La Nation Bénin...
Le
dernier rapport pays de la Banque africaine de développement (Bad) ouvre une
lucarne sur la situation de la dette du pays. L’institution, après ses
observations, a formulé des recommandations visant à aider le pays à mieux
faire face à sa dette.
Le
Bénin a accompli des progrès significatifs ces dernières années en matière de
gestion de la dette publique, reconnait la Banque africaine de développement
(Bad). « Le pays a réussi à améliorer, de manière considérable, la notation
financière de sa dette souveraine, grâce aux réformes mises en œuvre au cours
des dernières années », souligne son dernier rapport pays. Depuis 2016, les
pouvoirs publics mettent en œuvre une politique de gestion active de la dette
en vue d’optimiser le profil coût-risque, notamment en remplaçant la dette
onéreuse par une dette moins chère, en allongeant la durée, en empruntant à un
taux d'intérêt fixe, et en privilégiant les financements en euro, constatent
les rapporteurs. La stratégie du Bénin, telle que révélée par la Bad « met
l’accent sur la réalisation d’opérations de gestion de passifs, afin d’atténuer
le risque de refinancements ». Aussi, rappelle-t-elle, que pour préserver sa
notation souveraine, le Bénin n’avait pas adhéré à l’Initiative du G20 de
suspension du service de la dette en 2020, durant la crise de Covid-19. À la
fin de 2023, le stock total de la dette publique du Bénin était estimé à 6508,5
milliards de F Cfa (10,66 milliards d’Usd), soit 54,5 % du Pib, contre 41,2 %
en 2019. Cette progression rapide de la dette publique s’explique surtout par
l’impact des Euro-obligations sur le stock total, soit 16,9 % de la dette
totale en 2023, justifie le rapport. Le risque de surendettement demeure
globalement modéré selon le Fmi, rapporte le document qui spécifie que l’agence
de notation Standard & Poor’s avait rehaussé, en avril 2024, la notation de
crédit du Bénin de (B+) à (BB-) avec perspective stable.
Malgré les avancées significatives en matière de gestion de la dette publique, les taux obtenus à travers les Euro-obligations aux conditions actuelles ne sont pas viables. Au cours du premier trimestre 2024, les émissions d’Euro-obligations avaient servi en partie, à refinancer la dette arrivant à échéance, mais à des rendements supérieurs au rendement de la dette en cours de refinancement. Dès lors, la principale préoccupation, selon la Bad, demeure le problème de refinancement de la dette arrivant à échéance. « Les banques multilatérales, dont la Bad, n’ont pas pour vocation de participer à des opérations de refinancement de dette. Dans le cadre de la réforme de l’architecture financière internationale, il est donc primordial, pour les pays confrontés à ce type de défi comme le Bénin, de plaider pour la mise en place d’un mécanisme de garantie de refinancement de dette arrivant à échéance », suggère l’institution dirigée par Akinwumi Adesina. Il est également nécessaire, selon elle, de développer des solutions plus viables, avec des coûts d’emprunts abordables, fondées sur le marché des euro-obligations. La Bad appelle aussi à continuer à renforcer les capacités en matière de gestion de la dette, améliorer le cadre de viabilité de la dette du Fmi et de la Banque mondiale, ainsi que les méthodes d’évaluation des notations de crédit des agences privées.
Pour améliorer les capacités de gestion de sa dette, le Bénin devrait poursuivre les réformes pour l’adoption de règles budgétaires et la mise en place d’un conseil budgétaire indépendant, préconise-t-elle. Selon le rapport Pea 2024 de la Bad, l’Afrique est en retard dans la mise en place de conseils budgétaires. Seuls le Kenya, l’Afrique du Sud et l’Ouganda ont mis en place des conseils budgétaires. La mise en place d’un conseil budgétaire indépendant peut jouer un rôle important dans le renforcement de la discipline budgétaire. Il est également important de travailler à l’adoption de règles budgétaires relatives à la dette et aux dépenses pour atténuer l’augmentation de la dette publique à long terme. Le renforcement des capacités du pays pour une bonne appropriation des meilleures pratiques en matière de réglementation et de structuration des dossiers d'obligations vertes, sociales et durables, ainsi qu’en matière d’évaluation et d’analyse des risques liés à l’émission d’obligations souveraines et de leur incidence sur la viabilité de la dette, est également important pour une bonne gestion de la dette sur le long terme. A ces recommandations s’ajoutent d’autres relativement à la viabilité de la dette.
Le
Bénin dispose en tout cas, «d’un capital naturel qui n’est pas suffisamment
pris en compte dans la richesse du pays lors de l’évaluation de la marge d’accumulation
de dettes ». Cette valeur inclut uniquement les actifs commercialisés, alors
qu’il existe d’autres services tels que la séquestration du carbone fourni par
les forêts et les mangroves, qui ne sont ni mesurés ni valorisés. L’exclusion
de la valeur de ces services écosystémiques pourrait conduire à une évaluation
à la baisse de la marge de manœuvre requise en matière de viabilité de la
dette. Le cadre actuel de viabilité de la dette se concentre uniquement sur le
côté passif du bilan de l’État, et ignore les actifs publics, notamment les
ressources qui peuvent être générées pour liquider la dette, selon le rapport
pays 2024 de la Bad■