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Professeur Josué Georges Avakoudjo à propos du cancer de la prostate: « C’est le mal masculin de la décennie actuelle… »

Santé
Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 10 août 2021 à 06h42
Souvent découvert après la cinquantaine, le cancer de la prostate est comme l’épée de Damoclès qui plane sur les hommes. Pour le Professeur Josué Georges Avakoudjo, chirurgien urologue, chef du service d’urologie au Centre national hospitalier universitaire Hubert Koutoukou Maga, le cancer de la prostate est même le mal masculin de la décennie actuelle et du siècle à venir. Il nous éclaire davantage sur cette tumeur. La Nation : Professeur, pourquoi dites-vous que le cancer de la prostate est le mal masculin de la décennie actuelle ? Professeur Avakoudjo : Le cancer de la prostate est une maladie mortelle. C’est le cancer qui tue le plus d’hommes au monde. Le cancer de la prostate est le mal masculin de la décennie actuelle et du siècle à venir. L’amélioration de l’espérance de vie des hommes, la lutte actuelle contre les cancers gynécologiques, feront exploser une épidémie de cancer de la prostate dans les années à venir. En l’absence de maitrise des facteurs de risque, les urologues devraient être déployés à proximité des populations. Un programme de santé des hommes type Men’s Health a tout son intérêt pour la réduction des cas de cancer de la prostate. Contrairement aux femmes, les hommes ont une faible fréquentation des structures de santé. Les hommes font moins souvent des bilans de santé. Il s’agit du mythe de l’homme super héros. Cette faible fréquentation explique les découvertes des cas de cancer désespérés. Le cancer de la prostate est découvert après 50 ans, plus souvent au-delà de 60 ans. Nous avons en Afrique et au Benin, des cas qui apparaissent avant 50 ans. Ces cas de sujets jeunes nous interpellent sur les facteurs environnementaux de nos pays moins développés qui importent des substances non homologués (aliments, cosmétiques, boissons). Les facteurs environnementaux peuvent donc causer le cancer de la prostate ? Les causes du cancer de la prostate ne sont pas toutes connues et font encore objet de nombreuses recherches par les scientifiques. Malheureusement, peu de pays africains allouent des budgets pour la compréhension des maladies telles que le cancer de la prostate. Les causes régulièrement évoquées sont l’hérédité, la race, certains pesticides utilisés pour l’agriculture, les infections sexuellement transmissibles, les facteurs environnementaux qui sont difficiles à identifier. Le cancer se développe grâce à l’association de plusieurs facteurs : un seul facteur ne suffit pas pour causer le cancer. Le cancer nait dans une cellule unique, celle-ci va se multiplier initialement dans la prostate, c’est la phase de maladie localisée où le traitement guérit le mal. Si le traitement tarde, le cancer franchira les barrières de la prostate et se dispersera dans tout l’organisme avec un appétit particulier pour les os. Tous les organes du corps sont atteints par le cancer à la phase de dissémination : poumon, foie, cerveau etc. Comment savoir que le mal a déjà attaqué son organisme ? Le cancer de la prostate est une maladie grave de la prostate due à une multiplication incontrôlée de certaines cellules de la prostate. Le cancer de la prostate qui se manifeste est déjà une maladie évoluée, dont le traitement est plus lourd. Les urologues préfèrent diagnostiquer le cancer avant qu’il ne s’exprime : nous parlons de dépistage. Rappelons cependant les signes classiques, des signes les plus banals aux plus préoccupants : les difficultés à uriner, l’impression que la miction est entrecoupée, la sensation de vidange incomplet de la vessie au terme de la miction, l’incapacité d’uriner malgré une envie pressante d’uriner, la présence de sang dans le sperme après les rapports sexuels, une boiterie à la marche d’apparition récente, des douleurs dans le dos, des paralysies des deux jambes, la fatigue intense. Au sujet des douleurs à la hanche et dans le dos, plusieurs cas de cancer de la prostate ont été découverts chez des kinésithérapeutes. Un homme de plus de 50 ans qui se fait masser le corps devrait vérifier l’état de sa prostate. Y a-t-il un traitement efficace pour les personnes déjà atteintes ? Il existe un traitement qui guérit les cancers de la prostate diagnostiqués précocement. Ces traitements sont la chirurgie et la radiothérapie. La chirurgie du cancer de la prostate est possible au Bénin en chirurgie ouverte. Les patients qui nécessitent une chirurgie robot assistée voyagent hors d’Afrique pour ce soin. La radiothérapie est disponible dans certains pays de l’Afrique de l’Ouest. Au Bénin, la radiothérapie est attendue dans le nouvel hôpital de référence en construction à Abomey Calavi. Les cancers de la prostate au stade avancé bénéficient de soins à base de médicaments à avaler et à injecter. Le traitement est cher et à vie. Le cancer de la prostate tue et appauvrit les familles. Les soins d’un cancer avancé coûtent en moyenne 400 000 francs Cfa par trimestre. Certains médicaments coûtent 2 millions par mois. Une subvention de l’Etat serait souhaitable pour la prise en charge des patients souffrant de cancer, tous les cancers en général. Le cancer de la prostate apparait chez des hommes à l’orée de la retraite alors que leurs revenus ont déjà baissé. Dans un contexte où les soins sont onéreux, prévenir vaut mieux que guérir ! Comment se prémunir contre ? Depuis l’adolescence, les garçons devraient être informés sur l’hygiène de la prostate qui consiste à se préserver des infections sexuellement transmissibles. Les garçons dont les pères ou oncles ont souffert de cancer de la prostate devraient démarrer le dépistage du cancer de la prostate à partir de 45 ans. Tous les hommes devraient avoir un bilan de leur prostate à partir de 50 ans. Sur le plan alimentaire, aucune recette n’a démontré sa protection contre le cancer. J’insiste sur le rôle combiné de plusieurs facteurs dans la survenue du cancer de la prostate. Plus d’une centaine de facteurs sont suspectés. Faut-il le redire : Le cancer de la prostate est le mal masculin de la décennie actuelle et du siècle à venir?