La Nation Bénin...

Bio Issa Simé, secrétaire exécutif de la mairie de Bopa: « Les enclos piscicoles visent à pallier l’appauvrissement du lac »

Actualités
Bio Issa Simé Bio Issa Simé

Face à la rareté des ressources halieutiques du lac Ahémé, la mairie de Bopa a initié un projet d’installation d’enclos piscicoles destinés aux coopératives de pêcheurs. Bio Issa Simé, secrétaire exécutif de la mairie de Bopa, nous parle dans cet entretien de ce système d’aquaculture, du règlement de conflits entre les communautés et de la restauration de l’écosystème le long du cours d’eau.

Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 05 mars 2024 à 01h16 Durée 3 min.
#Bio Issa Simé #secrétaire exécutif de la mairie de Bopa #l’appauvrissement du lac

La Nation : Face à l’ensablement et à l’appauvrissement du lac Ahémé en ressources halieutiques, que fait la mairie de Bopa qui vit en grande partie de la pêche ?

Bio Issa Simé : Nos communes n’ont pas les moyens de faire le dragage du lac et de ses chenaux. Cela coûte des milliards de francs Cfa. Déjà, une bonne partie de nos budgets provient de l’Etat central. Ce que nous, nous faisons en tant que collectivités territoriales, ce sont des actions de veille et de sensibilisation des populations au respect des prescriptions des textes. Nous leur expliquons le bien-fondé de ne pas faire des champs jusqu’à la lisière du lac. Il y a une brigade de surveillance des plans d’eau créée en 2020 dont une base est installée à Sègbohouè (commune de Kpomassè). Avec cette brigade, nous tenons des séances de sensibilisation, en attirant l’attention de nos parents sur les dangers de l’utilisation des moyens non appropriés de pêche. Car, si les fretins qui devraient devenir des poissons sont ramassés, nous contribuons ainsi à l’appauvrissement de notre lac. Autant en trouver une petite quantité que d’aller un jour et de ne plus rien trouver. En tant que cadres commis pour la gestion des collectivités territoriales, nous veillons à ce que le peu qui est là soit préservé.

Des enclos piscicoles sont installés le long du lac dans la commune. De quoi retourne ce projet ?

C’est un projet que nous avons initié et qui est pratiquement à la phase de mise en œuvre. De quoi s’agit-il ? Etant donné qu’il n’y a plus assez de poissons et que c’est la pêche qui nourrit une grande partie de la communauté, nous avons pensé à l’installation des enclos piscicoles, pour l’élevage des poissons et diminuer la pression des communautés sur les ressources halieutiques. Nous en avons installé quinze au total le long du lac, afin de pallier quelque peu l’appauvrissement du lac. Sur chaque site, nous avons construit des magasins de stockage des produits qui serviront à nourrir les poissons. Leur gestion est confiée aux coopératives de pêcheurs. Les conventions de gestion sont déjà élaborées et sont en cours de relecture, après l’autorisation du Conseil de supervision. On avait souhaité que les conventions soient signées avant fin 2023. Mais c’est encore à l’appréciation des communautés à la base qui devraient nous reverser leurs observations.

Comment les populations ont-elles accueilli le projet ?

La démarche, pour l’instant, peine à prendre, à cause des conflits qui existent au sein même des communautés. Je viens d’échanger avec des représentants de trois villages à savoir Agonsa, Kpindji-Gbédji et Kpindji-Comè. Ces communautés au bord du lac sont divisées depuis plus de quarante ans. Les tentatives pour la conciliation ont échoué: les politiques ont tout essayé et cela n’a pas marché. J’ai entamé la médiation et je pense que nous sommes sur le bon chemin. J’ai commencé l’année dernière d’abord à travailler sur les préoccupations qui seraient à l’origine de la division.

Les divergences sont-elles aplanies ?

Chaque partie a dit les griefs qu’elle a contre l’autre. Après avoir recensé les problèmes soulevés, j’ai élaboré une feuille de route et de concert avec les cadres techniques, nous y travaillons.

Lors de la dernière séance d’échanges, le premier point a porté sur les recommandations et doléances formulées lors des assises antérieures avec chacune des parties. Je leur ai exposé les démarches que je mène pour résoudre les problèmes sans pour autant dire que c’est telle ou telle partie qui les a exprimés. Ensuite, j’essaie de régler chaque problème comme si c’est commun à elles toutes. Après, j’ai choisi deux sages par partie et les chefs de village pour dire ce qu’ils pensent de la démarche. Qu’est-ce qu’on observe à Bopa ? Chaque communauté se lève et délimite son territoire. C’est l’origine de la division qui a contribué à l’échec de beaucoup de projets dans ces communautés. Avec les démarches, elles ont pris l’engagement que la hache de guerre sera définitivement enterrée.

Quelle sera la suite ?

Nous allons mener des actions ensemble pour pointer du doigt les problèmes qui se posent dans ces communautés en dehors des doléances qui ont été formulées. Nous avons retenu que la première des choses à faire, c’est une journée de salubrité conjointe, pour montrer que désormais la crise est derrière nous. Nous avons souhaité que cette journée de salubrité soit organisée chaque mois. Après Agonsa, Kpindji-Gbédji et Kpindji-Comè au niveau de Bopa Centre, nous ferons le même exercice avec les communautés de Dado, Gantitomey, Possotomè jusqu’à Sèhougbato, pour leur expliquer le bien-fondé d’entretenir les berges du lac. Il importe de nettoyer et collecter les déchets que viennent déverser les ménages aux abords immédiats du lac. Plus les berges seront propres, moins le lac sera pollué par les déchets et les poissons pourront grandir plus sereinement.

Il y a aussi une prière annuelle qui se faisait dans une forêt mais qui est querellée. Nous allons œuvrer à ce qu’elle soit faite désormais de concert avec toutes les parties.

Au niveau de la mairie, nous sommes aussi en train d’initier un projet de réinstallation du couvert végétal le long du lac et qui attire les poissons. Il est question de verdir le long du lac et faciliter le renouvellement de l’écosystème à travers les mangroves, afin que les poissons puissent trouver un cadre plus agréable pour leur reproduction.

Ce n’est pas grand-chose mais nous pensons que ces actions contribueront à accompagner les actions de l’Etat qui fait assez par rapport à la réhabilitation du lac.