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Lâchers d’eau du barrage de Nangbéto: La Ceb éclaire et situe les communautés riveraines

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Les communautés rivéraines du fleuve ont été situées ... Les communautés rivéraines du fleuve ont été situées ...

Le barrage de Nangbéto est bien souvent indexé pour être à l’origine des inondations observées dans les localités riveraines du fleuve Mono, après l’ouverture des vannes de l’infrastructure. Lors d’une visite guidée du barrage, le 7 octobre dernier, la Communauté électrique du Bénin (Ceb) a fait la part des choses et sollicité le concours des élus locaux pour transformer cette situation en opportunité.  

Par   Arnaud DOUMANHOUN, le 13 oct. 2023 à 08h42 Durée 8 min.
#Lâchers d’eau du barrage de Nangbéto #La Ceb

Les pluies diluviennes de ces dernières années, dues aux changements climatiques, sont à l’origine du remplissage précoce du barrage de Nangbéto. La Communauté électrique du Bénin (Ceb) procède alors à des lâchers d’eau pour réguler le trop-plein, afin de préserver l’ouvrage. Un phénomène qui est mal interprété par les populations riveraines, qui l'accusent d’être la cause de leur malheur, en raison des inondations qu’entraîne l’ouverture des vannes.

« Les arrivées d’eau ne respectent plus leur périodicité alors qu’un barrage est construit pour stocker une quantité d’eau maximum donnée. Ceci entraîne des inondations en aval du fleuve Mono. Nous avons donc décidé d’apporter notre pierre aux efforts des deux gouvernements pour juguler ces inondations qui arrivent de manière cyclique », a expliqué Dammipi Noupokou, directeur général adjoint de la Ceb, à l’occasion de la visite des installations de la centrale hydroélectrique. En effet, l’institution dans sa quête de solutions pérennes envisage d’organiser un atelier pluri-acteurs pour une démarche de résilience aux inondations cycliques des zones situées en aval du Mono jusqu’à l’embouchure. C’est en prélude à cet atelier que la Communauté électrique du Bénin a organisé la visite guidée à Nangbéto au profit des autorités administratives, des élus locaux et de quelques représentants des populations des zones concernées. La Ceb leur a expliqué le fonctionnement du barrage et a relevé les opportunités qu’ils peuvent tirer de l’eau, surtout en ce qui concerne les activités piscicoles. Cette visite a permis aux participants notamment les maires des localités (du Togo et du Bénin) affectées par le phénomène, les préfets et les autres acteurs, de toucher du doigt les réalités de fonctionnement du barrage de Nangbéto, les potentialités du site et de mieux comprendre le rôle important de ce barrage dans la régulation des eaux du fleuve. 

Le rôle de régulateur

Dans son fonctionnement, le barrage de Nangbéto stocke l’eau du fleuve Mono, aux fins de la production de l’énergie électrique au profit du Bénin et du Togo. La quantité d’eau stockée est répartie sur toute l’année à travers les déversoirs de l’installation, aidant par ailleurs les populations riveraines à traverser la période de sècheresse. Mais en raison des changements climatiques, la quantité d’eau arrivant au niveau de la centrale hydroélectrique dépasse les 144 m3 par rapport au niveau de la mer. « Dans ce cas, nous ouvrons les vannes afin d’éviter le risque de voir le barrage emporté par l’eau. Mais la quantité d’eau qui arrive en amont est toujours supérieure à celle que nous laissons passer au niveau du barrage. C’est notre rôle de régulateur du fleuve », a déclaré Dammipi Noupokou, directeur général adjoint de la Ceb. Nangbéto est un site identifié depuis la colonisation, avec un potentiel considérable et dont l’aménagement devait servir au développement du Bénin et du Togo. Les travaux d’aménagement ont effectivement démarré en 1985 et en 1987, les premiers Kwh sont mis sur le réseau au bénéfice des deux Etats. C'était Eyadéma Gnassingbé du Togo et Mathieu Kérékou du Bénin, qui ont inauguré l’ouvrage en 1988. Les participants à la visite guidée organisée par la Ceb ont eu droit à un petit cours d’histoire, juste au pied de la pierre inaugurale, située au-dessus de l’ouvrage d’où l’on observe les déversements des vannes. Trois objectifs ont guidé la mise en place de cette centrale hydroélectrique à savoir une production d’électricité de 150 millions de Kwh/an ; la régulation partielle, étant entendu qu’un seul barrage ne peut réguler huit cours d’eau, y compris le fleuve Mono dont les crues ont entraîné, par le passé, des dommages dans la commune d’Athiémé au Bénin ; et dans la préfecture de Yoto au Togo. 

