La Nation Bénin...
Les sociétés africaines sont de plus en plus en mal de
repères. Le continent connu pour ses valeurs en perd chaque jour. L’identité se
meurt, s’efface. Les plasticiens Charbel
Coffi Houadjèto (Bénin) et Dodji Efoui (Togo) observent cette situation de
près. Ils y plongent leurs inspirations et pinceaux à travers une série
d’œuvres en exposition à la galerie « Les ateliers Coffi » jusqu’au 24 janvier
2024.
Charbel Coffi Houadjèto et Dodji Efoui, à travers leurs
œuvres exceptionnelles, dénoncent la perte progressive et profonde des valeurs
traditionnelles qui maintenaient l’ordre social et la cohésion familiale, tout
en assurant la pérennisation de la mémoire familiale. Ils donnent un bel
exemple d’union sacrée, indispensable à la restauration de ces valeurs perdues
sous la guillotine de la modernité et/ou de la religion, pense la curatrice de
l’exposition. « Nos valeurs et nos traditions disparaissent les unes après les
autres », retiennent les deux artistes. Pour éveiller les consciences à ce
propos, l'un y va à travers de géants portraits, l’autre à travers les masques.
Charbel Coffi, artiste peintre autodidacte avec son style hors du commun,
hybride sur fond d’écartelages, de couleurs vives et moins appelle à une
reconnexion entre le continent et ses sources ancestrales. Son autre atout, une écriture singulière
qu’il fait apparaitre sur la plupart de ses toiles, et qui se laisse lire dans
différentes langues, selon l’origine du spectateur qui scrute son art.
Peintre multidimensionnel, Charbel Coffi plonge dans des
royaumes au-delà du visible et utilise ses peintures comme un moyen de
transmettre un attachement profond à sa vision unique du monde. « Chaque coup
de pinceau est une exploration délibérée des profondeurs de son imagination,
alors qu’il cherche à transcender les limites de la perception
conventionnelle». Grâce à sa maîtrise des couleurs, des formes, des textures et
des pigments naturels, il construit un langage visuel qui va au-delà de la
simple représentation. Il invite ainsi les spectateurs à pénétrer dans un
univers où la réalité se mêle à l’impalpable, le visible à l’invisible. « Ses œuvres sont autant de fenêtres ouvertes
sur ses pensées, ses émotions et ses croyances les plus intimes, offrant un
aperçu des subtilités de sa vision du monde ».
S’inspirant des mystères de l’existence, des jeux d’ombre et de lumière
et de la relation symbiotique entre l’Homme et la nature, il tisse des récits
complexes sur ses toiles. Chacune de ses œuvres se veut in fine, une tapisserie
de symboles et de métaphores qui en dit long sur la relation de l’artiste avec
le monde qui l’entoure.
Reonstituer le monde
Dodji Efoui, de nationalité togolaise, apporte sa part à
cette ode à la reconquête du patrimoine culturel à travers quelques masques et
d’autres réalisations. Ses œuvres allient toile et éléments de récupération, du
métal aussi, pour reconstituer le monde que les deux artistes appellent de
leurs vœux. Sa touche artistique consiste à mettre en action des éléments
composites, « en vue de faire surgir du quotidien des corps-paysages, des
corps-écritures, des corps sonores, des entités vibratoires, des humains dans
leurs dimensions charnelle et spirituelle. Il s’agit pour lui de rendre
visibles les lignes de force qui traversent les corps, portés par le courage de
vivre». Tout son travail, « est un long
poème hybride où la couleur est un son et le son, une couleur », témoigne la
curatrice de l’exposition, Dénadi Carole Sagbo. En quête d’équilibre et de
souplesse dans un monde mouvant, le jeune artiste togolais conçoit un univers «
où les mots heurtent les oreilles et où les images crèvent les yeux. Un monde
où l’on tue et meurt par manque d’imagination», note la curatrice.
L’exposition dont le vernissage a eu lieu, il y a quelques
jours, à Cotonou est baptisée « Éclats d’âmes, regards croisés ». EIle part du
manque d’union et de la déconfiture des sociétés pour s’étendre à une
collaboration artistique comme on n’en trouve plus beaucoup. Par leur travail,
les deux artistes se sont donné pour mission de présenter un bel exemple
d’union sacrée et d’œuvrer à la restauration de ces valeurs perdues. Leurs
œuvres, résonnant tel un plaidoyer, sont à découvrir jusqu’au 24 janvier 2024
dans les locaux des Ateliers Coffi à Togbin.