La Nation Bénin...
Dignitaire
du culte Vodun, Mambo, donc prêtresse depuis son Haïti natal, Suzanne Delaunay
Belleville, membre du Comité national des rites Vodun, est aussi en guerre
contre les préjugés et autres clichés sur le Vodun. Pour elle, cette religion
de paix et de bienfaisance devrait être expérimentée par tous.
Rien ne la distingue des dignitaires d’origine béninoise. Parée de ses plus beaux attributs, deux jumeaux soigneusement rangés en haut de sa tenue de prêtresse, Suzanne Delaunay Belleville les ajuste de temps à autre, s’appuyant sur sa canne de circonstance. Elle est prêtresse et l’assume. Si elle porte un combat, c’est celui de la valorisation du Vodun et elle en veut d’ailleurs à tous ceux qui pourfendent sa religion. Pour les Vodun days, cette représentante du pontife du Vodun dans les Antilles s’est assignée pour mission de travailler à la valorisation du culte qu’elle vénère. Elle est « Mambo », ce qui veut dire prêtresse dans le Vodun d’Haïti. Le Vodun est la manière de vivre, de penser et d’être du peuple béninois, annonce-t-elle d’entrée. « Les religions révélées sont venues changer la donne, mais le Béninois reste profondément Vodun parce que quand rien ne fonctionne dans les autres religions, on retourne à l’ancestralité, à savoir au Vodun », explique la prêtresse. Et quand on l’interroge sur l’importance de l’initiative du gouvernement béninois pour les visiteurs et touristes, elle répond toute souriante que la fête des cultures endogènes devenue Vodun Days est une manière de démystifier cette vision que beaucoup ont du Vodun. « Hollywood s’est emparé de notre tradition et l’a diabolisé. C’est une manière de montrer aux gens la beauté et les valeurs du Vodun et notamment les valeurs et l’âme du peuple béninois et je dirais même de l’Afrique entière », tranche la prêtresse. Il est important pour nous de pouvoir apporter nous-mêmes notre message parce que personne ne peut parler de nous à part nous-mêmes, précise-t-elle. Les Vodun days qu’elle expose comme une fête des cultes endogènes, de tradition africaine, est une manière de montrer la richesse du patrimoine immatériel béninois qu’est le Vodun, précise-t-elle « C’est du Voodoo réactualisé, une manière de montrer ce qu’est le Vodun, une des religions les plus vivantes et les plus adaptables », poursuit Suzanne Delaunay Belleville. C’est une religion de résistance et de résilience, selon elle. D’ailleurs, le Vodun ne sera jamais démodé, prédit la prêtresse. Et si le monde entier peut assister aux Vodun days, c’est parce que cette religion ne sera jamais démodée. « C’est comme si vous me disiez que la vie n’existe plus… le Vodun, c’est la vie, c’est l’impermanence de la vie. Et tant qu’il y aura la vie, il y aura le Vodun », illustre-t-elle. « Donc le Voodoo va s’adapter. Parce qu’il s’est adapté. Nous qui avons été déportés, nous qui avons traversé les terres de déportation, nous avons gardé cet arbre, nous avons gardé la soupe de notre arrière-grand-mère et nous l’avons adaptée. Et sur toutes les terres de déportation, d’Haïti à la Martinique, à la Guadeloupe, à Sainte-Lucie, à Cuba et au Brésil, avec des noms différents, c’est le Vodun, avec une histoire différente », soutient-elle. Selon elle, les divinités qui sont au Bénin se retrouvent en Haïti, à Cuba et au Brésil. « On parle beaucoup d’Orisha et il ne faut pas oublier que nos ancêtres qui ont traversé n’étaient pas que des Béninois, il y avait aussi des Congolais. Et donc nous avons beaucoup cette influence Bantu dans notre Vodun qu’on ne retrouve pas ici, puisqu’on est sur la terre du Bénin », nuance-t-elle. La prêtresse voit les Afro-descendants comme une synthèse de l’Afrique. « Nous sommes, nous les enfants de l’Afrique déportés, le résumé de l’Afrique », indique-t-elle.