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Boulimie: Comprendre et guérir de la pathologie

Santé
Abdel Fawaz Yessoufou Abdel Fawaz Yessoufou

La boulimie est un trouble alimentaire qui touche de nombreuses personnes. Comment la surmonter et retrouver un rapport sain à l'alimentation ? Abdel Fawaz Yessoufou, nutritionniste-diététiste, donne des éclaircissements. 

Par   Lhys DEGLA, le 09 oct. 2024 à 08h10 Durée 3 min.
#trouble alimentaire #Santé

Qu'est-ce que la boulimie?

La boulimie est un trouble des conduites alimentaires (Tca). Elle se définit par un besoin incontrôlable d’absorber de la nourriture en grande quantité chez une personne qui n’est pas habituellement un « gros mangeur ». Elle entraîne des comportements alimentaires inadaptés. Elle altère significativement la santé psychique et physique de celui qui en souffre. La relation aux autres et l’adaptabilité à son environnement deviennent également très complexes.

Quels sont les principaux facteurs, tant psychologiques que physiologiques, pouvant conduire à la boulimie ?

La boulimie se présente rarement seule. Elle est très souvent associée à d’autres troubles psychologiques comme la dépression et l’anxiété. Les adolescents peuvent également consommer en excès des drogues ou de l’alcool menant à des conduites addictives en plus de la consommation déviante de nourriture. Elle concerne beaucoup plus de jeunes filles que de garçons, qui présentent des tableaux cliniques beaucoup plus graves sur le plan de la personnalité. Ce trouble est très fréquent mais son diagnostic est compliqué en pratique car nié souvent par la personne. C’est l’entourage qui en parle souvent en premier.

Quels symptômes doivent alerter une personne ou son entourage sur la présence d'un comportement boulimique ?

La boulimie se manifeste chez l’adolescent par des crises d’excès alimentaires effectués en cachette et en solitaire, que nous nommons un rituel. Cette crise peut arriver à n’importe quel moment de la journée, généralement en lien avec des angoisses internes insupportables à gérer autrement qu’en mangeant. Au moment de la crise, l’adolescente se jette avec avidité sur toutes sortes de nourriture, généralement hyper caloriques, que parfois même elle s’interdit à table généralement. Cette frénésie n’a rien d’un grignotage habituel, la personne va manger tout ce qui passe à sa portée, vidant d’abord le frigo, mangeant des boîtes de conserve froides, des plaquettes de beurre entières sans pain… Ce n’est donc pas un plaisir de manger ici mais une commande de se remplir pour calmer son angoisse. Mais l’angoisse ainsi calmée laissera la place à une culpabilité envahissante et une peur de grossir qui va pousser l’adolescente à se faire vomir. Il y a donc en parallèle une obsession qui se met en place et qui concerne la forme de son corps et sa prise de poids.

Comment la nutrition joue-t-elle un rôle dans la gestion de la boulimie et quels sont les principaux conseils nutritionnels que vous prodiguez pour rétablir une relation saine avec la nourriture ?

Il revient au spécialiste d’identifier les déclencheurs de l’hyperphagie chez le sujet, de planifier des repas réguliers et équilibrés et développer des compétences en matière de gestion du stress et régulation des émotions. Il est important d’enseigner aux concernés à garder à l’esprit la notion d’Assiette équilibrée ; ½ portion de fruits et légumes (combinaisons haricot vert + courgette+ poivron jaune), ¼ portion de protéine (V.P.O) et ¼ portion de glucides (féculent, céréales). Il est recommandé de toujours commencer par la portion de légumes (les légumes rassasient mieux) ensuite la protéine et enfin le reste de légumes avec la portion de glucides et d’accorder du temps de mastication à chaque bouchée.

Quelle est l'importance du suivi psychologique dans le traitement de la boulimie, et comment collaborez-vous avec les psychothérapeutes ?

Les troubles de la conduite alimentaire sont également à prendre en compte sur le plan somatique, avec des risques de décès, des retentissements sur la croissance ou sur la santé générale de la personne. C’est donc une préoccupation de santé publique. Il faut donc mettre en lien le travail du psychiatre et du médecin somaticien. Plusieurs courants au 20e siècle vont se succéder concernant la manière de voir ces pathologies. Le modèle psychiatrique des années 80 se construit autour des troubles alimentaires comprenant: l’anorexie, la boulimie, le trouble mixte (alternance des deux), l’hyperphagie, le grignotage pathologique et le syndrome d’alimentation nocturne. Pour la gestion de boulimie, c’est tout un collège de professionnels. A chaque niveau il y a un travail à faire.

Comment une personne peut-elle réapprendre à écouter ses sensations de faim et de satiété après avoir vécu la boulimie ?

Tout d’abord, il n’y a aucun aliment à éviter. Tout est question d’équilibre (réf à la notion d’Assiette équilibrée). Ensuite pour réapprendre à écouter ses sensations de faim et de satiété après avoir vécu la boulimie, il faut manger normalement sans sauter de repas ; manger à des heures régulières, pratiquer la mastication de pleine conscience, éviter les situations de stress. 

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaite soutenir un proche souffrant de boulimie dans son parcours de guérison ?

Si vous souhaitez aider un proche souffrant de boulimie, il faudra dans un premier temps s’informer sur la boulimie. Ensuite aider le sujet à fuir toute situation de stress ; tenir un miroir en face du sujet pour attirer l’attention de ce dernier sur l’exercice de mastication, changer régulièrement la vaisselle et tenir un bon décor de la table, un aspect de la fonction organoleptique non négligeable■   

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