La Nation Bénin...
Alors gardien d’une école
privée à Porto-Novo, Kouessi Hounnou a profité de son statut pour abuser, en
2017, d’une écolière encore mineure dudit établissement. Devant la Cour de
répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) ce lundi 12 février,
l’accusé a écopé d'une peine de 25 ans de réclusion criminelle.
Chaque journée avec un
récit de viol devant la Cour de répression des infractions économiques et du
terrorisme (Criet), statuant en matière criminelle et en premier ressort, sur
des infractions commises à raison du sexe des personnes et protection de la femme.
Le sixième dossier inscrit au rôle de cette session criminelle, la première de
la Criet au titre de l’année judiciaire 2023-2024, a connu, ce lundi 12
février, d’une affaire de viol sur mineure de 12 ans, alors écolière en classe
de Cours moyen deuxième année (Cm2) dans un établissement scolaire privé à
Djégan-Daho dans la commune de Porto-Novo.
Le sieur Kouessi Hounnou
était dans le box des accusés. Il était le gardien de l’école, au moment des
faits, en mai 2017. L’accusé est aujourd’hui âgé de 48 ans et paraît
physiquement plus vieux que son âge. Il est un homme très effilé et de teint
noir. Kouéssi Hounnou ne parle pas français. Il demande à la cour de céans de
lui permettre de s’exprimer en langue locale fon.
A la barre, l’inculpé n’a
pas fait perdre du temps à la cour. Il a reconnu les faits de viol sur mineure
de moins de 13 ans mis à sa charge; conformément à ses déclarations tant à
l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur où il est passé aux
aveux. La victime était présente hier à l’audience avec son père. Lors de
l’instruction du dossier, l’accusé avait soutenu avoir abusé de la fille, deux
fois de suite. Mais confondu par la suite avec les déclarations antérieures de
la victime versées au dossier, il finit par reconnaître avoir commis l’acte
ignoble cinq fois. Les différents rapports sexuels ont eu lieu dans la cabane
du gardien sise dans l’enceinte de l’école. Pour parvenir à avoir facilement la
victime, l’accusé, « tonton gentil », fait savoir qu’il donne régulièrement à
la victime des pièces de 100 F Cfa et parfois des biscuits. Kouessi Hounnou
tient l’acte sexuel avec la fille pendant la récréation ou parfois à la sortie
des classes. Les débats permettent d’arriver à la conclusion que la victime
n’est pas la seule écolière qu’il soumet à des abus sexuels. Il serait
coutumier des faits. Il y a plusieurs filles de la même tranche d’âge que
l’accusé appâte avec des jetons dans le vil dessein d’abuser d’elles par la
suite. Pire, les rapports sexuels avec la victime étaient, toutes les cinq
fois, non protégés. Mais comment a-t-il fait pour que la fille ne soit pas
tombée enceinte de lui ? A cette question du président de la cour de céans,
Christelle Adonon, l’accusé affirme qu’il prend soin toujours de ne pas
éjaculer dans le vagin de la fille. Il dépose le sperme au dehors.
Aveu de culpabilité
Mais comment se sentait la
fille, surtout lors de la première conjonction sexuelle ? A cette question,
l’accusé est resté silencieux. Il a baissé la tête avant de lâcher, quelques
minutes plus tard, qu’il ne se souvient plus si la fille avait eu mal ou pas
lors de l’acte sexuel. Mais il dit n’avoir pas eu de difficulté à la pénétrer.
Avait-il conscience de
l’âge mineur de la fille ? Kouessi Hounnou répond par l’affirmative à cette
question de la cour. Il estime l’âge de la fille entre 13 et 14 ans. La victime
avait pratiquement le même âge que sa fille aînée, poursuit l’accusé dans sa
réponse à la cour. Aurait-il apprécié qu’un homme de son âge fasse à sa fille
l’acte qu’il a commis ? Il répond par la négative. Il ne va pas apprécier et
exigera qu’on châtie ce dernier, a ajouté Kouessi Hounnou, avant de demander à
la justice de lui pardonner pour cette faute pour laquelle, il a déjà passé
bientôt sept ans en prison.
