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Trois questions à l’ex-première Dame de la Sierra Leone: « Il est temps que le monde se soucie de nous », clame Fatmata Nippe Momoh

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Fatmata Nippe Momoh Fatmata Nippe Momoh

Pionnière de la dynamique visant à restaurer, protéger et honorer les épouses des anciens présidents d’Afrique, l’ancienne première Dame de la Sierra Leone, Fatmata Nippe Momoh, multiplie les visites dans les pays africains pour fédérer toutes ces femmes qui vivent le mépris et sont marginalisées. De passage au Bénin, elle partage les peines des ex-premières dames et les objectifs de la Coalition des épouses des anciens présidents d’Afrique.

Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 28 nov. 2024 à 10h43 Durée 3 min.
#Coalition des épouses des anciens présidents d’Afrique

La Nation : Vous avez effectué une visite au Bénin en début du mois de novembre pour rencontrer les ex-premières dames et les autorités. Pour quelles raisons ?

Fatmata Nippe Momoh : Je suis venue soutenir mes sœurs qui vivent la même situation que moi et leur apporter l’espoir de lendemains meilleurs à travers la Coalition des épouses des anciens présidents d’Afrique. Cette tournée qui a permis de parcourir plusieurs pays d’Afrique, a pour but de rencontrer les ex-premières dames pour mutualiser les idées, fédérer les énergies et encourager une position commune sur la protection des droits et de la dignité des anciens dirigeants et de leurs familles. La tournée nous permet également de rencontrer des personnalités influentes pour sensibiliser aux peines des ex-premières dames et à la nécessité de les soutenir pour que leur situation s’améliore dans le respect de leur dignité.

Lors de ma visite, j’ai pu rencontrer les anciennes premières Dames Marguerite Kérékou et Chantal Yayi. Nos échanges étaient cordiaux et nous sommes d’avis sur la nécessité d’unir nos voix pour faire entendre notre cri de détresse. Nous avons également pu déposer la documentation relative à notre coalition à la présidence de la République. Vous savez, les ex-premières Dames souffrent en silence. Elles subissent les pires discriminations et violences aussi bien physiques que mentales, et ce, dans le mépris total. Vous imaginez, une ancienne première Dame quémander dans le voisinage et dire qu’elle n’a plus de quoi manger. On ne la croirait même pas car, dans leur entendement, les populations se disent que les premières dames sont riches et qu’elles ont accès aux biens de leurs maris. Mais la réalité est tout autre. Parmi nous, certaines sont dans la précarité, victimes d’humiliation et de torture psychologique. D’aucunes ont vu leurs maisons et leurs biens pillés après que leurs maris ont quitté le pouvoir ou ont été contraints à l’exil. Nous avons été dans plusieurs pays d’Afrique et la situation est similaire. Au Sénégal, en Mauritanie, au Mali, en Côte d’Ivoire, les ex-premières dames vivent les mêmes tribulations. Il est temps que le monde se soucie de nous et c’est pour ce faire que nous nous sommes regroupées pour mettre en place une coalition.

Parlez-nous de cette coalition dédiée à l’amélioration des conditions des ex-premières Dames ?

La Coalition des épouses d’anciens présidents d’Afrique est une initiative stratégique et diplomatique conçue pour aborder la négligence et la marginalisation systémiques auxquelles sont confrontées les épouses des anciens présidents africains après que leurs maris ont quitté leurs fonctions ou sont décédés. Malgré leur rôle significatif dans les affaires nationales, ces femmes se retrouvent souvent sans soutien institutionnel, sans sécurité financière ou reconnaissance sociale. La Coalition s’engage à inverser cette tendance en créant une plateforme qui assure la dignité et l’héritage des anciennes premières Dames, tout en contribuant simultanément à la paix et à la stabilité dans les nations africaines. Notre vision, c’est de créer un monde où les épouses des anciens présidents des nations africaines sont honorées pour leurs contributions, protégées contre la négligence et dotées des ressources nécessaires pour laisser un héritage durable qui inspirera les générations futures. La Coalition se veut comme un catalyseur du changement, favorisant l’unité et une gouvernance progressive en Afrique à travers la voix collective de ces femmes influentes. Il s’agit, pour nous, de promouvoir la protection, l’autonomisation et la reconnaissance des épouses des anciens présidents africains en veillant à ce que leurs contributions à leurs nations soient reconnues, que leurs droits soient respectés et que leurs besoins soient satisfaits à travers des cadres juridiques, une sécurité financière et des institutions culturelles. La Coalition vise également à promouvoir une culture de la paix en agissant comme médiatrice et conseillère auprès des présidents actuels et futurs afin de prévenir les erreurs de gouvernance et la perpétuation de vengeances politiques.

Quels sont les grands chantiers sur lesquels la Coalition entend travailler ?

Les objectifs spécifiques de la Coalition se déclinent  essentiellement en sept axes. Nous entendons  célébrer les contributions sociales, culturelles et politiques des épouses des anciens présidents et leurs héritages ; faciliter le dialogue à travers une plateforme pour des discussions ouvertes sur les questions clés affectant les épouses des anciens présidents et leurs familles dans leurs pays respectifs, notamment en ce qui concerne leur statut ; promouvoir la collaboration en encourageant les partenariats et l’unité entre les épouses des anciens présidents, en favorisant l’amour, le respect et la compréhension et en créant ainsi un réseau de soutien permettant aux membres de travailler ensemble sur des causes communes ; soutenir la préservation de l’héritage en veillant à ce que les épouses des anciens présidents continuent à se soutenir mutuellement et laissent des héritages tangibles pour les générations futures (cela inclut des initiatives visant à soutenir les jeunes femmes et les aspirantes leaders) ; susciter l’engagement des dirigeants actuels en facilitant les rencontres avec les présidents en fonction, en leur offrant des conseils et en les incitant à soutenir les familles des anciens présidents (cela inclut la promotion de pensions appropriées, le respect des héritages et droits de ces femmes, comme le prévoient les Constitutions nationales) ; plaider pour la construction des musées des héritages présidentiels dans chaque pays, permettant aux visiteurs de découvrir non seulement les projets des anciens présidents mais aussi les initiatives de développement national en cours ; promouvoir la paix et la sécurité en plaidant auprès des nouveaux présidents élus pour qu’ils évitent de se venger des familles des anciens présidents mais favorisent plutôt l’unité nationale et la réconciliation.