La Nation Bénin...
L’Institut
national de la Femme (Inf), envisage une collaboration intersectorielle avec
différents ministères pour vaincre les violences basées sur le genre au Bénin.
Pas
de répit pour l’Institut national de la femme (Inf). Les seize jours
d’activisme contre les violences basées sur le genre riment avec
sensibilisation, engagement et exhortations à mettre un terme au fléau des
violences basées sur le genre (Vbg) au Bénin. Aussi, l’Inf en profite pour se
faire davantage connaitre du public. Mardi dernier, il était dans les locaux du
ministère de l’Enseignement secondaire, de la Formation technique et
professionnelle pour une séance de sensibilisation sur le harcèlement sexuel en
milieu de travail.
Occasion pour Flore Djinou, secrétaire exécutive de l’institut d’évoquer les prérogatives de l’Inf et de dérouler tout le protocole mis en place pour soulager les victimes des Vbg dans notre pays. « L’Inf a reçu mandat spécial d’ester en justice et d’assister les victimes devant les juridictions ordinaires et spécialisées», révèle la secrétaire exécutive. A ce titre, explique-t-elle, « il peut saisir toute juridiction pour faire valoir les droits des victimes et défendre leurs intérêts. Il peut demander réparation des préjudices subies par les victimes…. ». Flore Djinou exhorte les femmes à ne plus garder le silence sur les cas de violences. « Sans dénonciation, nous ne saurions exploiter l’instrument de recours qu’est l’Inf. Les lois existent pour tout le monde. Mais si les femmes ne le savent pas, elles continueront à penser qu’elles doivent se taire sur les violences qu’elles subissent », souligne-t-elle.
L’Intérêt
du dispositif Inf
L’Inf est un dispositif installé pour soutenir les victimes de façon optimale. Depuis son installation en 2021, il s’emploie à soigner les cœurs déchirés par les violences en redonnant joie et espoir aux victimes et à leurs familles. Les nombreux cas de violences sont loin d’émousser son ardeur.
En
2022, l’Inf a reçu deux cent quatre-vingt-dix-huit dossiers, contre mille cent
dix-sept en 2023. Au 08 novembre 2024, l’institut a enregistré mille sept cent
quatre-vingt-dix-sept dossiers dont trois cents cas de pension alimentaire et
de garde d’enfants, deux cent soixante-dix-huit cas de violences physiques,
cent vingt quatre cas d’atteintes sexuelles sur mineure de moins de 13 ans et
cent dix-sept cas de viol. Ces données ne sont que la partie visible de
l’iceberg. Les chiffres donnent aujourd’hui raison au chef de l’Etat, qui a
pensé à bâtir l’édifice Inf en lui donnant les moyens de ses actions sur le
terrain. « La vision émanant du président de la République, Patrice Talon,
après un bilan démontrant la stagnation du progrès dans le domaine qui est le
nôtre (ndlr : de la lutte contre les Vbg), a été inspirée par un
ras-le-bol au sujet de la condition d’une grande frange de la population
féminine béninoise », a expliqué Huguette Bokpè Gnacadja, présidente de
l’Inf, au lancement officiel de la campagne des seize jours d’activisme contre
les Vbg.
Selon
elle, Patrice Talon était exaspéré par l’ampleur des violences sur le sexe
féminin. « Ce ras-le-bol est
décliné en ras le viol, en ras le harcèlement sexuel, en ras les mariages
précoces, en ras les discriminations, des plus subtiles aux plus flagrantes,
faites aux femmes et aux filles, en ras les violences physiques,
psychologiques, économiques, et autres, commises sur elles à raison de leur
sexe, en ras l’invisibilité des femmes là où l’on prend les décisions qui
engagent les familles, les communautés, et la nation, en ras la tolérance
observée dans certains milieux étatiques de cet état de choses, en ras
l’impunité subséquente, dans une ambiance de règne du patriarcat qui fait le
lit de l’insécurité grandissante de la vie quotidienne de milliers de filles,
de jeunes filles, de femmes », développe-t-elle.
Actions
multisectorielles
Pour combler les attentes du chef de l’Etat, des nombreuses victimes et de leurs familles, l’Inf veut travailler en toute intelligence avec différents ministères à travers des actions coordonnées et concertées. Entre le ministère des Affaires sociales et de la Microfinance, c’est déjà la lune de miel sur la problématique des Vbg. L’institut veut tisser les mêmes relations avec le ministère du Numérique et de la Digitalisation (Mnd). Tout en appréciant l’appui dudit ministère aux jeunes filles dans la pénétration du secteur du numérique, et les femmes dans la branche entrepreneuriale, Huguette Bokpè Gnacadja pense que l’alliance Inf et Mnd « pourrait porter sur une stratégie d’utilisation des technologies pour la prévention et l’intervention rapide, notamment par la création de plateformes numériques pour signaler anonymement les violences, et aussi par un appui au développement de campagnes de sensibilisation en ligne, la lutte contre le cyberharcèlement et la cyberviolence à l’égard de la femme ».
S’agissant
du ministère de la Santé, poursuit-elle, la facilitation de la prise en charge
médicale des victimes est déjà en cours et connait un regain d’efficacité avec
la gratuité du certificat médical qui nécessite une vulgarisation du texte le
réglementant afin de clarifier les procédures de son obtention et mettre tous
les intervenants au même niveau d’information et de diligence. « Nos
efforts réunis pour une application effective et uniforme sur l’ensemble du
territoire des protocoles de soins d’urgence, et pour un accès plus grand du
plus grand nombre à la prise en charge psychologique nous rendront plus forts
dans la riposte », souhaite-t-elle.
Avec
le ministère de la Justice, l’Inf a déjà un cadre supplémentaire de
collaboration dans la perspective de l’opérationnalisation de l’aide
juridictionnelle qui constitue une grande avancée, rassure la présidente de
l’institut. « Ce service viendra renforcer la gratuité de l’assistance
juridique et judiciaire offerte par l’Inf et augmentera l’accès de plus de
victimes à la justice. La protection des survivantes est aussi un champ
possible de réflexion pour son amélioration », envisage-t-elle.
Pour
ce qui est du ministère en charge du Commerce, indique Huguette Bokpè Gnacadja,
«son soutien à l’autonomisation économique des femmes, assurée par le ministère
des Affaires sociales et de la Microfinance ne sera pas de trop, car nombreuses
sont nos plaignantes qui sont dans des besoins spécifiques prioritaires
d’autonomisation économique pour pouvoir dire non à la violence ».
« On pourrait envisager un appui à des initiatives entrepreneuriales pour les survivantes comprenant des formations en gestion d’entreprise et en développement de projets. La création de partenariats avec des entreprises pour intégrer les survivantes dans le secteur formel. Le soutien aux survivantes qui sont intéressées par l’artisanat ou le commerce local », projette la présidente de l’Inf. Ces perspectives démontrent l’intérêt pour le Bénin d’avoir l’Inf aujourd’hui.