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Traque aux faux diplômes: un cheval de bataille du gouvernement

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Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 06 avr. 2018 à 09h24

A l’ère du Nouveau départ, les faux diplômes n’ont pas droit de cité. Démasqués, les travailleurs de l’Administration publique qui en sont détenteurs, sont dénoncés publiquement, radiés puis traduits devant la justice.

Pas de place dans l’Administration pour les faussaires. Le gouvernement de Patrice Talon, dès son installation, a affirmé sa détermination à poursuivre la moralisation de la vie publique à travers, entre autres, la lutte contre les faux diplômes et le recrutement de faussaires dans la Fonction publique béninoise. Il en a donné le ton à la faveur du Conseil des ministres tenu le mercredi 3 août 2016. Séance au cours de laquelle, dix cas relevés par la Commission nationale de vérification de l'authenticité des diplômes des agents de l'Etat, civils et militaires (Cnvad) ont été soumis à l’examen des membres du gouvernement. Ceux-ci ont autorisé à l'encontre des mis en cause, la mise en œuvre de la procédure de radiation de la Fonction publique et l’engagement de poursuites judiciaires. Ainsi, le gouvernement entend « redonner confiance aux agents honnêtes et méritants » et à « donner espoir à la jeunesse béninoise, en mal de repère et à réinstaurer l'excellence dans notre système éducatif ».

Le ministre du Travail, de la Fonction publique a été instruit aux fins de renforcer le contrôle des diplômes en faisant procéder à une contre-expertise du travail de la commission par un cabinet indépendant, de faire adopter, par la commission, des méthodes modernes de vérification pour mieux affiner ses procédures et de la doter de moyens conséquents pouvant lui permettre d'accélérer ses travaux. Le ministre devrait également prendre les mesures nécessaires pour interdire l'accès aux concours d'entrée à la Fonction publique des détenteurs de diplômes obtenus dans les établissements privés non agréés par l'Etat, selon le compte rendu du Conseil des ministres.
Puis, le 25 novembre 2016, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (Mesrs) révèle que 78 individus sont épinglés dont 77 sont détenteurs de faux baccalauréats et une personne détentrice d’une fausse maîtrise ès-Sciences économiques et de gestion obtenue en France. La plupart, soit 69 cas au total, sont des diplômes prétendus obtenus au Niger ; les autres seraient acquis au Togo, au Congo, en Mauritanie, au Mali, au Burkina Faso. Le Conseil des ministres a relevé que « Cette situation, pour le moins préoccupante, devient récurrente au regard du nombre considérable des cas de contrefaçon de diplômes étrangers et même d’attestations d’authenticité et d’équivalence de diplômes ». Il a été donc décidé d’appliquer sans complaisance les sanctions prévues par les textes en vigueur. « Car, il n’y a point de progrès sans justice sociale », dira le président Patrice Talon, lors de son message sur l’état de la nation en décembre 2016 à l’Assemblée nationale.

Les cas se multiplient

Au cours de sa séance du mercredi 11 janvier 2017, le Conseil des ministres s’est penché sur la situation des agents occasionnels et autres reversés dans la Fonction publique en qualité d’agents contractuels de l’Etat à partir de 2006. Des missions de vérification des conditions de reversement ont relevé, en fait, des dysfonctionnements avec de faux diplômes, faux certificats, des discordances de date d’une pièce à l’autre, mentionne le compte rendu. Des dérapages qui ont fait porter l’effectif global des agents reversés à 35000 pour une estimation initiale de 8 000, et faire ainsi gonfler la masse salariale.
Au titre du premier trimestre de l’année 2017, après avoir dépouillé 12014 dossiers d’agents de l’Etat dont 4 189 effectivement traités par les structures de délivrance de diplômes, la Cnvad fait état de 19 nouveaux présumés faussaires identifiés parmi lesquels 13 cas sont avérés et rendus publics.
Mercredi 28 février 2018, de nouveaux cas de faux diplômes sont rendus publics à l’issue du Conseil des ministres qui a examiné le rapport des travaux de la Cnvad au titre des deuxième et troisième trimestres 2017. Sur 8368 dossiers étudiés, 40 agents suspectés d’avoir de faux diplômes ont été auditionnés dans le respect du principe du contradictoire. Dix n’ont pas cru devoir répondre aux convocations. Parmi ceux qui ont été écoutés, « certains agents ont présenté des diplômes que les établissements censés les avoir délivrés ne reconnaissent pas ; d’autres ont présenté des diplômes ou des certificats apocryphes, c’est-à-dire non authentiques et donc douteux, sans pouvoir en prouver la régularité », mentionne le compte rendu du Conseil des ministres. Au finish, 34 agents sont passés aux aveux devant la commission tandis que 6 rejettent l’accusation de faux diplômes.
Pour rappel, la Commission nationale de vérification de l'authenticité des diplômes des agents dont la création remonte à la Conférence des Forces vives de la Nation de février 1990, a examiné, du 31 décembre 1990 au 31 décembre 2015, au total 48 519 diplômes dont 45 600 diplômes nationaux. L'examen de ces diplômes avait déjà permis de détecter et de soumettre à la procédure d'audition, 92 agents détenteurs de faux diplômes dont 66 sont déjà radiés de la Fonction publique et 16 font l'objet d'une procédure de radiation de la Fonction publique.
Des dizaines de faux diplômés, certainement, sont encore tapis dans les rangs des agents civils et militaires de l’Etat et doivent être démasqués. Cela participe de la modernisation de l’Administration publique béninoise politisée et minée par le népotisme, le clientélisme, la corruption.