La Nation Bénin...
La
proposition du président Donald Trump visant à reconstruire la Bande de Gaza en
la transformant en une "Riviera du Moyen-Orient" soulève des questions
complexes au regard du principe d'autodétermination des peuples.
Le
principe de l'autodétermination a évolué d'une idée philosophique à une norme
du droit international, notamment dans le contexte de la décolonisation. Toutefois,
son application reste source de tensions, notamment lorsque
l'autodétermination entre en conflit
avec la souveraineté étatique.
L'idée
d'autodétermination trouve ses racines dans les Lumières et la philosophie
politique moderne :
-
Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) développe la notion de souveraineté populaire
dans Le Contrat social(1762), affirmant que le pouvoir légitime doit émaner du
peuple.
-
La Révolution française (1789) promeut cette idée avec le droit des peuples à
disposer d'eux-mêmes, bien qu'elle soit appliquée de manière contradictoire à
travers l'expansion napoléonienne.
Au
XIXe siècle, le principe est invoqué dans les mouvements nationaux européens
(Italie, Allemagne, Pologne, Grèce) qui luttent pour leur indépendance face aux
empires multinationaux (Austro-Hongrois, Ottoman, Russe).
Le
président américain Woodrow Wilson, dans ses Quatorze Points (1918), défend le
droit des peuples à l'autodétermination après la Première Guerre mondiale. Cela
conduit au démembrement des empires européens et à la création de nouveaux
États en Europe.
Toutefois,
ce principe reste largement limité à l'Europe et n’est pas appliqué aux
colonies, toujours sous domination européenne.
Après
la Seconde Guerre mondiale, le principe prend de l'ampleur avec la Charte des
Nations Unies (1945), qui mentionne le droit des peuples à l'autodétermination.
Dans
les années 1960, avec la vague de décolonisation en Afrique et en Asie, l’Onu
adopte la résolution 1514 (1960), déclarant que la colonisation est contraire
aux droits fondamentaux.
De
nombreux États accèdent à l’indépendance, notamment grâce aux référendums ou
aux luttes armées.
L’analyse
de ce principe se décompose en trois volets (I) qu’il s’agit de croiser avec
l’actualité de la géopolitique contemporaine (II).
I
- Analyse
A/ Théorie de l'autodétermination des peuples
L'autodétermination est le droit pour un peuple de déterminer librement son statut politique et de poursuivre son développement économique, social et culturel sans ingérence extérieure. Ce principe est fondamental en droit international et est reconnu comme un droit impératif.
B/ Principe en droit international
Le
droit à l'autodétermination est inscrit dans la Charte des Nations unies,
notamment à l'article 1.2, qui stipule que l'un des buts de l'Onu est de
"développer entre les nations des relations amicales fondées sur le
respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à
disposer d'eux-mêmes".
Ce droit implique que les peuples peuvent choisir leur statut politique sans coercition extérieure.
C/ Doctrine de politique étrangère
La
proposition de Trump consiste à déplacer une grande partie de la population
palestinienne de Gaza vers des pays voisins tels que l'Égypte et la Jordanie,
puis à reconstruire la région en une zone touristique prospère.
Cette
approche a été critiquée par de nombreux dirigeants internationaux, y compris
le roi Abdallah II de Jordanie, qui a exprimé son opposition à tout déplacement
forcé des Palestiniens, le qualifiant de contraire au droit international et
assimilable à une "purification ethnique".
Du
point de vue de l'autodétermination, le déplacement forcé des Palestiniens de
leur territoire ancestral constitue une violation flagrante de leur droit à
déterminer leur propre avenir. Les habitants de Gaza ont exprimé leur
attachement profond à leur terre et leur refus de la quitter, malgré les
conditions de vie difficiles.
Ainsi, la mise en œuvre de ce plan sans le consentement des populations concernées serait en contradiction directe avec le principe d'autodétermination tel que défini par le droit international.
