La Nation Bénin...
Une
centaine de jeunes se sont réunis, samedi 31 mai dernier dans la commune
d’Abomey-Calavi, pour participer au «Carnaval Doxami : ça m’dit ce samedi ! ».
Organisée par l’Ong « Filles en actions », cette deuxième édition a mis
l’accent sur la sensibilisation et l’éducation autour de la loi N°2021-12 du 20
décembre 2021 modifiant et complétant la loi n°2003-04 du 03 mars 2003 relative
à la santé sexuelle et à la reproduction.
Le
Carnaval Doxami a offert samedi dernier, un cadre convivial avec des activités
ludiques, des podcasts, des ateliers participatifs et une marche de
sensibilisation. Ce fut un espace d’échanges où les jeunes ont pu s’exprimer
librement sur des sujets souvent tabous liés à la santé sexuelle et
reproductive. Corazon Houndji, participante, en souligne l’aspect éducatif. «Ce
carnaval est plus instructif que les autres festivals auxquels nous assistons.
Il nous donne les clés pour mieux nous orienter et accéder à des informations
essentielles pour affirmer nos droits dans la société », a-t-elle confié. Elle
insiste également sur la reconnaissance accordée aux jeunes. « Nous avons été
traités comme de véritables acteurs, avec respect et sans jugement », a-t-elle
fait savoir. De son côté, Richnelle Sonon confie avoir découvert l’historique
du combat pour l’Ivg. «Grâce aux podcasts, j’ai compris que beaucoup de femmes
pratiquaient des avortements clandestins, mettant leur vie en danger. Cette loi
de 2021 encadre enfin l’Ivg avec un suivi médical sécurisé, une avancée majeure
pour les femmes longtemps victimes d’oppression », explique-t-elle. Ces récits
témoignent d’une prise de conscience collective, nourrie par une information claire
et accessible, offrant soutien et assurance aux jeunes femmes quant à leurs
choix et à leur corps.
Prenant
la parole, Brian Sossou, présidente de l’Ong « Filles en actions », rappelle
l’humanité derrière les chiffres. « Derrière chaque avortement clandestin, il y
a une femme, une histoire, une vie », a-t-elle lâché. Elle souligne que ces
drames découlent d’un refus fondamental : celui du droit des femmes à disposer
librement de leur corps. Elle revient sur le chemin difficile qui a mené à la
loi n°2021-12 du 20 décembre 2021, une victoire symbolique et historique.
Toutefois, elle met en garde : « Une vraie victoire suppose un accès universel
à l’information et aux soins, sans privilège. Quand la loi devient un luxe
réservé à quelques-uns, elle engendre inégalités et injustice sociale ». Selon
Brian Sossou, le projet Doxami vise justement à combler cette fracture. « Il
s’agit de briser les barrières, d’offrir une information universelle et de
garantir un accès équitable », explique-t-elle. Pour la présidente de l’Ong
‘’Filles en actions’’, ce combat appartient désormais à toute la jeunesse,
appelée à porter ce flambeau afin que la loi soit vécue au quotidien, loin des
« promesses non tenues». Brian Sossou n’a pas manqué de dénoncer les nombreux
obstacles persistants à savoir : manque d’accès aux soins publics, refus du
personnel médical, coûts élevés des cliniques privées. « Nous refusons que le
droit à l’Ivg dépende du portefeuille, de la localisation ou de l’âge »,
affirme-t-elle, appelant à un engagement collectif pour que l’Ivg cesse d’être
un privilège et devienne un droit réel.
Tiburce
Kindjihossou, chef du Guichet Unique de Protection Sociale (Gups) de
Tori-Bossito, a rappelé l’importance de cette loi et la nécessité d’informer
les jeunes. « Ce sont des droits peu abordés à l’école mais essentiels dans la
vie », souligne-t-il. Il insiste sur les conséquences dramatiques de
l’ignorance, notamment les décès liés aux avortements clandestins : «Nous
connaissons tous quelqu’un qui a perdu un proche à cause de cela. La loi
2021-12 est une réponse humaine et durable.» Cependant, il regrette que cette
loi soit encore peu connue. «L’information est un pouvoir, et entre de bonnes
mains, ce pouvoir sauve des vies. » Il encourage les participants à devenir des
relais de cette connaissance. Enfin, le chef du Guichet Unique a réaffirmé
l’engagement de son service à soutenir les jeunes dans l’exercice de leurs
droits. Il a invité les étudiants à profiter pleinement de cette journée, dans
un esprit de partage et de solidarité, afin de faire de l’accès sécurisé à
l’Ivg, un droit universel pour toutes les femmes béninoises.
Pour clôturer, les organisateurs ont appelé à diffuser ce message dans les quartiers, écoles, familles et cercles d’amis, afin que la loi SR-2021 ne reste pas un simple texte mais soit une réalité concrète. Le Carnaval Doxami est plus qu’une fête, c'est un appel à la justice sociale. Il rappelle que le droit à disposer de son corps est au cœur de toute liberté et doit être accessible à toutes les femmes du Bénin, avec dignité et sécurité.