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1ère audience publique à la Cour constitutionnelle: Douze importantes décisions rendues

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Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 22 juin 2018 à 03h03
[caption id="attachment_29644" align="alignnone" width="1024"]Le professeur Joseph Djogbénou[/caption]

Les sept sages de la Cour constitutionnelle ont siégé, ce jeudi 21 juin, pour la première audience publique. Douze dossiers étaient au rôle de ces assises. La plupart des recours portent sur le contrôle de constitutionnalité de lois votées par l’Assemblée nationale et la remise en cause de la nomination de certains membres de l’actuelle mandature de la Cour constitutionnelle.

Le professeur Joseph Djogbénou est-il qualifié pour siéger à la Cour constitutionnelle et en être le président ? Le sieur Léonce Hounwédé n’y croit pas. Dans son recours déposé à la Cour constitutionnelle, il avance que l’actuel président de la Cour constitutionnelle n’aurait ni l’intégrité, ni la sagesse requises pour siéger à la Cour des sages et demande que sa nomination soit déclarée anticonstitutionnelle. C’est la même requête que formule le sieur Noël Olivier Kpokpo à l’égard du sage André Katari qu’il juge ne pas être une personnalité de grande réputation professionnelle n’ayant jamais été, ajoute le requérant, ni un élu du peuple ni un haut fonctionnaire de l’Etat. Les décisions sur ces deux recours ont été rendues, ce jeudi, par la Cour constitutionnelle. Les nominations du professeur Joseph Djogbénou et d' André Katari ne violent pas la Constitution comme le prétendent leurs requérants, estime la haute juridiction. Ni la Constitution, ni la loi organique de la Cour constitutionnelle n’édictent des critères d’appréciation de la moralité et il revient à l’autorité qui nomme d’apprécier au scanner du casier judiciaire et du curriculum vitae, la qualité et la moralité des personnes qu’elle désigne.
Pour le sieur Armand Bognon, c’est plutôt la cérémonie de prestation de serment des membres de la Cour constitutionnelle, le mercredi 6 juin dernier, qui serait contraire à la Constitution. Dans le recours qu’il a déposé à cet effet, il fustige la disposition du chef de l’Etat qui était seul sur l’estrade alors que les officiels du bureau de l’Assemblée nationale ont suivi la cérémonie.
En effet, l’article 7 de la loi organique de la Cour constitutionnelle stipule que les membres de la Cour constitutionnelle prêtent serment devant le président de la République et les membres du bureau de l’Assemblée nationale. Dans sa décision rendue hier, la Cour constitutionnelle a déclaré que par cette disposition, il faut comprendre que c’est la présence du chef de l’Etat et des membres du bureau de l’Assemblée nationale qui est requise et non leur prédisposition à la cérémonie.

39 ans + 1 jour égal à 40 ans ?

Le sujet revient sur le tapis. Lors de sa première audience publique, hier, la Cour a connu de la requête du sieur Souliou Adioula, enseignant vacataire, qui est dans sa 25e année, qui souhaite se présenter aux prochaines élections législatives en vertu de la jurisprudence instituée par la décision Dcc 15-156 du 16 juin 2015 qui stipule que « L’âge atteint par une personne au cours d’une année civile donnée correspond à l’âge atteint par cette personne au 31 décembre de l’année en cours, en raison de l’adage de droit français selon lequel "Année commencée, année acquise’’ ». Le requérant a introduit cette requête pour se prémunir des probables oppositions à sa candidature. La Cour constitutionnelle a remis en cause cette jurisprudence qui ne respecte pas les dispositions du Code électoral en son article 359 relatif aux règles particulières de l’élection des membres de l’Assemblée nationale et l’article 44 de la Constitution relatif à l’élection du président de la République. Selon les sept sages, lorsque le constituant exige un critère d’âge pour être éligible, il s’agit bien de l’âge révolu. Par conséquent, la Cour est revenue sur cette jurisprudence en précisant que 25 ans ou 40 ans ou encore 70 ans, c’est bien 25 ans ou 40 ans ou 70 ans révolus.