Des opportunités à saisir

A juste titre, le barrage devrait empêcher les crues avec la retenue d’eau pour la production de l’énergie électrique, la production agricole et la pêche, en vue de soulager les populations rurales. « L’objectif était de bloquer l’eau et de la faire passer en quantité raisonnable », a insisté Pascal Kpangon, directeur de la centrale, expliquant que l’aménagement hydroélectrique de Nangbéto est essentiellement composé d’un lac artificiel appelé retenue ou bassin d’accumulation, d’une centrale électrique de production de l’énergie électrique, d’un poste haute tension d’évacuation de l’énergie, d’une station de traitement d’eau potable et d’une station de traitement des eaux usées, des bureaux et des cités d’habitations. Il fait savoir aux représentants des populations affectées par les inondations, que le réseau hydrographique du bassin comprend huit cours d’eau dont trois en amont : Mono, Ogou, Anié et cinq en aval : Amou, Asrama, Klikon, Khra, Lahiouzon. La retenue créée par le barrage régule les apports naturels du fleuve Mono permettant ainsi de développer l’agriculture irriguée dans la plaine en aval, et d’améliorer sa protection contre les inondations.

« Le barrage de Nangbéto ne gère que les cours d’eau en amont. Si les 5 fleuves d’en bas sont en crue, les populations recevront de l’eau et diront que c’est du fait du barrage. Ce qui n’est pas exact. En ce qui concerne le barrage, le débit dont nous avons besoin pour produire de l’électricité est de 240 m3/s mais le fleuve Mono en apporte plus de 1000. C’était 1500 en 2022 et 1800 cette année… », a clarifié Pascal Kpangon, directeur de la centrale, assurant que pour la production de l’énergie, aucun additif n’est ajouté à l’eau ni en amont ni en aval. Les visiteurs du barrage de Nangbéto, propriété de la Communauté électrique du Bénin (Ceb), ont également eu accès à la salle des opérations du barrage. « Aujourd’hui, la population a compris. Depuis le 23 août, nous sommes en train de laisser passer de l’eau ; pourtant elles ne sont pas inondées parce que les autres fleuves en aval de Nangbéto ne sont pas en crue. Nous voulons ensemble, trouver des résiliences aux inondations. Après l’étape de la visite, il y aura un atelier de réflexion pour trouver des moyens à court et long termes pour lutter contre le fléau », fait savoir Pascal Kpangon. Il a aussi invité les populations à connaître la limite du fleuve, qui a un lit mineur pour son écoulement normal, et un lit majeur qu’il emprunte lors des crues. En termes d’opportunités à saisir à la survenance des inondations, la Ceb invite les élus locaux à adopter une démarche de résilience, qui leur permettra de développer des activités agricoles, surtout piscicoles avec les eaux en provenance du barrage, à l’instar de ce qui se fait à Lofty à Nangbéto. Dammipi Noupokou, directeur général adjoint de la Ceb, va rendre hommage aux présidents Patrice Talon et Faure Gnassingbé, qui ne ménagent aucun effort pour la sécurité de leurs peuples respectifs, en faisant intervenir les institutions de leurs pays, à chaque fois que de besoin, pour assister les populations lorsque les vicissitudes de la nature entraînent des désagréments importants. « Nous les remercions pour les travaux d’aménagement entrepris pour amoindrir les effets des inondations », a déclaré Dammipi Noupokou.

Un site témoin de production de poissons

On constate l’installation d’entreprises de production de poissons sur le site du barrage hydroélectrique de Nangbéto situé à plus de 200 km de Lomé, la capitale togolaise. La plus grande unité de production demeure Lofty avec une capacité de 7 tonnes de poissons tilapias par jour. Des apprenants diplômés de l’Institut de formation en alternance pour le développement (Ifad) aquaculture sont également installés sur le site. Sur le site de Lofty, les bassins d’eau ou cages d’élevage sont à perte de vue. L’élevage de poisson se fait à partir de la reconstitution de l’environnement naturel de l’animal avec des apports d’oxygène, de la nourriture. Des larves aux gros poissons en passant par les alevins, un cycle de production peut durer environ six mois, et le poids du poisson destiné à la vente varie de 450 à 500 kg. « Nous avons mis des années à avoir des cages flottantes pour élever des poissons sur le lac artificiel. Les poissons naturels dans l’eau, il n’y en a pas toujours, il faut en élever. Il faut que nous essayions ensemble de créer un microclimat autour de ce lac pour que les temps à venir ne viennent pas nous surprendre; la sécheresse devenant un peu plus longue, et la chaleur plus intense », a déclaré Akakpo Edoh, préfet de l’Ogou au Togo. Pour lui, il faudra ériger d’autres barrages pour mieux répondre aux besoins en énergie électrique du Togo et du Bénin. Saturnin Cocou Dansou, maire de la commune d’Athiémé, ne souhaite pas mieux et plaide pour un accompagnement de la Ceb au profit des communautés affectées, en l’occurrence pour l’électrification desdites zones. A l’en croire, sa commune est la première à subir les inondations, entraînant la destruction des cultures et des infrastructures sociocommunautaires dès l’ouverture des vannes à Nangbéto. Mêmes doléances du côté du maire de la commune de Dogbo. « Nous devons encourager les autorités de la Ceb à continuer d’imaginer toutes les formes de solutions à apporter à la durabilité de ce lac artificiel. Nous croyons qu’ensemble, à travers cette visite, nous avons vu les difficultés qui existent et les opportunités à saisir », a indiqué Akakpo Edoh, préfet de l’Ogou au Togo.