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Manquements aux obligations du droit du travail: Les pénalités encourues

Droits et Devoirs
L’inobservance des dispositions du code du travail expose  à des peines essentiellement pécuniaires mais pouvant  s’étendre à la privation temporelle de liberté L’inobservance des dispositions du code du travail expose à des peines essentiellement pécuniaires mais pouvant s’étendre à la privation temporelle de liberté

Le droit du travail organise la relation de travail entre l’employeur et le travailleur. Il prévoit pour chacune des parties, en l’occurrence l’employeur, des obligations tout au long du cycle de vie du contrat. L’inobservance de ces obligations expose le contrevenant à des peines pécuniaires pouvant s’étendre à la privation temporaire de liberté.

Par   Anselme Pascal AGUEHOUNDE, le 08 sept. 2023 à 08h14 Durée 3 min.
#code du travail #Droit du travail
A chaque infraction aux dispositions du droit du travail correspond une peine. Quoique dérisoires, les sanctions notamment pécuniaires prévues au code du travail en vigueur au Bénin, matérialisent la volonté du législateur de protéger le travailleur de probables abus de l’employeur agissant directement ou par son représentant. « Les employeurs sont civilement responsables des condamnations prononcées contre leurs directeurs, préposés ou gérants pour fautes commises dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions », précise l’article 297 de la loi N° 98-004 du 27 janvier 1998 portant Code du travail en République du Bénin. Et dans le cas où l'amende prévue pour la première infraction est applicable autant de fois qu'il y a d'infractions constatées ou de travailleurs ou apprentis concernés, l'amende prévue pour la récidive est également imposée autant de fois qu'il y a de nouvelles contraventions relevées. Le législateur entend ainsi décourager la récidive. Il y a récidive lorsque, dans les douze mois antérieurs au fait poursuivi, le contrevenant a déjà subi une condamnation pour une infraction identique.
S’agissant du tribunal compétent, le code du travail dans les dispositions générales relatives aux pénalités, notamment en son article 295, prévoit que les infractions aux dispositions du code sont poursuivies devant le tribunal conformément aux dispositions du code de procédure pénale. Cependant, le tribunal en dépit de toutes dispositions contraires, peut se prononcer d'office sur les réparations civiles auxquelles ces infractions pourraient donner lieu.

Manquements aux formalités contractuelles 

Sont punis d'une amende de 3 500 à 35 000 F Cfa et en cas de récidive, d'une amende de 7 000 à 70 000 F Cfa, les auteurs d'infractions aux dispositions de l’article 13 relatif à l’obligation d’enregistrement des contrats à durée déterminée par les services compétents du ministère du Travail ; des articles 65 et 69 respectivement relatifs à l’enregistrement du contrat d’apprentissage et à l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail avant sa suspension ; des articles 75, 77 et 78 respectivement relatifs à la déclaration du contrat de tâcheronnat à l’inspecteur du travail (lui remettre deux exemplaires), à l’obligation pour le tâcheron de déclarer sa qualité de tâcheron et son adresse par voie d’affichage dans tous les ateliers et à l’obligation pour l’entrepreneur de tenir une liste actualisée des tâcherons avec lesquels il a passé un contrat ;  de l’article 83 relatif aux formalités à remplir par tout syndicat avant d’exercer légalement. Sont aussi visés les auteurs d'infractions aux dispositions de l’article 137 relatif à l’obligation pour l’employeur d’élaborer un règlement intérieur et de le faire viser par l’inspecteur de travail  lorsqu’il a à charge au moins quinze travailleurs ; de l’article 167 relatif aux droits des travailleurs âgés de 14 à 21 ans et à l’obligation pour l’employeur de tenir un registre des travailleurs de moins de 18 ans ; des articles 187 et 190 respectivement relatifs à l’obligation de mettre en place un comité d’hygiène et de sécurité dans toute entreprise employant au moins 30 salariés, temporels ou occasionnels compris, et d’informer l’inspecteur du travail, le médecin du travail et l’organisme de sécurité sociale des réunions du comité d’hygiène ; de l’article 213 relatif à l’obligation d’afficher les conditions de rémunération du travail à la tâche et les taux minima. Sont punis de la même peine, les auteurs d'infractions aux dispositions du décret qui encadre le contrat d’apprentissage (tel que prévu à l'article 70) ; les employeurs ou leurs préposés responsables du défaut d'affichage du prix des marchandises mises en vente par l’économat (article 235) ; les auteurs de licenciement pour faits de grève légale sauf faute lourde du travailleur.