Présente à l’audience avec
son père, la fille a narré à la cour les circonstances dans lesquelles son
bourreau a tenu les rapports sexuels avec elle. Mais toutes les fois, elle n’a
rien dit à la maison parce qu’elle avait peur de l’accusé qui l’a toujours
menacée de lui faire du mal si elle informait ses parents. Aujourd’hui, la
fille ne fréquente plus. Elle a abandonné l’école en classe de seconde juste
après l’obtention du Brevet d’études du premier cycle (Bepc).
Karamatou Sanni,
représentant le ministère public, a rappelé les dispositions légales qui
punissent les faits de viol sur mineure de moins de 13 ans. Il s’agit de
l’article 553 du code pénal, de l’article 3 de la loi portant prévention et
répression des violences faites aux femmes et de l’article 345 de la loi
n°2015-08 du décembre 2015 portant code de l’enfant. Le ministère public
indique qu’il y a viol lorsque le rapport sexuel a été fait sans consentement
intelligent et éclairé de la victime. En l’espèce, il s’agit d’une mineure de
12 ans et donc qui n’a pas de consentement pour un acte sexuel. Le consentement
n’aurait aucun effet même si la victime avait marqué son accord pour les cinq
rapports sexuels que l’accusé a eus avec elle. L’on retient malgré tout qu’il y
a pénétration sexuelle et absence de consentement de la victime, requiert
Karamatou Sanni, pour montrer que le crime de viol sur mineure de moins de 13
ans est constitué à tous égards à l’encontre de l’accusé Kouéssi Hounnou. Le
nombre de fois où les rapports sexuels ont été tenus importe peu. L’âge mineur
de la victime montre à suffisance sa vulnérabilité. Au nom de la société
qu’elle représente, Karamatou Sanni requiert à la cour de condamner l’accusé à
20 ans de réclusion criminelle et au payement d’un million F Cfa à titre de
dommages-intérêts à la victime pour toutes causes de préjudices confondus.
Kouessi Hounnou devra payer le franc symbolique à l’Institut national de la
Femme (Inf), propose le ministère public. Ce serait, aux yeux de la magistrate
Karamatou Sanni, une manière de faire justice à la fille non pas seulement pour
le crime de viol dont elle a été victime mais aussi pour les conséquences
présentes et futures de l’acte qu’elle a subi. La fille et l’Inf, tous deux,
constitués parties civiles, ont été défendus par Me Pierre Mèhoué.
Avocat de la défense, Me
Marcel Hounnou qui a, par coïncidence, le même patronyme que l’accusé, a
imploré la clémence de la cour. Il a demandé à la cour, aux différentes
victimes ainsi qu’à toute la société, de pardonner son client qui a reconnu son
tort. L’avocat au barreau de Cotonou évoque des circonstances atténuantes
notamment l’aveu de l’accusé qui, depuis le début de la procédure, n’a pas
cherché à perdre du temps à la cour, et sa coopération pour la manifestation de
la vérité.
Après en avoir délibéré,
la cour retient l’accusé coupable du crime de viol sur mineure de moins de 13
ans. Elle condamne Kouessi Hounnou à 25 ans de réclusion criminelle. L’accusé a
été condamné à payer deux millions F Cfa à titre de dommages-intérêts à la
victime et le franc symbolique à l’Inf. La cour n’a pas suivi les réquisitions
du ministère public qui proposait une peine moindre. En détention depuis le 16
mai 2017, Kouessi Hounnou poursuivra son séjour carcéral pendant encore un peu
plus de 18 ans.
Les faits
Le vendredi 5 mai 2017, la
fille dont nous taisons le nom, élève dans une école primaire privée sise à
Djégan-Daho à Porto-Novo, rentrait à la maison lorsque Kouessi Hounnou, gardien
dudit établissement, l’appela, la fit entrer dans sa chambre, la déshabilla
puis entretint un rapport sexuel avec elle comme ce fut le cas des jours plus
tôt. A la suite de cet acte plusieurs fois répété, il lui offre de l’argent et
des présents.
Composition de la cour
Président : Christelle Adonon
Assesseurs : Geneviève Sohou et Elias Guidi
Ministère public : Karamatou Sanni, 4e substitut du procureur spécial
près la Criet
Greffe : Sidikatou Soumanou-Biga