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Transport ferroviaire dans l’espace Uemoa: Les rails d’intégration régionale à la croisée des chemins (Une boucle de près de 3 000 km pour relier les capitales)

Economie
Face à la nécessité de renforcer l’intégration régionale, l’Uemoa a entrepris une série de réformes et de projets ambitieux visant à revitaliser le secteur du transport ferroviaire. Face à la nécessité de renforcer l’intégration régionale, l’Uemoa a entrepris une série de réformes et de projets ambitieux visant à revitaliser le secteur du transport ferroviaire.

Si les défis financiers et techniques demeurent importants, l’avenir du rail dans l’espace Uemoa semble néanmoins prometteur, avec des perspectives de réduction des coûts de transport et de facilitation des échanges intrarégionaux sur le long terme. Une boucle ferroviaire de 3 000 km environ reliera les capitales de l’Union en plus de la ligne Dakar-Bamako à construire.

Par   Claude Urbain PLAGBETO, le 13 sept. 2024 à 06h10 Durée 3 min.
#transport #Espace Uemoa

Le réseau ferroviaire de l’Uemoa présente une très faible densité, avec seulement 1,02 km de voies ferrées pour 1000 km², contre 2,7 km pour l’Afrique en général et 400 km pour l’Europe. Cette situation constitue un frein au commerce et aux échanges intrarégionaux, qui ne représentent que 15,3 % des échanges dans l’espace Uemoa, bien en deçà de l’objectif de 25 % prévu pour 2025, indique Aboubakar Sidiki Touré, directeur des Infrastructures à la Commission de l’Uemoa. De plus, les quelques lignes existantes ne desservent pas efficacement les pays enclavés, comme le Niger et le Mali, ce qui limite leur impact économique. 

Ce constat a poussé l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) à mettre en place un cadre de réformes pour sortir le rail de cette léthargie. C’est ainsi que le Programme régional de développement du transport ferroviaire (Prdtf) a été adopté en 2014, avec pour ambition de moderniser et étendre les infrastructures ferroviaires, avec des projets d’interconnexion et d’interopérabilité des lignes existantes. Ce programme vise la réhabilitation des voies ferrées existantes et la construction de nouvelles lignes interconnectées entre les Etats membres, explique M. Touré.

En effet, hérité de l’ère coloniale (1900-1950), le réseau ferroviaire ouest-africain végète dans un état de vétusté avancé, avec des voies ferrées et locomotives obsolètes. Les lignes existantes, qui n’ont pas été modernisées depuis leur construction, sont souvent constituées de petits tronçons non interconnectés, ce qui rend le réseau non rentable et peu efficace. Dans le but de pallier cet état de choses, l’Uemoa a lancé le Programme d’actions prioritaires de développement du transport ferroviaire dans l’espace Uemoa (Papdtf), facteur clé de l’intégration économique et sociale, informe Dr Claude I. Dossou, chef division Infrastructures portuaires et aéroportuaires à la direction des Infrastructures de l’Uemoa.

Faire siffler le train

Parmi les projets phares prévus, on retrouve la modernisation de la Boucle ferroviaire Abidjan-Ouagadougou-Niamey-Cotonou-Lomé et du Corridor ferroviaire Dakar-Bamako, deux axes stratégiques pour le commerce régional.

Projet de la Boucle Ferroviaire / Principaux corridors par Etats

D’une longueur totale de 2 928 km, la Boucle ferroviaire reliera les principales capitales de l’Uemoa via neuf corridors modernes. L’objectif est d’assurer une interopérabilité totale des infrastructures tout en développant le transport des marchandises et des personnes, selon Claude Dossou.

Le coût de ce projet ambitieux est estimé à environ 6 376 milliards F Cfa incluant les travaux de réhabilitation des voies ferrées existantes (1951 km), avec une option alternative plus coûteuse à 10 278 milliards F Cfa pour la construction intégrale de nouvelles lignes, détaille Dr Dossou.

Le développement de l’industrie ferroviaire, la création d’un cadre réglementaire harmonisé pour l’entretien et la gestion des infrastructures, ainsi que l’interopérabilité des réseaux ferroviaires sont au cœur de ce programme. Le but, c’est de créer un réseau ferroviaire sécurisé et moderne capable de répondre aux besoins croissants de l’économie régionale, en particulier dans les secteurs minier, agricole et industriel, fait savoir le chef division Infrastructures portuaires et aéroportuaires.

Ces initiatives visent non seulement à améliorer la mobilité des biens et des personnes, mais aussi à renforcer les échanges intra-communautaires et internationaux, tout en réduisant les coûts de transport. Il est question de porter le volume des échanges au sein de l’espace Uemoa de 15,3 % à 25 % à l’horizon 2025 (Uemoa, 2021).

Encore en gestation

Le développement du transport ferroviaire dans l’espace Uemoa présente des avantages économiques indéniables. En réduisant les coûts de transport, le rail permettrait de diminuer le prix des marchandises, tout en favorisant une meilleure compétitivité des produits. Grâce aux réformes du Papdtf et aux projets d’infrastructures ambitieux, l’Uemoa entend redonner au rail une place centrale dans le développement économique de la région.

L’expansion du réseau ferroviaire permettra de réduire la pression sur les routes de l’Union, qui sont aujourd’hui en proie à une dégradation prématurée en raison des surcharges. Les routes supportent une agressivité 5 à 7 fois supérieure à la norme admise par le règlement communautaire (Règlement n° 14 de l’Uemoa), entraînant une durée de vie moyenne de seulement 5 ans pour des routes conçues pour durer 15 ans, relève le directeur des Infrastructures à la Commission de l’Union. Le développement du rail contribuerait ainsi à prolonger la durée de vie des infrastructures routières tout en améliorant les conditions de transport, assure-t-il.

Bien que les études de faisabilité et les projets techniques soient en cours pour plusieurs tronçons stratégiques, la modernisation intégrale du réseau ferroviaire prendra encore plusieurs années. Toutefois, l’Uemoa reste optimiste quant aux retombées économiques et sociales de ces investissements, qui devraient contribuer à une meilleure intégration régionale et à un développement plus inclusif