La Nation Bénin...
Le
Bénin a franchi des paliers en matière de production agricole et
d’autosuffisance alimentaire. Des résultats encourageants sont notés dans
divers secteurs. Toutefois, la conjoncture liée à la cherté des denrées, a
entraîné des mesures visant à protéger mais aussi à booster la production
locale.
«
C’est une décision formidable, parce que cette cherté des denrées que nous
vivons ne nous honore pas», s’est réjoui Imorou Saka Kora, président de
l’Association des producteurs du Bénin. Il va ajouter: « Il fallait une mesure
forte. Si nous prenons le cas du soja pour lequel, on entend dire que le Togo
est meilleur producteur, alors que beaucoup de produits sortent du Bénin vers
ces pays ; c’est dangereux. Le maïs va au Nigéria, au Togo, au Niger, et nous
allons rester affamés dans notre pays. Ce n’est pas normal ». En effet, le
ministère du Commerce a fait le constat d’une exportation informelle et
massive, de produits vivriers béninois, notamment le maïs, en direction des pays voisins. Selon les chiffres définitifs de
la campagne 2023-2024, 2 050 000 tonnes de cette
céréale sont produites pour des besoins nationaux évalués à un million de
tonnes. Mais la forte pression exercée sur ce produit, du fait de ces trafics
incontrôlés, a entraîné une envolée des prix sur les marchés. De nombreux
producteurs et commerçants sont portés à satisfaire les demandes en produits
vivriers venant de pays étrangers au détriment du marché national. C’est
pourquoi, a indiqué le gouvernement, dans le but d’assurer la disponibilité des
produits à un coût raisonnable pour ses citoyens, le Conseil des ministres,
après avoir évalué et apprécié la situation, a décidé d’interdire
temporairement depuis le 8 mai dernier, et ce jusqu’à nouvel ordre, toute exportation de céréales : maïs, riz,
mil, sorgho, niébé, etc, de même que des
tubercules et leurs dérivés : farines dont le gari, etc.
Des devises sécurisées
« Si cette décision n’était pas prise, ce serait la misère… », soutient Imorou Saka Kora, président de l’Association des producteurs du Bénin, qui salue également la subvention sur les intrants, pour les rendre accessibles aux acteurs. S’il est vrai que dans un contexte de libéralisme économique, c’est l’offre et la demande sur les marchés qui déterminent les prix et que la libre circulation des biens est admise dans l’espace communautaire, il n’en demeure pas moins que le phénomène prend une ampleur telle que le consommateur béninois en subit les conséquences, a expliqué le gouvernement pour argumenter sa mesure d’interdiction.
«
C’est pour qu’on réduise les fuites de devises pour l’Etat et les sorties
frauduleuses de nos produits vers les pays environnants d’autant que le
gouvernement a injecté des ressources à travers la subvention des engrais et
des intrants », fait savoir Kolawolé Achille Oniloude, directeur général de
l’Agence territoriale de développement agricole Borgou Sud-Donga-Collines, en
charge de la promotion des filières anacarde, manioc et soja en priorité. Il
ajoute : « Il faudrait que déjà au niveau national, on puisse sécuriser la
disponibilité en vivriers que d’attendre les fuites et de constater le déficit
avant de se mettre à courir. Ces mesures vont nous permettre de stabiliser un tant soit peu,
la production au niveau national, et permettre à la population de disposer en temps réel de
la quantité de vivriers dont elle a besoin ». Mais au-delà de ces mesures, Imorou
Saka Kora, président de l’Association des producteurs du Bénin, souhaite
qu’après la fermeture de l’Office national de sécurité alimentaire (Onasa), que
le gouvernement mette en place une autre structure à même d’approvisionner les
populations afin de mieux gérer les cas de soudure. «Ainsi, au besoin, le
dernier paysan qui n’a plus de vivres peut aller s’y ravitailler », a-t-il
déclaré. En effet, l’autosuffisance alimentaire est un des défis majeurs de ces
dernières années notamment avec la crise sanitaire mondiale du coronavirus et
le contexte géopolitique marqué par la recrudescence des conflits. Au Bénin, qui a l’une des économies
les plus résilientes en Afrique de l’Ouest, le secteur agricole fait des
progrès. Mais en dépit des résultats élogieux obtenus, des mesures
structurelles permanentes sont à mettre en œuvre pour juguler les crises
récurrentes liées à la sécurité alimentaire.