La Nation Bénin...
Outre l’escroquerie, il y a une multiplicité d’infractions de droit commun qui sont tout aussi punissables lorsqu’elles sont commises en ligne : vol de données informatiques, usurpation d’identité, recel, abus de confiance, extorsion, jeux de hasard illicites, blanchiment de capitaux et bien d’autres… Le Code du numérique prévient contre toutes ces déviances.
C’est une erreur que de penser que la liberté sur les réseaux sociaux dispense de l’obligation de bonne conduite. Même sur la toile, il faut savoir raison garder pour ne pas tomber dans les mailles du gendarme qu’est le Code du numérique en République du Bénin. En son titre X consacré aux infractions de droit commun commises en ligne, le Code du numérique évoque plusieurs infractions de droit commun qui sont punissables lorsqu’elles sont commises en ligne. C’est le cas du vol.
L’on définit généralement le vol comme la soustraction frauduleuse de la chose appartenant à autrui. Il peut y avoir également vol de données informatiques. L’article 561 du Code du numérique édicte qu’une personne qui copie, intentionnellement et sans droit, avec une intention frauduleuse, des données informatiques au préjudice d’un tiers est punie des mêmes peines que celles prévues dans les dispositions du Code pénal relatives au vol. En la matière, le Code pénal en vigueur en République du Bénin, en son article 626, indique que quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est coupable de vol et puni d’un emprisonnement d’un (01) an à cinq (05) ans et d’une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000) de francs Cfa. Sans préjudice des circonstances aggravantes et des qualifications diverses que peut prendre le vol, toute personne qui se livre à un vol de données informatiques s’expose donc aux mêmes peines.
L’autre infraction fréquente sur les réseaux sociaux, c’est l’usurpation d'identité. Pierre se fait passer pour Paul et crée un profil pour embrouiller les internautes afin de nuire à la réputation de Paul ou profiter de son réseau de contacts. Le scénario pullule sur les réseaux sociaux. L’article 462 du Code du numérique prévient : « Quiconque usurpe, intentionnellement et sans droit par le biais d’un système informatique, l’identité d’un tiers ou une ou plusieurs données permettant de l'identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui ou de porter atteinte à son honneur, à sa considération ou à ses intérêts, est puni d’un emprisonnement d’un (01) an à cinq (05) ans et d'une amende de cinq millions (5 000 000) à cent millions (100 000 000) de francs Cfa ou de l’une de ces peines seulement ». Cette peine s’étend aux complices et assimilés. La peine minimale est doublée lorsque l’infraction est commise au préjudice d'une personne dont la situation de vulnérabilité en raison de l'âge, d'un état de grossesse, d'une maladie, d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale était apparente ou connue de l'auteur des faits. Généralement, les personnes coupables d’usurpation d’identité ont commis ou finissent par commettre des actes d’abus de confiance. Le Code pénal en son article 651 définit l’abus de confiance comme le fait pour une personne de détourner au préjudice d’autrui des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a accepté à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé. L’abus de confiance par voie numérique est puni des peines prévues au Code pénal notamment un emprisonnement d’un an au moins et de cinq ans au plus, et d’une amende de cent cinquante mille à un million cinq cent mille francs Cfa au plus, sous réserve des cas d’aggravation comme c’est le cas lorsque l’infraction est commise au préjudice d’un mineur ou d’une personne vulnérable. Les peines sont alors portées au double. L’abus de confiance sur les données informatiques est réprimé de la même façon.
Quid du recel, de l’extorsion et du chantage en ligne ?
Est puni d'un emprisonnement de cinq ans à dix ans et de cinq millions à dix millions de francs Cfa d'amende, le fait pour toute personne, au préjudice des droits d'autrui, de détenir, d'utiliser ou de transmettre une chose en sachant que celle-ci provient d'une infraction au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique. Le recel est bel et bien une infraction prévue et punie par le Code du numérique. Le receleur et la personne faisant office d'intermédiaire afin de transmettre la chose sont punis des mêmes peines. Il en est de même pour toute personne qui, intentionnellement et sans droit, aura gardé, retenu ou détenu en tout ou en partie, des données informatiques enlevées, détournées ou obtenues à l'aide d'un crime ou d'un délit prévu par les dispositions du Code du numérique. Ces peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à vingt-cinq millions de francs Cfa d'amende lorsque la personne se livre au recel au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique, de manière habituelle ou lorsqu'elle s'y livre à l'occasion de l'exercice de sa profession. S’agissant de l’extorsion par voie électronique, l’article 570 du Code du numérique renseigne : « Est puni de un (01) an à cinq (05) ans d'emprisonnement et de cinq cent mille (500 000) francs Cfa à cinq millions (5 000 000) de francs Cfa d'amende, le fait d'extorquer par violence, menace de violence ou contrainte, soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d'une chose quelconque au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique ». Et par conséquent, quiconque extorque, en menaçant de révéler ou d'imputer des faits de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération, soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d'un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d'une chose quelconque au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique, est coupable de chantage et est puni de six ans d'emprisonnement et de cinq millions de francs Cfa d'amende.