L’actuel Cos-Lépi finit dans moins de dix jours

Plus de prolongation pour les actuels membres du Conseil d’orientation et de supervision de la Liste électorale permanente informatisée (Cos-Lépi). La Cour constitutionnelle a connu, hier, de la requête du sieur Ambroise Dossou, gestionnaire demeurant à Cotonou, qui porte sur le mandat de l’actuelle mandature du Cos-Lépi.
En effet, cette mandature n’a été installé que le 8 mai 2018 et son mandat avait fait l’objet d’une prolongation jusqu’au 8 novembre 2018. Le requérant demande que cette équipe du Cos-Lépi poursuive son mandat jusqu’au premier trimestre de l’année 2019. Or, aux termes des articles 219 et 269 du Code électoral, la Lépi est mise à jour annuellement ; le Cos-Lépi est installé le 1er juillet et son mandat prend fin le 31 janvier de l’année suivante. Vu le dysfonctionnement créé par la situation présente, la Cour a estimé que cet état de choses ne doit se perpétuer contra legem et que le mandat de l’actuel Cos-Lépi ne saurait se poursuivre au-delà de la date légale. Elle a donc décidé que la mandature actuelle prenne impérativement fin le 30 juin prochain, soit dans moins de dix jours donc.


Cinq lois déclarées conformes à la Constitution

Cinq requêtes ont été déposées par le président de la République et portent toutes sur le contrôle de constitutionnalité de certaines lois récemment votées par l’Assemblée nationale. Ces recours du président se fondent sur les articles 117, 121 et 122 de la Constitution du 11 décembre 1990. Lesdits articles précisent les textes juridiques pour lesquels le contrôle de constitutionnalité est indispensable et offrent au président de la République, à l’Assemblée nationale et à tout autre citoyen d’ailleurs, la faculté de saisir la Cour afin qu’elle se prononce sur la conformité d’une loi à la Constitution. Présentée par le sage Moustapha Fassassi, la première requête du chef de l’Etat concerne la loi n°2018-12 portant régime juridique du bail à usage domestique en République du Bénin, votée par l’Assemblée nationale le 24 avril 2018, transmise au chef de l’Etat le 17 mai et soumise à la Cour le 24 mai 2018, soit dans le délai de 15 jours requis.
La deuxième requête a été présentée par le sage Sylvain Nouatin et concerne la loi n°2018-010 portant protection, aménagement et mise en valeur de la zone littorale du Bénin, votée le 17 avril 2018 et soumise le 24 mai 2018 à la haute juridiction.
La troisième requête présentée par le sage Cécile Marie-José de Dravo, concerne la loi n°2018-15 portant autorisation de ratification de l’accord de prêt signé le 6 mars 2018 par échange de correspondance entre la République du Bénin et le Fonds africain pour le Développement (Fad) dans le cadre du financement partiel du projet de reconstruction du système de répartition et de distribution de l’énergie par la Sbee votée le 4 juin 2018, transmise le 4 juin et soumise le 5 juin 2018.
La quatrième et la cinquième requête du chef de l’Etat présentées par le président de la Cour constitutionnelle, le professeur Joseph Djogbénou, concernent respectivement la loi n°2018-13 modifiant et complétant la loi n°2011-37 du 27 avril 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin modifiée et création de la Cour des infractions économiques et du terrorisme d’une part et d’autre part la loi n°2018-24 modifiant et complétant la loi n°2012-15 du 18 mars 2015 portant Code de procédure pénale en République du Bénin. La prétention du président de la République pour ces cinq requêtes est la même : le contrôle de constitutionnalité.
Du point de vue de la recevabilité, les requêtes ont été soumises à la Cour dans le délai de quinze jours requis entre la transmission au chef de l’Etat et la soumission à la Cour d’une part et d’autre part les articles 117, 121 et 122 de la Constitution en offrent la faculté au chef de l’Etat. L’examen des requêtes, selon les sept sages, révèle que toutes les dispositions de ces lois sont conformes à la déclaration. Ces cinq lois soumises au contrôle ont alors été déclarées conformes à la Constitution.
Par ailleurs les sages de la Cour constitutionnelle ont traité d’une requête déposée par le président du tribunal de première instance de première classe de Cotonou par intérim Jacques Houssou. Elle a trait à une exception d’inconstitutionnalité soulevée par Maître Nicolin Assogba qui a demandé sursis à statuer sur le contrôle de constitutionnalité des articles 212 et 260 du Code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes en République du Bénin. Vu que ladite loi votée en 2008 a déjà été soumise dans son entièreté au contrôle de constitutionnalité en 2010 et déclarée conforme en son temps, les sages de la Cour ont jugé irrecevable l’exception de constitutionnalité.
Ils ont aussi statué sur une requête déposée par le sieur Cédric Yayi Kokou Ogo qui a demandé que soient déclarés non conformes à la Constitution les agissements de certains partis politiques affiliés au pouvoir en place qui cherchent à faire réviser le Code électoral et la Constitution. La Cour a jugé irrecevable cette requête portée sur des intentions et non des faits répréhensibles?