Éditorial de Paul AMOUSSOU : Faire le cerveau de l’autruche
Actualités
Par
Paul AMOUSSOU, le 08 avr. 2022
à
14h25
L’épisode de la pandémie de Covid-19 a révélé au monde entier qu’il n’est pas à l’abri d’une mauvaise surprise, devant mettre en péril sa stabilité. Avertissement que le monde, une fois sorti de son état de frayeur, a vite oublié, car il est retourné à ses avatars et nous voici déjà dans une autre frayeur avec la guerre en Ukraine. Petite frayeur ?
Pour ceux qui se demandent encore en quoi cette guerre impacte le monde entier, pour éclairer leur lanterne, disons que dans le monde d’aujourd’hui ‘’tout est dans tout’’, tout se tient selon la logique fatale de ‘’l’effet papillon’’ : petite cause, grandes conséquences. Ainsi donc, les prix des produits de première nécessité flambent, du fait de ce conflit dont le monde aurait pu faire économie. A défaut, ce sont nos économies qui partent en vrille, car les carburants (sans lesquels le monde ne tourne pas rond) et le blé (base alimentaire à bien des égards) ne sont pas loin de devenir, comme on dit trivialement au Bénin, ‘’peau des fesses de belle-mère’’, c’est-à-dire rares ! C’est une question de temps, pour que cette rareté se conjugue au présent.
De la pandémie de Covid-19 à la guerre en Ukraine avec ses conséquences économiques mondiales, guerre qui s’est substituée à la crise sanitaire sans personne pour jurer qu’elle est vraiment finie, une prise de conscience s’impose aux pays d’Afrique. Ces pays trainent en effet la lacune majeure de développer peu de stratégie, de prospection, de proactivité. Non pas forcément selon le concept hard power, mais ne serait-ce que suivant la nécessité d’anticiper les faits, et surtout de ne pas les subir en toute passivité comme il est de leur habitude, faisant le cerveau de l’autruche pour ne pas dire la politique de l’autruche.
Le cerveau de l’autruche ici s’assimile à l’absence chronique de lobbies, de think tank, d’instituts de recherches stratégiques, autant en matière géopolitique qu’en intelligence économique. Aussi, subissons-nous les faits sans toutefois en tirer les grands enseignements pour se repositionner. Quitte à penser l’avenir, anticiper les chocs exogènes…En l’occurrence, comment ne pas prendre en pleine gueule la prochaine pandémie, qui par définition ne peut être qu’imprévisible? Que faire pour se soustraire aux aléas liés aux fluctuations des prix des hydrocarbures et des céréales ? Quelle politique d’importation et pour quels produits ? Quelles cultures prioriser et à quelles fins ? Les programmes de gouvernement, davantage conjoncturels sous nos cieux que futuristes, ne sauraient à eux seuls suffire. Croire le contraire, ce serait s’incliner à faire le cerveau de l’autruche.