Attention aux jeux de hasard en ligne !
Promoteurs, organisateurs et joueurs s’exposent à la rigueur de la loi lorsqu’ils s’adonnent aux jeux de hasard en ligne sans l’autorisation d’une autorité publique. « Quiconque, sans l’autorisation d'une autorité publique, organise publiquement ou propose un jeu de hasard ou met à disposition l'équipement nécessaire, au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique, est puni d'une peine d'emprisonnement de un (01) mois à trois (03) ans et d'une amende de cinq cent mille (500 000) francs Cfa à cinquante millions (50 000 000) de francs Cfa, ou de l'une de ces peines seulement », peut-on lire à l’article 572 du Code du numérique. Que cela soit en club ou en réunion privée, les jeux de hasard organisés sans autorisation d’une autorité publique sont qualifiés de jeux organisés publiquement. Est puni d’un emprisonnement de trois mois à cinq ans et d'une amende d’un million à cent millions (100 000 000) de francs Cfa, ou de l'une de ces peines seulement, quiconque agit professionnellement ou en tant que membre d'un groupe qui s'est constitué pour commettre en permanence de tels actes. Celui qui recrute pour un jeu de hasard public est puni d'une peine d'une durée maximale d'un an ou d'une amende ne dépassant pas cinquante millions de francs Cfa, ou de l'une de ces peines seulement. En outre, quiconque participe à un jeu de hasard public, est puni d'une peine de prison d'une durée maximale de six mois et d'une amende d’un million à deux cents millions de francs Cfa, ou de l'une de ces peines seulement.
Par ailleurs, le blanchiment de capitaux, souvent orchestré par le truchement des jeux de hasard, est puni conformément aux textes en vigueur, lorsqu’il est commis au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique.
Le respect de la vie privée, une exigence !
L’atteinte à la vie privée, l’atteinte au secret des correspondances et l’atteinte à la représentation de la personne sont en outre, des infractions souvent commises sur internet. S’agissant de l’atteinte à la vie privée, le Code du numérique en son article 574 édicte : « Est puni de cinq (5) ans d'emprisonnement et de vingt-cinq millions
(25 000 000) de francs Cfa d'amende, le fait, au moyen d’un ou sur un réseau de communication électronique ou un système informatique, de volontairement porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui : en captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ; en fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé ». Mais lorsque ces actes sont accomplis au vu et au su des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé. Il n’est donc pas la peine de se plaindre de la diffusion de paroles confidentielles dont on a admis soi-même la publication. Pour ce qui est de l’atteinte au secret des correspondances commise sur internet, elle se traduit par le fait, commis de mauvaise foi, d'ouvrir, de supprimer, de retarder ou de détourner des correspondances émises, transmises ou reçues par la voie électronique arrivées ou non à destination et adressées à des tiers, ou d'en prendre frauduleusement connaissance. Cette atteinte est punie des mêmes peines que celles prévues dans les dispositions du code pénal relatives au secret des correspondances notamment une amende de cinquante mille à deux cent cinquante mille francs Cfa et d’un emprisonnement de trois mois à cinq ans. Le fait de procéder à l'installation d'appareils de nature à permettre la réalisation de telles interceptions est tout aussi puni des mêmes peines.
Quant à l’atteinte à la représentation de la personne, elle s’entend comme le fait de publier sur internet, par quelque voie que ce soit, le montage réalisé avec les paroles ou l'image d'une personne sans son consentement, s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un montage ou s'il n'en est pas expressément fait mention. Elle est punie de cinq ans d'emprisonnement et de vingt-cinq millions de francs Cfa d'amende.