Infractions relatives au fonctionnement

Sont punis d'une amende de 7 000 à 35 000 F Cfa et en cas de récidive, d'une amende de 14 000 à 70 000 F Cfa, les auteurs d'infractions aux dispositions de l’article 139 relatif au dépôt de deux exemplaires du règlement intérieur au greffe du tribunal de première instance territorialement compétent ; de l’article 169 relatif à l’interdiction de maintenir les femmes et les jeunes travailleurs dans un métier reconnu par le médecin du travail comme étant au-dessus de leurs forces et au refus de paiement de l’indemnité due en cas de rupture normale de contrat. Sont punies de la même peine les infractions aux articles 182, 183, 184, 185 alinéa 1, relatifs aux conditions d’hygiène et de sécurité que l’employeur doit garantir, aux formations et sensibilisations afférentes ainsi qu’à la vulgarisation des premiers réflexes de secours lors des accidents internes de travail, à la non distribution de boissons alcoolisées et de tabac sur les lieux de travail ainsi qu’à la mise en place d’un dispositif de contrôle des règles d’hygiène et de sécurité ; des articles 198 et 199 respectivement relatifs à la prise en charge gratuite du travailleur ou de ses enfants malades lorsque ceux-ci sont logés sur les lieux de travail ainsi qu’à la mise en place d’un mécanisme d’évacuation des travailleurs victimes d’accidents graves à l’interne. Sont punis de la même amende les auteurs d’infractions aux articles 279, 282 et 284 respectivement relatifs à l’obligation de la déclaration des employés à la caisse de sécurité sociale, au dépôt à l’inspection du travail et en trois exemplaires d’une déclaration annuelle sur la situation de la main-d’œuvre et à l’obligation de déclarer toute modification survenue dans le statut de l’entreprise ; les personnes qui ont omis de déclarer à l’inspecteur du travail et à la Cnss, tout accident de travail ou toute maladie professionnelle; les auteurs d'infractions aux prescriptions des arrêtés fixant les dispositions spéciales relatives au repos hebdomadaire, la nature des travaux et les catégories d’entreprises interdites aux femmes… La récidive des infractions liées aux conditions d’hygiène et de sécurité, et au non-respect des arrêtés relatifs à l’introduction de l’alcool dans les lieux de travail, aux mesures de salubrité et aux visites sanitaires, peut, en outre, être punie d'un emprisonnement de quinze jours à trois mois. Le licenciement économique prononcé sans respect de la procédure d'information administrative prévue aux articles 47 et 48 du code est puni d'une amende de 14 000 à 84 000 francs appliquée tant de fois qu'il y a de travailleurs régulièrement licenciés.