II - L’actualité de la géopolitique contemporaine
Le
Moyen-Orient est une région marquée par des défis persistants, influencés par
des dynamiques historiques, ethniques, religieuses et économiques. Les
décisions des grandes puissances, notamment les États-Unis, la Russie, la Chine
et l'Union européenne, jouent un rôle majeur dans l'évolution de ces enjeux.
Voici une analyse des principaux défis et des implications géopolitiques des
interventions étrangères :
A/ Les conflits et tensions régionaux
-
Guerre en Syrie : Le conflit syrien reste un enjeu majeur avec l'implication de
la Russie, des États-Unis, de la Turquie et de l'Iran. La stabilité du pays est
encore menacée par la présence de groupes djihadistes, de tensions ethniques et
d'ingérences étrangères.
-
Conflit israélo-palestinien : Les tensions récurrentes entre Israël et les
territoires palestiniens continuent d’alimenter l’instabilité, avec des
implications pour la sécurité régionale et internationale.
-
Yémen : La guerre civile entre les Houthis, soutenus par l'Iran, et le
gouvernement reconnu par la communauté internationale, appuyé par l'Arabie
saoudite, a des conséquences humanitaires dramatiques.
- L’Irak et l’instabilité post-Daech : Malgré la défaite territoriale de l'État islamique, l’Irak reste fragilisé par des divisions sectaires et l’influence grandissante de l’Iran.
B/ La rivalité entre puissances régionales
-
Arabie saoudite vs Iran : La lutte d’influence entre ces deux puissances chiite
et sunnite se manifeste en Syrie, au Yémen, en Irak et au Liban.
-
Turquie : Ankara cherche à accroître son influence, notamment en Syrie et en
Libye, tout en maintenant des relations complexes avec la Russie et l'Otan.
- Israël et ses alliances : Le pays renforce ses partenariats avec les États arabes via les Accords d'Abraham, modifiant l'équilibre régional.
C/ L’influence des grandes puissances et leurs intérêts
-
États-Unis : Leur retrait progressif de la région a laissé place à une
influence accrue de la Russie et de la Chine. Washington reste toutefois engagé
en Israël, en Arabie saoudite et dans la lutte contre le terrorisme.
-
Russie : Moscou soutient le régime de Bachar al-Assad en Syrie et cherche à
renforcer son rôle dans le Golfe et en Afrique du Nord.
-
Chine : Pékin investit économiquement, notamment à travers les Nouvelles Routes
de la Soie, et renforce ses liens avec l'Iran et les pays du Golfe.
-
Europe : L'Ue joue un rôle diplomatique mais manque d’influence militaire
significative dans la région.
D/ Enjeux énergétiques et économiques
-
Pétrole et gaz : Les grandes puissances cherchent à sécuriser leurs
approvisionnements, notamment en raison de la transition énergétique et des
fluctuations des prix.
- Sanctions économiques : L’Iran subit des sanctions américaines, influençant ses relations avec la Russie et la Chine.
E/ Terrorisme et sécurité
-
La menace djihadiste persiste avec des groupes comme Daech et Al-Qaïda actifs
en Syrie, en Irak et au Sahel.
- Les puissances mondiales doivent équilibrer lutte antiterroriste et respect des droits humains.
Conclusion
L’autodétermination est invoquée dans des contextes variés: Québec (Canada), Écosse (Royaume-Uni), Catalogne (Espagne), Kurdistan, Palestine, Kosovo, Crimée, etc.
Le
droit international reconnaît surtout ce principe dans les contextes de
décolonisation, mais il est plus controversé lorsqu’il est invoqué par des
mouvements séparatistes à l'intérieur d'États souverains.
L’Onu
soutient le droit à l’autodétermination mais insiste aussi sur l'intégrité
territoriale des États, créant un équilibre complexe entre ces deux principes.
Il
y a lieu de reconnaitre que les défis du Moyen-Orient restent complexes et
interconnectés, avec des implications directes sur la sécurité et l’économie
mondiales.
La décision de Trump est troublante. Il est vrai, les grandes puissances façonnent l'avenir de la région par leurs décisions, mais la stabilité durable dépendra également des dynamiques locales et des initiatives diplomatiques régionales.
A Bon entendeur salut !!!