La Nation Bénin...
Face
à une dépendance massive aux importations de viande de volaille, le Bénin doit
renforcer sa production nationale pour atteindre l'autosuffisance. Le défi est
immense avec l'interdiction des importations des poulets congelés.
Comment
le Bénin peut-il combler l’écart entre l’importation de viande de volaille et
la production locale afin de garantir l'approvisionnement du marché ? Entre
obstacles et opportunités, l’Observatoire du commerce, de l’industrie et des
services (Ocis) à travers son bulletin d’information, a analysé et proposé des
mesures à mettre en place pour assurer une transition réussie vers une
production locale renforcée.
La
consommation de viande de volaille au Bénin est en forte augmentation, portée
par la croissance démographique et la préférence des consommateurs pour cette
source de protéines. Pourtant, le pays reste fortement dépendant des
importations pour satisfaire la demande nationale. Entre 2017 et 2022, le taux
d’autosuffisance en viande de volaille a oscillé entre 38,7 % et 45,8 %, avec
une tendance à la baisse. En 2022, la production locale s'élevait à seulement
9
675 tonnes, tandis que le volume total des importations atteignait 132 677,3
tonnes, couvrant ainsi 93 % des besoins de consommation. Face à cette
dépendance critique, le gouvernement béninois a annoncé en avril 2024 son
intention d’interdire l’importation de poulets congelés et d’œufs de table à
compter du 31 décembre 2024. Cette mesure vise à stimuler la production locale,
notamment via le développement du "poulet bicyclette" qui est une
race indigène rustique.
Toutefois,
sa mise en œuvre sans un renforcement préalable de la filière pourrait
entraîner une pénurie et une flambée des prix sur le marché national. L’enjeu
est grand et le gouvernement joue sa partition en mettant en place le cadre
nécessaire pour permettre aux producteurs locaux de pouvoir relever le défi. Le
Bénin produit en moyenne 85 567 tonnes de viandes par an, dont 12,4 % de viande
de volaille. La majeure partie de cette production provient de l’aviculture
traditionnelle, tandis que l’élevage moderne reste sous-exploité.
Parallèlement,
la production nationale d’œufs de table a connu une croissance significative,
passant de 7 805 tonnes en 2019 à 20 017 tonnes en 2023. Cependant, cette
croissance doit s’accompagner d’une meilleure structuration de la filière et
d’un appui logistique accru pour soutenir une production locale viable.
Stratégies
Malgré les opportunités qu’offre la mesure gouvernementale, plusieurs obstacles doivent être levés pour atteindre l’autosuffisance en viande de volaille. Il s’agit de la faible productivité de l’élevage traditionnel et de l’insuffisance des unités de production modernes, du coût élevé des intrants et des difficultés d’accès au financement, de la vulnérabilité aux maladies aviaires nécessitant des efforts accrus en matière de surveillance sanitaire, de la concurrence avec les produits importés et de l’absence d’une régulation claire des prix.
Pour relever ces défis et assurer une transition efficace vers l’autosuffisance, plusieurs mesures doivent être prises dans le cadre d’un partenariat public-privé. Parmi les principales actions à mener, l’Observatoire propose une augmentation de la production des matières premières pour l’alimentation de la volaille. Ce qui amènera à intensifier la culture du maïs et la production de tourteaux de soja pour assurer un approvisionnement stable et à coût réduit des aliments pour volaille. L’Observatoire évoque également le renforcement des capacités techniques des acteurs en formant les aviculteurs aux techniques modernes et intensives d'élevage et en encourageant l’adoption des meilleures pratiques pour améliorer la productivité et la résilience de la filière. Il est aussi indiqué de mettre en place des financements adaptés pour l’investissement. Ce qui permettra de développer des mécanismes de crédits agricoles avantageux pour les éleveurs et transformateurs et de créer un fonds de soutien spécifique à la filière avicole. L’adoption de ces mécanismes induira le développement de grandes unités d'élevage et de transformation. A ce stade, il faut encourager la mise en place d’une structure intégrée réunissant éleveurs, transformateurs et distributeurs, puis renforcer la structuration des coopératives avicoles. L’amélioration des infrastructures et de la logistique est aussi un aspect important dans la prise des mesures. Ce qui conduira à la construction des abattoirs modernes et à développer des chaînes de froid pour assurer la conservation et la distribution de la viande locale. Sans oublier la création de marchés de distribution locaux et régionaux. L’interdiction des importations de viande de volaille constitue une opportunité de développement pour la filière avicole béninoise. Mais un engagement fort de l’État, des investisseurs privés et des acteurs de la filière sera déterminant pour atteindre l’objectif d’autosuffisance alimentaire en viande de volaille.