Des préjudices portés aux salaires

Sont punis d'une amende de 3 500 à 35 000 F Cfa et en cas de récidive, d'une amende de 7 000 à 70 000 F Cfa, les auteurs d'infractions aux dispositions des articles 221, 222, 223 et 224 relatifs au paiement à échéance régulière des salaires, à la date de paiement et à l’obligation de paiement du salaire et des indemnités dès la cessation du travail en cas de résiliation ou de rupture, à moins qu’il y ait une procédure litigieuse en cours de règlement ; à la délivrance obligatoire d’un bulletin ou fiche de paie et à la tenue d’une pièce constatant le paiement du salaire et signée par l’employeur et chaque travailleur ou deux témoins si ce dernier est illettré.
Les infractions aux dispositions de l'article 227 du code du travail qui consacre l’interdiction de retenues fantaisistes sur salaire et qui fixe les modalités en la matière sont punies d'une amende de 14 000 à 70 000 F Cfa. En cas de récidive, l'amende est de 35 000 à 140 000 F Cfa. Sont punis d'une amende de 14 000 à 70 000 francs et, en cas de récidive, d'une amende de 70 000 à 140 000 francs et d'un emprisonnement de quinze jours à deux mois, ou de l'une de ces deux peines seulement, les auteurs d'infractions aux dispositions relatives aux congés payés et aux conditions de travail des femmes et enfants ; les auteurs d'infractions aux prescriptions de l'arrêté sur la nature des emplois et les catégories d’entreprises interdits aux femmes, femmes enceintes et jeunes travailleurs; tout employeur qui ne respecte pas le repos de la femme enceinte ainsi que le repos pour allaitement ; tout employeur qui prononce ou maintient un licenciement au mépris des dispositions légales et tout employeur qui a infligé des amendes illégales.

Faux et usage de faux

Sont punis d'une amende de 140 000 à 350 000 francs et d'un emprisonnement de deux mois à un an, ou de l'une de ces deux peines seulement, les auteurs d'infractions aux dispositions sur l'interdiction du travail forcé ; les personnes qui ont volontairement fait une fausse déclaration d'accident de travail ou de maladie professionnelle ; toute personne qui, par violence, menaces, tromperie, dol ou promesse, a contraint ou tenté de contraindre un travailleur à se faire embaucher contre son gré ou qui, par les mêmes moyens, a tenté de l'empêcher de se faire embaucher ou de remplir les obligations imposées par son contrat ; toute personne qui, en faisant usage d'un contrat ou d'un permis de travail, s'est fait embaucher ou s'est substitué volontairement à un autre travailleur ; tout employeur ou préposé qui a volontairement porté sur le registre d'employeur ou tout autre document, des attestations mensongères relatives à la durée ou aux conditions du travail accompli par le travailleur, ainsi que tout travailleur qui a fait usage de ces attestations. Ainsi que tout employeur ou préposé qui a volontairement engagé ou conservé à son service un travailleur encore lié à un autre employeur par son contrat de travail ou un apprenti encore lié par un contrat, indépendamment du droit à dommages et intérêts qui peut être reconnu à la partie lésée ; toute personne qui a exigé ou accepté du travailleur une rémunération quelconque à titre d'intermédiaire dans le règlement ou le paiement de salaires, indemnités, allocations et frais de toute nature ; toute personne qui fait entrave à la liberté syndicale telle qu’encadrée ; tout employeur qui entrave la constitution, la désignation des membres ou le fonctionnement des comités d'hygiène et de sécurité ; tout employeur qui fait obstacle à la mise en place des délégués du personnel et à l'exercice de leurs fonctions; toute personne qui a employé un travailleur de nationalité étrangère non muni d'un permis de travail. 
Sont punis d'une amende de 70 000 à 350 000 francs et, en cas de récidive, d'une amende de 210 000 à 420 000 francs, les auteurs d'infractions aux dispositions régissant l’économat notamment l’article 235 du code du travail.

Obstruction

Est punie d'une amende de 210 000 à 420 000 F Cfa et d'un emprisonnement de deux mois à un an, ou de l'une de ces deux peines seulement, toute personne qui s'est opposée ou a tenté de s'opposer à l'exécution des obligations ou à l'exercice des pouvoirs qui incombent aux administrateurs, inspecteurs et contrôleurs du travail. « Les dispositions du code pénal qui prévoient et répriment les outrages, violences et voies de fait contre les officiers de police judiciaire sont en outre applicables à ceux qui se rendent coupables de faits de même nature à l'égard des inspecteurs ou de leurs suppléants », précise l’article 305 du code du travail. Par ailleurs, toute infraction aux dispositions d'une sentence arbitrale est punie d'une amende de 14 000 à 70 000 francs imposée autant de fois qu'il y a de travailleurs concernés?