La Nation Bénin...

Scandale du nouveau siège du Parlement à Porto-Novo: Les députés exigent des poursuites judiciaires (L’érection du siège sur un autre site envisagée)

Actualités
Par   Thibaud C. NAGNONHOU, A/R Ouémé-Plateau, le 08 mai 2018 à 07h24
[caption id="attachment_29077" align="alignnone" width="1024"]Quotidien- le nouveau siège de l'Assemblée Nationale à l'entrée de la ville de Porto Novo[/caption]

Les députés ne sont pas allés du dos de la cuillère, ce lundi 7 mai, pour demander au gouvernement de faire rendre gorge à tous les mis en cause dans le scandale du chantier du nouveau siège de l’Assemblée nationale en souffrance à Porto-Novo. Le dossier était au cœur de la séance plénière, avec en toile de fond le rapport de l’audit technique, juridique et financier commandité par le gouvernement du président Patrice Talon pour évaluer de façon approfondie les travaux et situer les responsabilités.

Les promoteurs des entreprises privées et autres cadres de l’Administration publique impliqués dans le chantier de construction du nouveau siège de l’Assemblée nationale à Porto-Novo sont dans de beaux draps. Les députés recommandent avec insistance qu’ils soient traînés devant les tribunaux et qu’ils soient sommés de rembourser les fonds indûment empochés. Ils souhaitent qu’un autre site soit trouvé à Porto-Novo pour la construction d’un nouveau siège pour l’institution parlementaire et que le bâtiment querellé soit baptisé « Musée de la corruption et de la mal gouvernance ». 

Ces propositions ont été faites lors de la séance plénière de ce lundi 7 mai, consacrée à l’examen de la communication sur la réponse à la question, présentée par le gouvernement représenté par le ministre en charge du Cadre de vie, Didier Tonato, et son collègue chargé de la Justice, Me Joseph Djogbénou. Il ressort de l’exposé des deux ministres que 20 010 647 814 F Cfa Ttc ont été déjà engloutis dans ce chantier lancé, le 14 novembre 2008, et qui devrait coûter un montant global de 16 milliards Ttc pour un délai d’exécution de deux ans. Cette somme a été dépensée sur le montant total de 22 664 019 976 F Cfa versé par le gouvernement à la Serhau Sa, maître d’ouvrage délégué.
Les représentants du gouvernement ont été appuyés dans leur présentation par l’expert du cabinet d’étude Qcs ayant été recruté pour faire l’audit technique, financier et juridique du chantier. En dépit de ce coût anormalement déjà élevé, le ministre Didier Tonato note qu’il faut encore 22 501 709 588 F Cfa pour achever les travaux. Et ce financement complémentaire n’offre pas la garantie et la sécurité de l’ouvrage, ni sur la durée de vie possible de l’édifice, dans un contexte où il est juridiquement impossible d’obtenir une assurance en vue d’une garantie décennale pour les travaux d’aussi mauvaise facture, insiste-t-il. Il a été révélé un écart important entre le taux d’exécution physique de 45,71 % et le taux d’exécution financière de 56,19 %. Le taux d’exécution physique du gros-œuvre au 30 septembre 2016 est de 90 % contre 99 % du Taux d’exécution financière.

Malfaçons

Au plan technique, les désordres répertoriés par la mission d’audit remettent en cause la stabilité et la solidité globale des ouvrages notamment pour les principaux bâtiments tels que le bloc administratif et l’hémicycle. Il a été relevé plusieurs malfaçons. Des ségrégations ont été notées un peu partout au niveau des poutres ainsi que l’apparition des aciers au niveau du bâtiment du bloc administratif et de l’hémicycle ; des dimensions de poteaux sont non conformes au plan des chaînages coulés à moitié ; des planchers hors normes ; un défaut d’alignement des briques et des bétons réalisés avec des coquillages de mer. « Malgré l’importance des ressources financières mobilisées pour son exécution et les nombreuses reprises, le chantier est dans un état d’abandon avec de graves malfaçons sur le gros-œuvre des bâtiments », dénonce Didier Tonato. Il relève que le projet a souffert en aval d’une conduite maîtrisée des études architecturales et techniques devant assurer sa qualité à la phase de réalisation, soit une défaillance dans la phase de conception, dans la procédure de permis de construire et l’élaboration d’une notice de sécurité.
« Le gouvernement constate avec amertume que le projet de construction du nouveau siège de l’Assemblée nationale a accusé un important retard et connu de nombreux dysfonctionnements à cause du manque criant de professionnalisme et de rigueur de tous les acteurs, en particulier du maître d’ouvrage délégué, la Serhau Sa », dénonce Didier Tonato. Il accuse clairement la Serhau Sa, maître d’ouvrage délégué ; le Groupement Trophée,
l’entreprise Gee en charge des gros-œuvres, les bureaux de contrôle ainsi que les administrations respectives qui ont conduit les régies, d’être les responsables effectifs de cet échec. Didier Tonato martèle que leurs responsabilités sont entièrement engagées. Selon le ministre, il n’est pas prouvé que les investissements effectivement réalisés puissent coûter les 20 milliards F Cfa qui ont été décaissés. « Cela impose à l’Etat d’exercer nécessairement tous les recours en garantie contre les différents responsables du scandale », conclut le ministre qui a été appuyé par le cabinet d’études Qcs qui a présenté les principaux constats physiques relevés sur le chantier.