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Combat pour l’autonomisation: « Les femmes doivent se battre pour leurs droits mais de manière stratégique », dixit Bernadette M’PO

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Bernadette M’PO Bernadette M’PO

Activiste sociale, militante politique et assistante du secrétaire particulier de la vice-présidente du Bénin, Bernadette M’PO porte son regard sur les défis liés à l’autonomisation des femmes et la place du genre dans les sphères politique et professionnelle.

 

Par   Lhys DEGLA, le 12 mars 2025 à 10h53 Durée 3 min.
#jif 2025

La thématique de ce 8 mars 2025 suscite une forte émulation. Que vous inspire-t-elle à l’aune des réformes et avancées enregistrées dans la lutte pour l’égalité des sexes ?

À l’instar des autres années, le 8 mars est dédié à la célébration des droits de la femme. Cette année, la thématique s’appesantit sur les droits des femmes, l’égalité des chances et l’importance de l’autonomisation pour parvenir à leur pleine réalisation. Depuis plusieurs années, la communauté internationale met en avant l’autonomisation de la femme comme levier de développement des communautés et moteur du bien-être féminin.

La lutte pour les droits des femmes entraîne parfois une opposition entre hommes et femmes. Est-ce une approche nécessaire ?

Les femmes, dans leur quête de justice et de reconnaissance de leurs droits, adoptent parfois une approche ferme, ce qui peut susciter des réactions. On ne peut pas faire d’omelette sans casser des œufs. Dans une société qui ne reconnaît pas naturellement ces droits, il est essentiel de se battre pour les obtenir. Il y aura forcément des résistances, notamment de ceux qui bénéficiaient d’un système inégalitaire. Cependant, il n’est pas nécessaire d’être extrémiste ou violent. Il est possible d’opter pour des méthodes stratégiques et progressives. Nous devons tenir compte du contexte sociologique, car les changements de comportements prennent du temps.

La notion de masculinité positive est en vogue depuis quelques années. Pensez-vous que cette approche marche fondamentalement ?

Il est essentiel de mettre en avant ces hommes qui, au quotidien, soutiennent les femmes, les respectent et contribuent à leur épanouissement. Ce soutien ne doit pas seulement se manifester dans les discours, mais aussi dans les actes. Je voudrais profiter de l’occasion pour remercier infiniment mon époux qui me soutient depuis toutes ces années, qui m’accompagne, qui me booste, qui dans ses actions au quotidien me montre combien de fois il a du respect, non seulement pour ma personne, mais pour la femme. Il est très important pour les jeunes filles de savoir choisir leur conjoint. Parce que de la qualité de leur conjoint dépendra leur altitude. 

Dans vos fonctions passées et présentes, vivez-vous la stigmatisation et la discrimination d’une quelconque manière ?

Oui, j’ai été confrontée à des attitudes discriminatoires dans mon parcours. Dans certains environnements, il est évident que les femmes doivent constamment prouver leur valeur. Face à ces défis, il est crucial de connaître ses droits, de rester professionnelle et rigoureuse pour s’imposer. Dans le domaine politique, la situation est encore plus complexe. En tant que femme et jeune, je fais face à une double discrimination. Dans ma commune d’origine, Boukombé, aucune femme n’a jamais siégé au conseil communal depuis l’avènement de la décentralisation, alors que 19 hommes y prennent toutes les décisions. Ce type d’exclusion illustre les barrières que nous devons surmonter.

Quel message souhaitez-vous adresser aux femmes au regard des obstacles qui peuvent s’ériger sur leur chemin ?

Les femmes ne doivent pas se décourager. La lutte pour leurs droits est un combat de longue haleine qui nécessite persévérance et détermination. Nous devons poursuivre les efforts de celles qui nous ont précédées et continuer à revendiquer et occuper notre place dans tous les domaines de la société.

Selon vous, est-ce que les réformes et lois en faveur des femmes au Bénin ont-elles réellement amélioré les conditions de la femme ?

Je pense que la situation de la femme a évolué même si elle n’évolue pas au rythme que nous aurions souhaité, il faut reconnaître ce qui est fait. L’Institut national de la femme se penche sur le bien-être de la femme et défend ses droits. Nous avons aujourd’hui la vice-présidence de la République qui est occupée par une femme qui est également la grande chancelière de l’Ordre national. Du côté du Parlement, nous avons aujourd’hui 29 femmes qui siègent. Ce n’est pas infime quand on compare au passé où on fluctuait entre quatre ou cinq femmes. Sur le plan économique, nous avons de plus en plus de femmes entrepreneures à qui sont octroyés des microcrédits pour les propulser. Ce sont des efforts qu’il faut reconnaître. Néanmoins, nous ne pouvons pas dormir sur nos lauriers. La femme elle-même, en tant qu’actrice, doit continuer le combat, saisir les opportunités aussi minces qu’elles puissent paraître et travailler résolument. Lorsqu’une femme fait correctement son travail, cela suscite déjà le respect, l’estime et la confiance en soi.