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Multilatéralisme: Affirmation des villes comme nouveaux acteurs, en Suisse

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Les organisations internationales face au multilatéralisme Les organisations internationales face au multilatéralisme

À l’heure où les crises climatiques, sociales et économiques redéfinissent les priorités internationales, les 6 et 7 octobre, Genève (Suisse) accueillera le cinquième « Forum des maires des Nations Unies ». Placée sous le thème « Les villes façonnent l’avenir », la rencontre ambitionne de faire entendre la voix des collectivités locales dans les débats mondiaux traditionnellement dominés par les États. L’exercice témoigne d’un mouvement de fond : le multilatéralisme s’ouvre désormais aux territoires urbains, devenus des lieux d’innovation mais aussi de tension face aux défis planétaires.

Par   Catherine Fiankan-Bokonga, Correspondante accréditée auprès de l’Office des Nations Unies à Genève (Suisse), le 02 oct. 2025 à 08h43 Durée 3 min.
#Multilatéralisme

Si les maires, en première ligne pour répondre aux urgences sanitaires, climatiques ou sociales, réclament depuis plusieurs années une place dans la diplomatie internationale, le Forum de Genève constitue une institutionnalisation de leur rôle.

Créé en 2020 sous l’égide de la Commission économique pour l’Europe des Nations unies (Cee-Onu), le « Forum des maires » vise à renforcer la cohérence entre les niveaux local, régional et global de la gouvernance urbaine. Plus de 160 villes ont déjà participé à ses réunions annuelles, qui favorisent le partage de bonnes pratiques et le dialogue entre municipalités, États membres et organisations internationales.

L’objectif est de donner aux villes une voix forte dans le débat multilatéral. Les discussions porteront en particulier sur trois Objectifs de développement durable (Odd) : l’Odd 3 (santé et bien-être), l’Odd 5 (égalité des genres) et l’Odd 8 (travail décent et croissance économique). Les maires aborderont également des enjeux majeurs pour les territoires urbains à savoir, le financement climatique, les examens locaux volontaires, ainsi que les défis liés au logement abordable et durable.

La voix des territoires urbains

La participation de figures internationales, comme Christina Kitsos, vice-maire de Genève et présidente du Global Cities Hub, Tatiana Molcean, secrétaire exécutive de Cee-Onu, et Anaclaudia Rossbach, directrice exécutive d’Onu-Habitat, illustre l’importance accordée à cette démarche.

L’événement marque également un rééquilibrage dans la gouvernance mondiale : les villes, longtemps considérées comme de simples relais des politiques nationales, deviennent des acteurs capables de peser sur l’agenda international, notamment sur les enjeux climatiques et sociaux.

Le 8 octobre, la question du logement abordable et durable sera au cœur d’une réunion ministérielle organisée dans le cadre de la 86ᵉ session du Comité de l’Unece sur le développement urbain, le logement et l’aménagement du territoire. Dix ans après l’adoption de la Charte de Genève pour un logement durable, les ministres devront proposer des actions concrètes pour répondre à la crise du logement, qui frappe aussi bien les grandes métropoles que les villes moyennes.

Cette articulation entre débats municipaux et décisions nationales souligne l’interdépendance croissante des échelles de gouvernance. « Sans des villes capables de loger dignement leurs habitants, aucun pays ne peut atteindre les objectifs de durabilité », souligne un expert d’Onu-Habitat.

Vers un nouvel équilibre

L’édition 2025 du Forum des maires illustre la maturation d’un multilatéralisme polycentrique, où États et villes doivent cohabiter pour affronter des crises globales qui trouvent souvent leur manifestation la plus aiguë au niveau local.

Cette évolution soulève toutefois des interrogations : comment articuler les initiatives des maires avec les stratégies nationales ? Quelle légitimité accorder aux représentants locaux dans des négociations internationales où prédomine la souveraineté des États ?

En donnant un espace à ces acteurs, le Forum de Genève ne se contente pas d’un échange de bonnes pratiques : il contribue à redessiner la carte du pouvoir dans la gouvernance mondiale, en faisant des villes des protagonistes incontournables de l’agenda onusien pour 2030.

Catherine Fiankan-Bokonga