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Francis Dossou au sujet de la fermeture de six cliniques d’accouchement: « C’est un signal fort donné aux prestataires de soins de santé »

Santé
Par   Isidore Alexis GOZO (gozoalexis6@gmail.com), le 07 juil. 2021 à 07h36
Après enquête, la Commission chargée du contrôle des structures de prestations des soins médicaux au Bénin a procédé à la fermeture de six cabinets pour non-respect des normes en matière de prestations fournies aux populations. Francis Dossou, président de l’Ordre national des médecins du Bénin, approuve cet assainissement opéré. Dans cette interview, il aborde les actions menées par sa structure pour lutter contre les déviances, les normes que doivent respecter ces cliniques de même que les sanctions auxquelles elles s'exposent en cas de non-respect des mesures sont exposées. La Nation : En votre qualité de président de l’Ordre national des médecins du Bénin, comment appréciez-vous la décision de fermeture de six cabinets pour non-respect des normes en matière de prestations fournies aux populations? Francis Dossou : Je n’ai pas les détails de la décision qui a été prise mais j’ai ouï-dire qu’il s’agit de cliniques d’accouchement eutocique qui poseraient des actes dépassant leurs prérogatives. Si c’est le cas, on ne peut que saluer la démarche qui permet de donner un signal fort aux prestataires en matière de santé pour qu’ils essayent de respecter les conditions dans lesquelles ils sont autorisés à exercer leur profession. Une sage-femme peut très bien avoir une clinique d’accouchement eutocique mais lorsque l’accouchement nécessite un niveau plus élevé, la sage-femme peut entrer en contact avec une structure un peu plus équipée afin d’envoyer sa cliente vers celle-ci tout en respectant les normes de référence d’évacuation. Si les enquêtes ont montré que ce n’est pas le cas et que les gens posent des actes qui vont au-delà de ce qu’ils devaient faire, c’est normal qu’on puisse commencer à sévir puisque cela fait deux ou trois ans qu’on est en train de leur demander de respecter des normes. Que fait l’Ordre national des médecins du Bénin pour lutter contre ces déviances dans le secteur ? Le secteur est vaste et comporte plusieurs catégories de professionnel de santé. L’Ordre national des médecins du Bénin s’occupe essentiellement et uniquement des médecins et de la pratique médicale. Nous pouvons intervenir lorsque quelqu’un n’est pas médecin et pose des actes médicaux. En ce moment, nous saisissons les instances de sécurité et le ministère pour qu’ils interpellent la personne. Nous faisons une veille permanente. Nous sommes à l’écoute de nos confrères qui nous signalent d’éventuels dérapages de la part des personnes qui ne sont pas médecins et qui posent des actes de médecin. Ceux-là sont interpellés et ils font certainement partie des cliniques qui sont fermées par la Commission chargée du contrôle des structures de prestations des soins médicaux au Bénin. Nous avons la chance d’avoir dans chacun des douze départements de notre pays, des conseillers départementaux qui sont le relai de ce qui se passe au niveau des départements pour remonter l’information vers le Conseil national. Et même, on est en contact avec les autorités locales, les directions départementales de la Santé, les directions départementales de la Police républicaine, le procureur de la République. Là, vous êtes au courant de la fermeture des cliniques parce que c’est médiatisé, sinon en sourdine, il y a un certain nombre de cliniques qui sont fermées. Les directions départementales de la Santé qui sont les représentants du ministre s’associent aux représentants départementaux de l’Ordre national des médecins pour fermer des cliniques. Ce n’est pas intéressant de mettre forcément le grand public au courant parce que si les confrères se remettent dans les normes plus tard et rouvrent tranquillement leur formation sanitaire, ils ne pourront plus mériter la confiance des populations. Ce qui leur est reproché, ce n’est pas leur compétence ni leur capacité à soigner mais c’est les conditions dans lesquelles ils posent ces actes. Quelles sont les conditions que doivent respecter ces cliniques ? En termes d’espace, ces cliniques doivent avoir des salles qui respectent certaines normes en matière de dimension. Pour poser des actes, ces cliniques doivent être équipées. Il y a aussi les normes en termes de ressources humaines. On ne peut pas permettre à une clinique, fût-elle dirigée par un médecin, d’avoir une activité de suivi de grossesse et d’accouchement s’il n'y a pas une sage-femme à côté. Une clinique médicale ne peut pas passer 24 h sans un médecin. Il faut forcément qu’il y ait un médecin de garde 24 h/24. Une clinique qui, dans son personnel, n’a qu’un seul médecin ne peut continuer d'exercer. Elle sera obligée de fermer le temps de recruter quelqu’un pour assurer cette place. Lorsqu’on vous donne une autorisation pour être un cabinet médical, c’est-à-dire une formation sanitaire d’un certain niveau qui pose des actes de consultation, de diagnostic et d’observation de courte durée, vous n’avez pas le droit d’hospitaliser. Ce sont les cliniques médicales qui ont des salles d’hospitalisation qui sont autorisées à garder les malades. Si on vous autorise à être un cabinet médical et que vous vous permettez d’hospitaliser les gens, vous êtes en infraction et on vous inflige des sanctions. Quelles sont les sanctions auxquelles elles sont alors exposées ? La sanction la plus simple et la plus immédiate, c’est la fermeture de la structure. En dehors de ça, si dans l’exercice de sa fonction, la clinique n’a pas porté préjudice à la santé de quelqu’un, il n’y aura pas de poursuite. Il y a donc nécessité de plainte, lorsque la victime ou sa famille se plaint, on enclenche les actions judiciaires. Au niveau de l’Ordre des médecins, nous avons une chambre disciplinaire qui interpelle le contrevenant et on peut passer à l’avertissement ou au retrait de son autorisation d’exercice ou encore à la suspension temporaire ou définitive de son activité. Le ministère de la Santé, à travers la direction départementale de la Santé, et le procureur ont aussi le droit de s’autosaisir.