Comlan Aurélien Attindégla «Il y a des tabous qui font que des gens ne se nourrissent pas bien»
Région
Comlan Aurélien Attindégla
Le Bénin aspire à une alimentation saine et équilibrée au sein des ménages. Le pays est soutenu dans ce cadre par des partenaires à travers le projet Cascade qui depuis lors mobilise différents acteurs pour sa réussite. Dans cet entretien, Comlan Aurélien Attindégla, président de l’Alliance de la société civile pour l’intensification de la nutrition au Bénin, évoque les enjeux liés à l’initiative et fait des suggestions pour un changement de comportement dans les habitudes alimentaires.
Par
Alexis METON A/R Atacora-Donga, le 13 nov. 2023
à
09h45
Durée 3 min.
#Comlan Aurélien Attindégla
#’intensification de la nutrition au Bénin
La Nation : Vous pilotez une campagne sur la nutrition à travers diverses initiatives. Quels sont les enjeux de cette problématique?
Comlan Aurélien Attindégla : Il s’agit de la sensibilisation et de la mobilisation des médias autour de la campagne nationale de plaidoyer pour l’intensification de la nutrition au Bénin (Canpin). Cette campagne a été lancée dans le cadre de la mise en œuvre du projet Cascade, un projet initié conjointement par Care international Bénin-Togo et Gain avec le financement du ministère des Affaires étrangères du Royaume des Pays-Bas. Il vise essentiellement à améliorer les politiques publiques en matière de nutrition de manière que les défis nutritionnels, les problèmes de malnutrition que vit notre pays soient réglés définitivement. En matière de nutrition, la situation de notre pays n’est pas reluisante. Nous sommes un pays côtier, mais par endroits, les indicateurs sont tels qu’on dirait que nous sommes un pays enclavé. Pourtant, ce n’est pas les ressources alimentaires qui manquent, ce n’est pas les potentialités agricoles qui font défaut. Donc, il y a des besoins de changement de comportement vis-à-vis de la façon dont nous mangeons les aliments. Nous avons également quelques normes et tabous qui font que certaines personnes ne se nourrissent pas comme il faut.
Quelles sont les cibles de l’initiative ?
Lorsqu’on prend les cibles de cette campagne, il y a d’abord les jeunes filles en âge de procréer, ensuite les femmes enceintes et enfin les femmes allaitantes. Pourquoi les jeunes filles en âge de procréer ? Aujourd’hui plus qu’avant, on a compris que la nutrition est une question très importante parce que si on ne crée pas les conditions pour une meilleure nutrition déjà avant la naissance de l’enfant, cela met toute sa vie en péril. Et il y a la fenêtre des mille jours, c’est-à-dire dès que la jeune fille ou la femme tombe enceinte, tout au long de la gestation, elle a des besoins nutritionnels précis qui doivent l’aider à faire grandir le fœtus et ses organes dans les meilleures conditions. Si jamais il y a des nutriments qui manquent, cela crée des déficiences au niveau du fœtus et au niveau du futur enfant qui malheureusement ne dispose plus de toutes les capacités pour être un actif utile à son pays. Il y en a qui ne sont pas intelligents. Parce que le développement du cerveau, c’est dans le ventre de la maman que cela se passe en grande partie. Donc, si on rate ce moment-là, l’enfant qui naît devient un problème, un handicapé. Même s’il est bien portant, il n’a pas tous les réflexes qu’il faut et c’est vraiment dommage. Alors, il est important que partout, dans toutes les régions de notre pays, tout le monde comprenne cet enjeu. Il faut que les jeunes filles en âge de procréer soient sensibilisées et que ceux ou celles qui adoptent de mauvais comportements puissent changer. Pour les femmes allaitantes, l’enfant pendant 0 à 5 ans a également des besoins précis qu’il faut satisfaire.
Quels sont les enjeux de cette campagne au profit des citoyens ?
Au cœur de cette campagne, il y a un enjeu majeur, c’est de travailler à ce qu’on augmente l’accès à des aliments de bonne qualité, à des aliments sains à tous les ménages dans les vingt communes d’intervention du projet qui couvre six départements. C’est à cela que nous travaillons. Il y a des aspects qui ne sont pas forcément liés au plaidoyer et qui demandent qu’on interagisse avec certaines structures. C’est le cas par exemple du secrétariat permanent du Conseil de l’alimentation et de la nutrition (Can), des représentants des ministères avec qui on est engagé sur ce projet. Mais le plus gros, c’est comment faire pour que des documents de politiques et des plans de mise en œuvre des projets et programmes qui ont un lien avec la nutrition soient mis en place et que les allocations soient vraiment réservées à des actions spécifiques et sensibles à la nutrition. Nous avons également comme enjeu de veiller à ce qu’au niveau des collectivités locales notamment au niveau des Plans de développement communal, une provision soit prévue pour la nutrition, qu’il s’agisse des actions spécifiques ou sensibles à la nutrition. Voilà un peu ce qu’on fait et tout au long de cette campagne, les médias ont un rôle crucial à jouer. C’est la raison pour laquelle nous avons commencé avec les médias, parce que sans eux, nous ne pouvons pas communiquer suffisamment sur ces différents enjeux et toucher les cibles. Il va s’agir d’informer autrement pour accompagner l’initiative. C’est un enjeu national pour que ce changement de comportement soit observé. Plus les médias changent en leur propre sein, mieux ça vaudra pour les autres parce que tout le temps, ils pourront communiquer sur la nutrition et aider plus facilement les gens à changer de comportement.