A l’occasion des 35 ans de la Conférence nationale des forces de la Nation: Capital social et démocratie en Afrique, le cas du Bénin

I- Stratégies et mécanismes pouvant renforcer la démocratie en Afrique

Il en existe au minimum cinq (05) :

1/Le Renforcement des Institutions démocratiques et de l’État de droit

L’un des piliers fondamentaux de la démocratie est l’existence d’institutions fortes et indépendantes. Pour assurer un système démocratique solide en Afrique, plusieurs réformes sont nécessaires :

• Indépendance de la justice : Un pouvoir judiciaire autonome permet de lutter contre l’impunité et de garantir le respect des lois. Il est essentiel de protéger les juges de toute pression politique et de leur assurer des ressources suffisantes pour accomplir leur mission.

• Réduction du pouvoir présidentiel: La limitation stricte des mandats présidentiels (à deux maximum) et la séparation effective des pouvoirs sont cruciales pour éviter la monopolisation du pouvoir par une seule personne ou un groupe restreint.

• Renforcement des parlements: Une assemblée nationale active et représentative peut jouer un rôle clé dans le contrôle de l’exécutif et la législation en faveur des citoyens.

• Décentralisation : Accorder plus d’autonomie aux collectivités locales permet de rapprocher la gestion publique des citoyens et de mieux répondre à leurs besoins.

2/ La Promotion d’une éducation civique et Démocratique

Une démocratie solide repose sur des citoyens informés et engagés. Il est donc essentiel de :

• Inclure l’éducation civique dans les programmes scolaires : Les jeunes doivent apprendre dès le plus jeune âge les principes démocratiques, les droits de l’homme et l’importance du vote.

• Multiplier les campagnes de sensibilisation : Les médias et la société civile doivent organiser des formations et des débats pour permettre aux citoyens de mieux comprendre leurs droits et devoirs.

• Encourager la participation des jeunes et des femmes: Une démocratie inclusive doit offrir des opportunités aux jeunes et aux femmes afin qu’ils participent activement à la vie politique et sociale.

3/ Le Développement économique et la lutte contre les inégalités

La pauvreté et les inégalités constituent un frein majeur à la démocratie, car elles favorisent la corruption, l’achat des votes et la manipulation des populations vulnérables. Pour y remédier :

• Créer des emplois et des opportunités économiques : Une population économiquement stable est plus à même d’exercer son droit de vote de manière libre et réfléchie.

• Renforcer la transparence économique : La lutte contre la corruption passe par des institutions indépendantes chargées de contrôler l’utilisation des fonds publics.

• Réduire les écarts entre les régions : Assurer un développement équilibré entre les zones rurales et urbaines permet de limiter les frustrations sociales qui peuvent mener à des révoltes ou à des conflits.

4/ L’Engagement de la société civile et des médias Indépendants

Les citoyens et les organisations non gouvernementales (Ong) jouent un rôle clé dans la consolidation de la démocratie. Il est nécessaire de :

• Garantir la liberté de la presse: Un journalisme indépendant et critique est essentiel pour informer la population et dénoncer les abus du pouvoir.

• Protéger les défenseurs des droits humains : Les militants qui luttent pour la démocratie doivent être protégés des persécutions et des arrestations arbitraires.

• Encourager l’utilisation des réseaux sociaux : Les nouvelles technologies permettent aux citoyens d’exprimer leurs opinions et de surveiller les actions du gouvernement.

5/ L’encouragement d’une démocratie adaptée aux réalités africaines

La démocratie ne peut pas être un modèle unique importé d’Occident. Il est essentiel d’adapter les institutions aux réalités culturelles et historiques africaines :

• Valoriser les traditions de gouvernance locale : Certains systèmes de gestion traditionnelle, comme les conseils des sages, peuvent être intégrés aux institutions modernes pour favoriser une démocratie participative.

