La Nation Bénin...
La
décision du gouvernement d’octroyer la nationalité béninoise aux
Afrodescendants par reconnaissance se concrétise. Les modalités de sa mise en
œuvre ont été précisées dans un décret pris en Conseil des ministres, mercredi
20 novembre.
Tout
est allé très vite dans le processus de reconnaissance de la nationalité
béninoise aux Afrodescendants. Après le vote de la loi par les députés à
l’Assemblée nationale, le président de la République vient de prendre le décret
d’application subséquent. Cet acte règlementaire vient clarifier la procédure
d’obtention de la nationalité béninoise par reconnaissance suivant les cas et
la position du demandeur. Selon que le requérant fait la demande depuis le
Bénin ou l’étranger, le mécanisme d'obtention diffère.
Lorsque
la demande est formulée depuis l’étranger, le demandeur reçoit au terme de
l'examen favorable de celle-ci une attestation provisoire de nationalité d'une
durée de validité de 3 ans. Le bénéficiaire jouit dès lors du droit d'entrée,
de séjour et de sortie du territoire du Bénin. La nationalité béninoise par
reconnaissance ne lui est acquise à titre définitif que sur justification d'un
séjour en terre béninoise dans ce délai de trois ans.
L'attestation
provisoire de nationalité devient caduque si au terme de sa validité le
demandeur n'a pas séjourné au Bénin.
Lorsque
la demande est formulée à partir du territoire du Bénin et que le demandeur a
poursuivi certaines formalités consécutives à l’occasion de son séjour, il
reçoit après examen favorable de sa demande notification du décret d'octroi, à
titre définitif, de la nationalité béninoise par reconnaissance. S'il n'a pas
poursuivi lesdites formalités, il reçoit notification de l’attestation
provisoire.
Enfin, le bénéficiaire de la nationalité béninoise par reconnaissance a droit à l'établissement d'un passeport béninois. Il peut acquérir à tout moment la pleine nationalité béninoise. Celle-ci est transmissible aux descendants, ouvre la voie à la jouissance de tous les droits qui y sont attachés, mais peut être retirée dans les conditions prévues par la loi.
Selon la loi, est afrodescendant « toute personne qui, d’après sa généalogie, a un ascendant africain subsaharien déporté hors du continent africain dans le cadre de la traite des Noirs ». Mais la nationalité ne sera pas distribuée à tout va. Il faudra le démontrer. A en croire le projet de loi, « la preuve de l’afrodescendance est fournie par le demandeur au moyen de toute documentation d’état civil ou officielle, de tous témoignages constatés par acte authentique, d’un test Adn réalisé par une structure agréée au Bénin ou par tout autre moyen technique ou scientifique ».
La
nationalité acquise confère à son détenteur tous les droits et obligations y
attachés, mais elle l’exempte des droits politiques et de l’accès à la fonction
publique béninoise.
Après l’exemption de visas pour beaucoup de nationalités, le Bénin de Patrice Talon montre qu’il est un artisan réel de l’intégration africaine en même temps qu'il entre définitivement dans l’histoire en réglant de façon durable et structurelle la question de la reconnaissance des Afrodescendants.
Après la visite de Patrice Talon, président de la République, en Martinique en décembre dernier, il était normal qu’une décision de grande ampleur soit prise. Tant ce déplacement était empreint d’émotions diverses induites par ce voyage dans le passé. « Il n'y a pas d'autres mots pour le décrire que l'émotion. C'est tout. La charge émotionnelle est énorme à observer, à vivre, à venir sur les lieux où a été détenu le souverain Béhanzin, qui a été roi du Danxomè, où moi-même je suis d'ailleurs né », avait laissé entendre Patrice Talon lors de sa visite au Fort Tartenson. Le chef de l’Etat avait alors fait un bref rappel sur le personnage qui a marqué de fort belle manière l’histoire de la royauté au Bénin, voire en Afrique. Sans langue de bois, il a aussi fustigé l’impact négatif de la colonisation sur l’organisation institutionnelle traditionnelle qui était en place. « Le roi Béhanzin a été l'un des derniers souverains de grande carrure et de notoriété. Sa chute, sa déportation et sa détention ici traduisent bien comment la France a déstabilisé un royaume qui était en train de faire son chemin », avait indiqué Patrice Talon avant de faire savoir que « c'est l'histoire du monde, de l'humanité. Ce n'est pas propre à notre histoire, au Dahomey, à la Martinique, à la France. C'est un mélange d'émotions. Vous savez, il y a un peu de tristesse, sinon beaucoup pour ce qui est aujourd'hui, ici, le symbole de la fin du royaume du Danxomè ».
En dehors de cette visite, l’invitation d’une troupe brésilienne lors de la première célébration des « vodoun days » en janvier dernier était aussi un symbole d’une réconciliation avec les Afrodescendants.