année, cela voudrait dire qu'à l'international, ces espèces ne pourront plus être exportées », rappelle Manon Dene.

Ces espèces de raies ressemblent aux requins et elles sont pêchées. Leurs ailerons sont coupés, salés, séchés et envoyés à l'export dans des pays asiatiques pour alimenter le commerce des ailerons de requins. « C'est vraiment un marché très important parce que, malheureusement, ces ailerons ont une grande valeur et facilitent la rétention des pêcheurs sur les côtes... Donc, c'est vraiment important de réglementer ce commerce international pour essayer de sauver ces espèces», plaide la spécialiste de Species Survival Network.

A la Cop20, tous les pays africains défendront ces propositions pour assurer leur adoption et montrer un visage uni, une région unie. « Face à la communauté internationale, ce ne sera pas seulement le Bénin qui portera cette proposition, mais les 16 pays de la sous-région ouest-africaine, ainsi que plusieurs pays d'Afrique centrale, ce qui fait que la région est perçue comme une puissance, une puissance internationale. C'est l'objectif », explique Manon Dene.

« On sait que beaucoup de pays asiatiques qui ont un intérêt économique à exploiter les ressources marines, dont ces espèces de grandes raies guitares ou de raies rhinidées, vont s'opposer fortement à ces propositions et tout faire en sorte pour que, d'un point de vue diplomatique, il y ait une pression exercée sur les pays pour que ces propositions soient rejetées lors d'un vote », ajoute-t-elle. La bataille s’annonce rude mais les pays africains peuvent compter sur leurs alliés européens et d’Amérique latine. Malgré les tensions, les pressions diplomatiques de certains pays, principalement asiatiques, le continent pense que ces propositions ont des chances d'être adoptées, en novembre prochain en Azerbaïdjan.