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Election du bureau de l’Assemblée nationale: Come-back d’Adrien Houngbédji sur fond de combat de génération

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Par   LANATION, le 20 mai 2015 à 04h01

Si le suspense a duré jusqu’au petit matin de ce jour, avant que le nom du président de l’Assemblée nationale 7e législature soit connu, c’est que les tractations et autres guerres de positionnement auront été rudes. D’un côté comme de l’autre. A l’arrivée c’est la coalition des forces de l’Opposition qui rafle la mise d’une courte tête. Un triomphe modeste en somme, mais qui révèle combien la partie fut serrée.

A la lecture des candidatures enregistrées aux différents postes du bureau de l’Assemblée nationale, il était loisible de constater que les partis se réclamant de l’Opposition ont fait l’effort de réaliser une large coalition. Ainsi, en dehors du parti Résoatao qui a eu un député, tous les autres sont représentés dans le schéma de l’Opposition à raison d’un poste pour chacun et deux pour l’Union fait la Nation qui, avec 13 élus, a drainé le contingent le plus important de députés. Le schéma renseigne même que cette alliance, dans la répartition des postes qui lui revenaient, a tenu compte des ambitions de ses militants originels comme des alliés. C’est ainsi que Claudine Prudencio peut obtenir le poste de premier secrétaire parlementaire, pendant qu’Eric Houndété monte en grade dans l’hémicycle en passant premier vice-président. Pourtant, ce ne fut pas gagné d’avance car les conflits d’intérêts ont été gérés jusqu’au dernier moment, certains partis membres de la coalition exigeant tel ou tel poste et mettant parfois en difficulté l’ensemble. C’est dire que si l’Opposition s’en tire à bon compte, c’est non sans esprit de renoncement, souci de cohésion et, il va sans dire, volonté de prendre une revanche sur les forces de la Mouvance présidentielle qui, ces dernières années, leur ont si souvent infligé des débâcles électorales.

Ces forces, et c’est le constat qui se dégage du vote, quoiqu’ayant réussi à ratisser quelque peu large, n’auront pas assez pris en compte les intérêts immédiats des alliés qui leur permettaient de réaliser un accord de législature leur garantissant la majorité parlementaire. En effet, un coup d’œil à leur schéma permet de remarquer qu’il avait une forte dominante FCBE, cette alliance s’octroyant 5 postes sur les 7 en jeu, et ne laissant que deux à ses alliés de l’Union pour le Bénin et de l’Alliance Eclaireur en les personnes de Lucien Houngnibo et Edmond Agoua. Ceci n’aura donc pas suffi à leur procurer le résultat recherché. Mais à l’évidence, il y avait le souci de ne pas dévoiler leurs cartes tout de suite, pour laisser savoir à l’adversaire, quelles étaient les personnes démarchées dans son camp.

Un combat de génération et… des interrogations

Komi Koutché aurait été sacré président de l’Assemblée nationale que cela en rajouterait indubitablement à l’éclat de son parcours politique. Jeune, décidé, il en impose par son sens pratique et sa vista politique qui lui auront permis de gravir bien vite les échelles de l’ascension en si peu de temps. Une ascension fulgurante qui l’a conduit d’abord à la tête du Fonds national de Microfinance d’où il a dû engranger de précieux points pour devenir, cinq ans après, un des collaborateurs privilégiés du chef de l’Etat. A 38 ans, c’est un réel challenge qu’il s’est lancé, ainsi qu’à la classe politique, en réussissant à se faire désigner candidat de la Mouvance présidentielle pour le perchoir. Il aurait réussi à se faire élire que ce serait la première fois, depuis 1991, que le Parlement tomberait aux mains d’un aussi jeune président. De plus, son élection aurait été un cas d’école. Sachant qu’en tant que président de l’Assemblée nationale, il pourrait être amené à assumer l’intérim du chef de l’Etat en cas de vacance du pouvoir exécutif, alors qu’il n’aura l’âge plancher pour accéder normalement à la fonction présidentielle qu’en 2016, cela devrait amener à s’interroger aujourd’hui sur la pertinence de cette disposition constitutionnelle. Dans tous les cas, c’est déjà une belle victoire pour la jeunesse d’avoir osé ce combat, d’avoir défié les normes établies jusqu’ici et ce, en faisant sensation ; puisque la différence n’aura été faite qu’à une voix près. C’est dire que la partie ne fut pas aisée pour le vainqueur Adrien Houngbédji.
Celui-ci, à 73 ans, fait un come-back à la tête du Parlement béninois qu’il a déjà dirigé par deux fois (1991-1995, 1999-2003). 73 ans, c’est littéralement le double de l’âge de son challenger. Ce qui confirme le combat de génération. En se faisant élire au petit matin de ce jour, c’est un nouveau record qu’établit Adrien Houngbédji, celui d’être le premier à égrener trois mandats à la tête de l’Assemblée nationale après avoir déjà été le premier à effectuer deux mandats.
A son propos aussi se pose une question. A 73 ans, Adrien Houngbédji n’aurait pas pu briguer la magistrature suprême mais en redevenant deuxième personnage de l’Etat, il est un président de la République intérimaire en puissance. Certes, s’il accédait au pouvoir à 69 ans ou un peu moins de 70 ans, il aurait été aux affaires jusqu’à 75 ans environ. Là-dessus, il faut aussi s’interroger sur la pertinence, aujourd’hui encore, des dispositions de l’article 44 de la Constitution qui prévoient, entre autres, que «Nul ne peut être candidat aux fonctions de président de la République s’il n’est âgé de 40 ans au moins et 70 ans au plus à la date de dépôt de sa candidature».