La Nation Bénin...
Les députés ont démarré hier lundi 12 janvier, l’examen du rapport de la commission parlementaire d’enquête, d’information et de contrôle de la gestion du Fonds d’appui au développement des communes (FADeC). Un rapport volumineux qui met à nu la mauvaise gestion des ressources financières par les collectivités locales. En réaction, les députés recommandent vivement la nécessité d’une part de marquer une pause pour évaluer le processus de décentralisation au Bénin, et d’autre part d’amener les agents et maires indélicats devant les tribunaux.
Le rapport de la commission parlementaire d’enquête, d’information et de contrôle de la gestion du Fonds d’appui au développement des communes (FADeC) examiné hier par les députés est sans appel. Les fonds qui étaient destinés à la réduction de la pauvreté dans les communes sont dilapidés par certaines collectivités locales. En tout cas, le rapport a révélé que le gros des fonds va dans les poches des maires et autres agents communaux. A en croire le rapport exposé par la commission présidée par le député Félicien Zacharie Chabi, de 2008-2012, la rondelette somme de 82 milliards de FCFA a été mise à la disposition des communes par le gouvernement pour le compte du FADeC. 55% de ces fonds ont servi à payer les indemnités et les salaires aux maires et consorts, révèle le rapport qui rend compte de l’état des lieux dans chacune des 77 communes du Bénin. Lequel rapport a relevé plusieurs autres tares dans la gestion de ces crédits. Au nombre de celles-ci, il y a la non maîtrise du manuel de procédure relatif à la passation des marchés, le manque de qualification des gestionnaires de ces fonds constaté dans la plupart des communes, l’inexistence de relevés bancaires des communes, la disparité entre le point financier de gestion des maires et celui des receveurs percepteurs de la mairie. Aussi, le rapport constate-t-il, la surfacturation de certains ouvrages réalisés et équipements acquis sur les FADeC, plusieurs chantiers abandonnés, le délit d’initié surtout dans la passation des marchés, le favoritisme, le népotisme et l’inexistence d’un système d’archivage des documents financiers ainsi que l’inappropriation dans la plupart des cas des dépenses du FADeC avec les besoins de développement des populations. Il est plus que jamais impérieux que la gestion du FADeC qui représente entre 11 à 45% des prévisions des communes, se fasse dans la rigueur pour la réduction de la pauvreté au Bénin, conclut la commission parlementaire composée de dix membres. Le rapport n’a pas manqué de faire à cet effet quelques recommandations à l’endroit principalement des collectivités locales, et ensuite aux préfets des départements qui assurent la tutelle des maires, au gouvernement notamment au ministre en charge de la Décentralisation et son collègue chargé de l’Economie et des Finances. Les recommandations ont été également faites à la Commission nationale des finances locales (CONAFIL), à l’Assemblée nationale et à l’Inspection générale d’Etat pour que chaque acteur joue son rôle pour sonner le glas des ces dysfonctionnements dans les communes et permettre à l’atteinte des objectifs de la décentralisation.
Halte au pillage !
Dans leur intervention, tous les députés ont salué la qualité du rapport exposé par le rapporteur de la commission, le député Raphaël Akotègnon. L’honorable Daouda Takpara souhaite que d’ici à trois ans, qu’il y ait une autre commission parlementaire pour évaluer la mise en œuvre des recommandations faites par les députés. Son collègue Ali Camarou s’est dit scandalisé par le niveau de la mauvaise gestion des ressources publiques dans les communes surtout à statut particulier. Il a dénoncé un cas de deux kilomètres de pavé réalisés dans une commune à statut particulier à 3,9 milliards FCFA. La même déception sera partagée par Candide Azannai qui qualifie de calamiteux le profil des gestionnaires de ces crédits. Il accuse les structures de contrôle du ministère de l’Economie et des Finances dont l’Inspection générale des Finances de même que l’Inspection générale de l’Etat qui devraient veiller à la bonne exécution des fonds par les collectivités locales. «La décentralisation s’apparente à la décentralisation des tares de l’Etat central», constate Candide Azannaï avant de dire son pessimisme par rapport à la mise en œuvre des recommandations pertinentes faites par les députés pour voir le tir se corriger dans la gestion de ces ressources.
Et au député Babatundé Kakpo de s’inquiéter, au regard de l’ampleur des malversations financières, pour le transfert des ressources aux communes réclamé à cor et à cri par les maires.
Hélène Kèkè Aholou a dénoncé un cas de mauvaise gestion à Avrankou. Elle a révélé le cas du dispensaire de l’arrondissement de Ouanho mentionné dans le rapport de la commission comme ayant été construit grâce aux FADeC alors que ledit centre sanitaire était déjà réalisé des années avant l’avènement de ces fonds en 2008. Elle supplie ses collègues députés pour que le Parlement fasse quelque chose pour arrêter la saignée sur le terrain. Hélène Kèkè Aholou a insisté sur l’urgence pour l’institution parlementaire de poursuivre devant les tribunaux les maires indélicats qui ont détourné les fonds FADeC.
Grégoire Akoffodji, membre de la commission parlementaire, insiste pour recentrer le contexte de la mise sur pied de la commission d’enquête parlementaire. Selon lui, celle-ci a été mise en place dans le souci de l’amélioration de la gouvernance locale.
Présent aux travaux, le ministre en charge de la Décentralisation Isidore Gnonlonfoun s’est félicité de l’expertise et la méthodologie du rapport. Il a salué l’objectif de la commission d’enquête parlementaire qui vise à améliorer la qualité de la gestion des ressources du FADeC. Par rapport aux inquiétudes de certains députés, il dit avoir saisi l’Inspection générale d’Etat pour contrôler désormais la gestion de ces fonds.