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Tribune: Subvention du prix à la bouteille du gaz domestique: Du social au développement

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Candide Ahouansou Candide Ahouansou

Il  prime que nous jouissions  d’une bonne santé pour profiter de la vie. Et la bonne santé passe principalement par la bonne cuisson des aliments;  aussi  toute décision qui la favorise  sur gaz butane et non plus sur  charbon de bois nocif à bien d’égards  pour notre santé, mérite-t-elle intérêt.

Par   Candide Ahouansou, le 27 mai 2025 à 06h34 Durée 3 min.
#Commercialisation du gaz

Récemment, les autorités ont réaménagé les contenants  du gaz domestique et ont révisé à la baisse certains coûts de recharge pour les rendre plus accessibles aux plus défavorisés d’entre nous, ont-elles précisé. C’est sans aucun doute une mesure qui, prise intrinsèquement, mérite d’être saluée en raison de son impact social quand bien même modeste, sur une frange déterminée de la population. Toutefois, pour faire bonne mesure, il convient de l'apprécier également  dans  une approche intégrative et macroéconomique. Il sied alors de commencer par convenir de la place que tient la bouteille de gaz dans l’économie  familiale et sociale.

La bonbonne de gaz butane dans l’échelle des biens de consommation

 Nonobstant son volume et sans préjudice du charbon de bois, la bouteille de gaz butane fait, à n’en guère douter, partie intégrante des biens de consommation courante. C’est elle  qui permet la cuisson des aliments que  nous mangeons pour vivre, et elle est d’utilisation journalière, permanente et continuelle. Elle est donc en amont de toute notre vie  alimentaire quelle que soit la catégorie sociale à laquelle nous appartenons ; et elle devrait être perçue comme telle dans toute prise de décision la concernant.

Une mesure d’ordre social à la lisière du développement 

Dans un article en date du 16 mars 2013, il y a donc 12 ans de cela, nous écrivions déjà qu’il fallait considérer l’accession au gaz butane comme un acquis de développement aux côtés des acquis sociaux qui s’expriment fondamentalement en termes monétaires et accessoirement en termes de bien- être social et des acquis politiques qui eux, se définissent en termes de libertés publiques et individuelles. L’accession au gaz butane est une avancée, un progrès de civilisation qu’il convient d’entretenir. Pour cette raison, nous nous étions inscrits en faux contre l’augmentation de son prix d’achat et avions proposé déjà une subvention dont les paramètres ne sont pas les mêmes que ceux que les autorités ont retenus.

La mesure qu’ elles viennent de prendre porte révision des prix des recharges de butane  et vise à  alléger la charge de l’achat aux plus démunis d’entre nous ; et nous ne pensons pas nous tromper en l’inscrivant dans sa politique du ‘’hautement social'''. Il est à souhaiter néanmoins que par ricochet elle entraîne l’accroissement de la  consommation de ce bien par les bénéficiaires de ladite mesure, car  entretenir le social tout juste pour l’entretenir, c'est le maintenir à la traine sans jamais lui donner sa  chance d’émerger. Le  social est fondamentalement à la traîne du développement. Il  stagne tandis que le développement se fait moteur de l’économie et se manifeste par des avancées et des progrès au fil du temps. Au reste, le gaz domestique a suivi cette évolution.

Ce fut une révolution historique que nos ancêtres, l’espèce homo erectus, aient découvert le feu en percutant deux pierres ; c’est une révolution moderne que nous passions du charbon de bois au gaz domestique pour cuire nos aliments dans nos foyers, toutes catégories sociales confondues. Les autorités ont présenté la récente mesure comme étant une subvention dont les bénéficiaires sont les populations les plus défavorisées. 

Une subvention se veut une mesure incitative et non pas une assistance

Lorsqu’en toutes circonstances l’on prend une mesure spécifique en faveur des plus défavorisés comme cela est le cas pour le gaz domestique, c’est ni  plus ni moins faire de l’assistance ; et l’ assistance se réfère à une situation qui stagne et non pas qui se développe.

La subvention quant à elle, se veut incitative. Se référant à une entité ou à un produit de consommation courante, elle l’affecte dans son entièreté. Elle ne  saurait être fractionnée  de quelque manière notamment  en tranches de population. Elle est d’essence  uniforme et nationale pour un produit de consommation donné. La subvention perçue comme il convient ne peut alors viser  à  encourager une frange spécifique  de la population à consommer un produit  déterminé en laissant l’autre pour compte pour quelque raison que ce soit. Autrement elle  tombe dans l’ assistance à une catégorie de personnes. Il est vrai que politiquement parlant, le terme assistance  ne sonne pas bien ; aussi le politique aura-t-il tendance à lui préférer celui de subvention qui lui, a l’avantage de ne doigter ni de vexer le citoyen électeur, le cas échéant. Il ne fait aucun doute cependant que dans l’esprit des autorités qui ont pris la décision, la subvention  tenait à la fois de l’assistance et de l’encouragement implicite à consommer davantage. Alors, comment harmoniser les deux  préoccupations pour qu’elles concourent effectivement  à l’accroissement de la consommation et partant, justifier techniquement la subvention ?

Comment concilier assistance et subvention

Il s’agit de  faire d’une pierre deux coups en amenant ceux  à qui l'on apporte une assistance à accroître leur consommation par la même occasion. La solution se trouve certainement dans une sensibilisation accrue. C'est déjà par le biais d'une première vague de sensibilisation en direction des ménagères et des bûcherons  que les moins fortunés d’entre nous  en sont venus à l’utilisation du gaz domestique ayant ainsi donné congé au charbon de bois sans y renoncer complètement, il faut bien le reconnaître. Cette sensibilisation devra connaître une seconde vague, celle de la consolidation avec des thèmes judicieusement choisis et plus percutants en l’occurrence, pour continuer de dissuader le citoyen d’avoir recours quand bien même de manière sporadique, au charbon de bois sans oublier de tenir les bûcherons en respect. Alors, le terme subvention pourra se justifier dans toute son acception si ce n’est que pour raison supérieure de solidarité sociale, les moins démunis devront  fermer les yeux sur le fait que les bouteilles de 12 kg en ont été d’office exclues. Les plus démunis devront, quant à eux, se faire à l’idée que  pour l’instant, la subvention porte sur le contenu qu’est  le gaz  et n’inclut pas le contenant. Nous sommes confiants que les autorités se pencheront le moment venu sur cette question, car en définitive c’est le coût du contenant  et non pas tant la recharge qui obère le budget des plus démunis et annihile leur volonté de se mettre, eux aussi, à l’heure du gaz domestique  pour de bon. Et pourquoi ne pas mettre les importateurs du gaz à contribution dans cette démarche ainsi que nous l’avions proposé il y a 12 ans déjà ? Après tout, c’est bien eux qui en vivent.

Ambassadeur