• Mettre en place des mécanismes de dialogue inclusifs : Impliquer toutes les composantes de la société (chefs traditionnels, leaders religieux, jeunes, femmes, minorités) dans les prises de décisions peut renforcer la légitimité du système démocratique.

II- Pistes pour la construction du capital social au Bénin

Le lien entre le capital social et la démocratie est un sujet de recherche essentiel en sciences politiques. Le capital social, qui renvoie aux réseaux, normes et trust qui facilitent la coopération au sein d’un groupe, joue un rôle crucial dans la consolidation des systèmes démocratiques. Le cas du Bénin offre un éclairage intéressant sur cette dynamique en raison de son histoire politique, de ses structures sociales et de ses récentes évolutions démocratiques.

1/ Contexte historique et politique du Bénin

Le Bénin, ancienne colonie française, a connu un parcours tumultueux avant d’adopter un régime démocratique au début des années 1990, avec la conférence nationale de 1990 marquant un tournant décisif. Cette transition vers la démocratie a été initialement marquée par une forte mobilisation populaire et un engagement civique élevé, témoignant d’un capital social relativement fort.

2/ Définition du Capital social

Le capital social se définit généralement comme l’ensemble des relations entre les individus dans une société et les valeurs qui en découlent. Il se divise en trois dimensions :

- Liens familiaux et communautaires : Relations de confiance établies au sein des familles et des communautés.

- Liens associatifs : Engagement dans des organisations civiques, politiques ou religieuses.

- Liens institutionnels : Interaction avec les institutions gouvernementales et le respect des règles démocratiques.

3/ Le Rôle du Capital social dans la démocratie béninoise

Le capital social au Bénin a joué un rôle essentiel dans le processus démocratique et son maintien. Plusieurs dimensions peuvent être examinées :

- Participation citoyenne : Les réseaux communautaires et associatifs ont favorisé une participation large au processus électoral. Cela a permis aux citoyens de s’organiser, de débattre et de mobiliser des électeurs lors des élections.

- Confiance et cohésion sociale : La confiance entre les citoyens et les institutions, ainsi qu’entre les citoyens eux-mêmes, est cruciale pour la stabilité démocratique. Les crises politiques, comme celles observées lors des élections récentes, ont mis à l’épreuve cette confiance et, par conséquent, le capital social.

4/ Les défis du capital social au Bénin

Malgré les acquis, le Bénin fait face à plusieurs défis qui affectent le capital social et, par conséquent, la démocratie :

- Fragmentation politique : L’essor des partis politiques et des intérêts partisans a parfois conduit à la polarisation. Les relations de confiance peuvent s’éroder lorsque les citoyen·nes se divisent selon des lignes partisanes.

- Érosion de la confiance: Des allégations de fraudes électorales, de répression des opposants politiques et de restriction des libertés civiles ont altéré la confiance du public dans les institutions.

- Inégalités sociales : Les inégalités économiques et sociales peuvent également nuire à la création d’un capital social fort, car elles limitent l’engagement de certains groupes dans le processus démocratique.

5/ Perspectives d’amélioration

Pour renforcer le capital social et promouvoir la démocratie au Bénin, plusieurs actions peuvent être envisagées :

- Renforcement des Institutions: Accroître la transparence et la responsabilité des institutions publiques peut restaurer la confiance des citoyens.

- Promotion de l’engagement civique : Encourager une culture d’engagement civique à travers l’éducation, des programmes communautaires et des campagnes de sensibilisation.

- Dialogue Intercommunautaire: Favoriser le dialogue entre différents groupes ethniques et sociaux pour renforcer la cohésion sociale et réduire les tensions.

Somme toute, le capital social est une composante essentielle de la démocratie au Bénin. Sa promotion et son renforcement sont cruciaux pour surmonter les défis politiques et garantir une démocratie durable. Il est impératif de continuer à encourager l’engagement civique, le dialogue et la confiance entre les institutions et les citoyens pour construire un avenir stable et prospère.