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Pollution du lac Nokoué: Ce que révèle une étude scientifique

Environnement
Dr Kodjo Jules Honfo Dr Kodjo Jules Honfo

Dans ses recherches, docteur Kodjo Jules Honfo a levé un coin de voile sur les mécanismes de rétention et d’évacuation des polluants par le lac Nokoué. Ses travaux sur ce plan d’eau mettent l’accent sur les défis auxquels fait face le lac.

Par   Alexis METON A/R Atacora-Donga, le 05 nov. 2024 à 10h09 Durée 2 min.
#Lac Nokoué

« Modélisation hydrodynamique de la lagune Nokoué située au sud-est du Bénin », tel est l'intitulé de la thèse de Kodjo Jules Honfo, soutenue le 18 octobre à Cotonou. Dans cette étude, il a mis en relief la pollution de la lagune et son mécanisme d’évacuation des polluants. « Comme beaucoup de milieux naturels, la lagune Nokoué fait face à des défis, notamment la pollution qui se manifeste par le rejet de divers polluants (eaux usées, métaux lourds, pesticides et déchets solides) pouvant provenir des villages lacustres dépourvus de tout système d'assainissement, mais aussi des émissaires urbains périphériques à cette lagune », souligne docteur Kodjo Jules Honfo dans sa thèse.

Il apporte ainsi de nouvelles connaissances sur cette lagune, située au sud-est du Bénin. Il fait observer que plus de 2 000 000 d’habitants des communes d’Abomey-Calavi, de Cotonou, de Sèmè-Podji et des villages lacustres, vivent autour de cette lagune. Ces populations dépendent directement ou indirectement de ce plan d'eau en tant que source d'approvisionnement en eau domestique, d'irrigation des terres de maraichage ; un cours d’eau servant aussi à la pêche, au transport touristique et de marchandises. « Au-delà de ces enjeux socio-économiques, la lagune Nokoué subit d'importantes variabilités naturelles à l'échelle saisonnière, liées à l'interaction simultanée des apports fluviaux, de la marée océanique et des vents ; dont le fonctionnement hydrodynamique a été pendant longtemps peu étudié, faute d’absence de données in situ en continu », relève le chercheur. 

Docteur Kodjo Jules Honfo indique que contrairement aux recherches récentes qui portent sur les modes de variabilités de la salinité et du niveau d’eau dans la lagune Nokoué, les études sur la circulation des masses d’eau et les échelles de temps qui caractérisent le transport de ces polluants sont quasi inexistantes. Ses recherches ont eu pour objectif de modéliser l’hydrodynamisme de la lagune Nokoué pour documenter à l’aide des simulations haute résolution, la circulation des masses d’eau et les échelles de temps qui caractérisent le transport des polluants. Dans ce cadre, le chercheur a utilisé un modèle numérique de l’océan côtier (modèle Symphonie) utilisé en océanographie pour la gestion des zones côtières, l’analyse des écosystèmes marins, la prévision des courants, et l’étude des interactions océan-atmosphère. Il a été validé avec succès, en comparant ces prédictions aux enregistrements des appareils du niveau d’eau, de salinité, de température et des échanges d’eau océan-lagune, à travers le chenal de Cotonou. 

Le temps de vidange des polluants

Le chercheur a souligné que la circulation des masses d’eau de la lagune Nokoué varie à l’échelle saisonnière avec des différences significatives entre la surface et le fond, malgré la faible profondeur. En période de crue qui s’étend de septembre à novembre, marquée par d’énormes apports d’eau douce des fleuves (1200 m3/s), la circulation est caractérisée par des connexions directes fleuves-chenal quasi homogènes sur la colonne d’eau. Ce qui entraîne la vidange des polluants de la lagune en l’espace de quelques jours seulement.

En période de salinisation (décembre-janvier) et d’étiage (février-juin), marquée par de faibles apports fluviaux (quelques m3/s), le temps de vidange des polluants est de quelques mois. Enfin, pendant la période de déstalinisation (juillet-août), marquée par l’augmentation progressive des débits des fleuves en début de saison pluvieuse, on assiste au rétablissement progressif des connexions-fleuve-chenal. Les temps de vidange des polluants décroissent alors à quelques jours.

« Cette étude a mis en évidence l’existence d’un débit critique de 50 - 100 m3/s autour duquel le temps de vidange des polluants peut devenir plus long (décembre-Juin) ou plus court (juillet-novembre). L’étude révèle aussi que les vents et la présence des acadjas dans la lagune tendent à retenir les masses d’eau et polluants dans la lagune tandis que la marée océanique, les apports fluviaux et les courants de gravité, engendrés par le gradient de salinité, favorisent l’évacuation », a-t-il indiqué■